Afghanistan : la fin du «Build State»
Débâcle, débandade, les mots sont crus pour qualifier ce qui s’est passé à Kaboul. Pourtant, tout cela était prévisible dès la signature par l’administration Trump de l’accord de Doha. Mais les services de renseignement comptaient sur une résistance de l’armée Afghane de 90 jours, les Talibans ont repris le pays en onze jours. Vingt ans de guerre, 2000 Milliards de dollars dépensés, 150.000 morts, en grande majorité des civils pour arriver à ce résultat, c’est effectivement une débâcle.
Les intérêts occidentaux sont sacrifiés. La Chine et l’URSS se positionnent en Afghanistan, qui pour les Chinois est une pièce de la route de la soie. Le terrorisme se renforce à l’idée d’une victoire sans appel, ce qui va revigorer les groupuscules un peu partout et la vente d’opium bat des records.
Ce gâchis intervient après d’autres et pose une question fondamentale. Ce que l’on a appelé le devoir d’ingérence, s’est transformé en « Build State », c’est-à-dire la reconfiguration des pays, au nom de la démocratie. C’est clairement théorisé par « le siècle américain », livre qui a servi aux néo-conservateurs pour justifier les guerres d’Afghanistan, d’Irak, de Libye, semant le chaos partout et n’en récoltant aucun bénéfice. Aujourd’hui, ils se retirent, mais sans aider à aucune solution politique. Le vent tourne et leurs opinions publiques sont plutôt attirées par le repli et pensent que l’exportation de la démocratie par les armes est une chimère.
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C’est une nouvelle ère qui s’ouvre. La France sera obligée de revoir sa présence en Irak, mais surtout au Sahel. Elle a peu de soutien de ses alliés occidentaux, n’arrive pas à atteindre ses objectifs et s’englue. En même temps, les Maliens et les Burkinabés contestent la présence des armées étrangères et en France des voix s’élèvent pour le retrait. Ce sujet fera partie des thèmes de la présidentielle.
Les cartes seront rebattues, une nouvelle géostratégie se mettra en place, les USA veulent une confrontation avec la Chine et son soft power si efficace, l’Europe sait qu’elle sera perdante. De ces convulsions, l’alliance qui s’impose entre la Russie et Pékin est favorisée par l’attitude européenne. L’onde de choc de Kaboul va continuer. Les premières victimes sont les Afghans qui ont cru dans la démocratie des boys. Ils sont abandonnés à leur sort comme les Vietnamiens du Sud, il y a 40 ans. Une démocratie naît des mouvements sociaux internes, pas des bombes des F16.
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