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Aller étudier en France : Tout sur les nouvelles règles

« Bienvenue en France ». C’est le nom de code de la nouvelle stratégie de la France pour attirer davantage d’étudiants étrangers dans l’Hexagone, du moins surtout certains étudiants. Premier pays d’accueil non anglophone, la France reste quatrième destination mondiale pour les étudiants internationaux (derrière les États-Unis et le Royaume-Uni) mais a perdu ces dernières années son troisième rang au profit de l’Australie. Sa place est disputée par plusieurs concurrents (voir encadré) à la fois européens comme l’Allemagne et la Russie ou plus lointains comme la Chine, le Canada ou l’Arabie Saoudite. Ainsi, en dépit d’une remontée depuis 2016, le nombre d’étudiants étrangers en France a baissé de 8% entre 2010 et 2015 et le gouvernement identifie un « risque de décrochage » français, sur fond d’envolée du nombre d’étudiants internationaux. « Cinq millions d’étudiants, soit 2,3% de la population étudiante mondiale, étudient dans un système universitaire étranger. Parmi cette élite, 343.000 viennent en France », selon une récente étude de l’agence publique de promotion à l’étranger de l’enseignement supérieur français, Campus France.

Pays émergents Vs Pays traditionnellement pourvoyeurs d’étudiants étrangers

Pour rattraper son retard, le nouveau plan prévoit de s’appuyer sur une campagne de sensibilisation baptisée « Choose France ». Objectif : élever le nombre d’étudiants internationaux à 500 000 à l’horizon 2027. Au-delà, le gouvernement français ne s’en cache pas aussi : l’accueil d’étudiants internationaux est une manière douce de promouvoir les valeurs et l’économie de l’Hexagone en rehaussant son rayonnement. « Pour mettre en place la stratégie Choose France, le Gouvernement s’appuiera sur une campagne de communication mondiale dès 2019, dont l’objectif sera de maintenir le rang d’attractivité de la France auprès de ses partenaires actuels et de développer la notoriété des études en France dans des pays où elle reste méconnue. Il s’agit de créer l’envie chez ceux qui considèrent la France comme une destination possible d’études afin qu’ils y viennent effectivement », peut-on dans le dossier de presse. Placée sous l’égide de Campus France et avec l’appui du réseau diplomatique, cette campagne de communication multi-supports et multicanaux diffusera un même message : Choisissez la France/Choose France. Elle mettra l’accent sur une cible géographique bien déterminée. En effet, trois grandes zones se détachent : zone francophone, grands pays émergents, notamment en Asie, Afrique anglophone. « Sans ignorer les pays traditionnellement pourvoyeurs de mobilité (Maghreb, Afrique de l’Ouest), la campagne de communication ciblera davantage les pays émergents (Chine, Inde, Vietnam, Indonésie) et les pays non-francophones d’Afrique subsaharienne, ceux où la connaissance de la France reste lacunaire et le potentiel important. Dans ce cadre, les pays identifiés sont la Chine, l’Inde, la Russie, le Brésil, le Moyen-Orient, les pays d’Afrique anglophone (Ghana, Nigeria, Kenya, Ethiopie) et les grands pays francophones (Maroc, Algérie, Tunisie, Sénégal, Côte d’Ivoire, RD Congo) », détaille le dossier de presse. Il faut dire que si l’accueil des étudiants étrangers coûte chaque année trois milliards d’euros à la France, il n’en demeure pas moins qu’il rapporte 4,65 milliards d’euros, selon Campus France, sans compter que cette catégorie d’étudiants seraient ensuite des ambassadeurs de la France. Pour autant en France, les budgets ne suivent pas l’évolution du nombre d’étudiants dans les établissements, à en croire le syndicat national de l’enseignement supérieur, qui affirme que « le ministère n’a donné aucun euro supplémentaire aux établissements qui avaient vu croître leur nombre d’étudiants ». Quoi qu’il en soit, la nouvelle stratégie entend engranger davantage de l’argent sur le marché des étudiants internationaux dès l’année prochaine. Selon celle-ci, les nouveaux étudiants étrangers (hors Union européenne) devront payer, dès 2019, 2 770 euros pour une licence et 3 770 euros pour un master et un doctorat qui coûtent jusqu’à présent 170 euros pour la licence, 243 euros pour le master et 380 euros pour le doctorat, et qui correspondent au tarif que paient également les étudiants français. Résultat des courses : ce nouveau plan est déjà contesté par les syndicats d’étudiants.

Le Maroc va-t-il garder sa première place ?

Du côté des pays jusque-là traditionnellement pourvoyeurs d’étudiants en France, ce plan proposé par le premier ministre français est vue comme une manière de faire le ménage. D’ailleurs, ils affirment n’être pas surpris par ces nouvelles dispositions dans la mesure où le Président français Emmanuel Macron, avait déjà un avant-goût de cette nouvelle stratégie, le 20 mars dernier, dans son discours sur la langue française et la francophonie à l’Institut de France. «  Les effectifs de la mobilité étudiante dans le monde vont fortement augmenter dans les prochaines années. La France devra accroître le nombre d’étudiants étrangers sur son territoire et le nombre de ceux qui viennent des pays émergents doublera parce que la langue française est ce bien qui nous lie. Étudiants indiens, russes, chinois seront plus nombreux et devront l’être. Nous devons d’ores et déjà tout faire pour rénover les conditions de leur accueil. J’ai donc demandé à la ministre de l’Enseignement supérieur de concevoir un plan d’ensemble avec le concours de Campus France. C’est ce plan qui sera présenté début 2019 », avait-il annoncé et repris en préambule dans le dossier de presse.

Le continent africain n’est pas cité. Pourtant, selon Campus France, par continent, l’Afrique demeure en tête du nombre d’étudiants étrangers inscrits dans des établissements français d’enseignement supérieur en 2017/2018 avec 46 % des étudiants internationaux. Six pays africains sont dans la liste des dix qui envoient le plus d’étudiants en France (Maroc, Algérie, Tunisie, Sénégal, Côte d’Ivoire et Cameroun). L’Afrique est suivie de l’Europe (25 %), l’Océanie (16 %), du continent américain (9 %) et du Moyen-Orient (4 %). Et par nationalité, c’est le Maroc (avec 39.855 étudiants inscrits) qui caracole en première position du classement suivi de l’Algérie qui passe en deuxième position avec 30.521 étudiants, devant la Chine, 3ème avec 30.071 étudiants, tandis que l’Italie gagne une place pour se positionner quatrième avec 13.341 étudiants au détriment de la Tunisie 5ème avec 12.842 étudiants. C’est dire qu’avec cette « stratégie d’attractivité pour les étudiants internationaux » de la France, il est osé de parier qu’il en sera de même, demain, même si le gouvernement français prétend que des mesures d’accompagnement (voir encadré) seront prévus pour ne pas mettre sur la touche les pays traditionnellement pourvoyeurs d’étudiants internationaux en France.

Triplement des bourses offertes : la part belle aux pays du Maghreb et d’Afrique

Le nouveau plan stratégique d’attractivité prévoit de nombreux cas d’exonération (enfant, conjoint ou partenaire d’un résident de longue durée, accords bilatéraux avec le Québec etc.), mais surtout un triplement du nombre de bourses offertes aux étudiants internationaux, avec l’objectif d’accueillir demain des étudiants qui n’ont aujourd’hui pas la capacité de venir faire leurs études en France :

– 15 000 bourses d’études du Gouvernement français (contre 7 000 aujourd’hui), qui seront délivrées par le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Elles concerneront prioritairement les étudiants en provenance du Maghreb et des pays d’Afrique. Ces bourses pourront être, selon les situations, des aides financières ou des bourses d’exonération.

– 6 000 bourses d’université ou d’école, délivrées par les établissements sur la base de critères cohérents avec leur stratégie de partenariat et d’attractivité. Ces bourses pourront être des aides en numéraire ou des bourses d’exonération. En parallèle, les doctorants internationaux pourront bénéficier de programmes spécifiques de soutien permettant de conforter l’attractivité des laboratoires de recherche.

Selon le nouveau plan, au total, un étudiant international sur quatre pourra bénéficier d’une exonération ou d’une bourse.

Simplification de la politique des visas

La délivrance des visas dans les pays d’origine des étudiants sera simplifiée :

– les étudiants seront prioritaires dans le traitement des dossiers de visas par les consulats.

– La mise en place récente du portail numérique France-Visas va permettre d’améliorer l’accès à l’information sur les documents à fournir et une meilleure interface avec l’inscription universitaire.

– La collecte des demandes sera facilitée grâce à l’externalisation auprès de prestataires extérieurs.

La première année, les étudiants étrangers bénéficieront d’un visa de long séjour valant titre de séjour (VLS-TS). Dès mi-2019, la validation du visa pourra avoir lieu de façon dématérialisée, sur une plateforme internet, pour éviter aux étudiants d’avoir à se déplacer à l’OFII.

Un titre de séjour pour revenir en France et chercher du travail

Les étudiants basculeront ensuite sur un titre de séjour étudiant, sous la forme d’une carte de séjour pluriannuelle pour l’ensemble de la durée restante du cycle d’études engagé. Pour faciliter l’obtention de ces titres, des guichets délocalisés seront installés dans les universités, ou encore des guichets dédiés dans les préfectures, sur l’ensemble du territoire national. Enfin, à partir de mars 2019, les étrangers ayant obtenu un diplôme de niveau master en France, et qui étaient retournés dans leur pays d’origine, pourront bénéficier d’un titre de séjour pour revenir en France et chercher du travail. D’après la nouvelle stratégie, « c’est une innovation tout à fait majeure de la loi du 10 septembre 2018 sur l’asile et l’immigration pour favoriser les mobilités circulaires, conformément à l’engagement pris par le Président de la République dans son discours prononcé à Ouagadougou ».

Des mesures en faveur de l’accueil

Le Gouvernement français souhaite engager des mesures fortes, pour faciliter l’accueil des étudiants internationaux, et partant, les encourager à venir étudier en France :

– Faciliter les démarches administratives des étudiants internationaux par la mise en place d’un guichet unique qui rassemblera l’ensemble des services dont ont besoin les étudiants internationaux à leur arrivée.

– Faciliter l’accès au logement : la garantie Visale sera accessible à tous les étudiants internationaux, leur permettant ainsi de bénéficier d’une caution locative gratuite et d’un accès facilité au parc locatif privé.

– Faciliter l’intégration dans la communauté étudiante : chaque étudiant international aura un référent unique au sein de l’université ou de la grande école qui l’accueille. Ce référent sera chargé de l’accompagner dans toutes ses démarches, avant même qu’il n’arrive en France.

La Chine, la Turquie et les Pays du Golfe sur les plates bandes de la France

Avec des stratégies différentes, la Chine, la Turquie et les Pays du Golfe misent sur les zones traditionnelles d’influence française que sont l’Afrique et le Maghreb. Avec des conséquences économiques s’agissant de la Chine (ouverture de nouveaux marchés aux entreprises chinoises dans le cadre de la stratégie globale One Belt One road) et des conséquences culturelles s’agissant des pays du Golfe et de la Turquie. Pour la Chine, 8e au classement des pays d’accueil en 2016, la mobilité étudiante en provenance des pays africains (14% du total des étudiants étrangers) est celle qui bénéficie de la croissance la plus importante. Depuis 2003, le taux de croissance annuel moyen de la mobilité étudiante africaine en Chine est de plus de 35% par an. En lien avec la volonté de faire monter en gamme l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur chinois et d’augmenter la diffusion de sa langue et de son soft power, la stratégie nationale s’appuie sur l’implantation d’Instituts Confucius et sur le financement de bourses d’études dans les pays cibles. En Arabie Saoudite, 80 000 étudiants internationaux étaient inscrits en 2016, soit une croissance de +129% du nombre d’entrants depuis 2011. L’Arabie saoudite double chaque année depuis 2015 le nombre de bourses attribuées aux étudiants africains et propose désormais des formations en anglais au sein d’universités aux infrastructures modernes. En Turquie, la politique d’attractivité est conçue comme un outil d’influence économique et culturelle, et de gestion de son image à l’étranger. Les implantations de centres culturels en Afrique et dans l’aire turcophone, ainsi que les bourses jouent un grand rôle pour l’attractivité d’un pays qui a vu le nombre d’étudiants étrangers progresser de 182% entre 2011 et 2016.

 

 

 
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