Amine Sebti : «Les médias traditionnels devront faire évoluer leur business model»
Les recettes publicitaires des médias traditionnels accusent une baisse importante d’année en année, face à la montée en puissance du digital. Une récente étude du cabinet PwC Maroc prévoit, sur la période 2019-2023, une décroissance de 6% de leurs recettes publicitaires dans la région MENA. Amine Sebti, Senior Manager Strategy& (PwC Maroc) explique comment les médias marocains doivent se réinventer pour survivre.
Challenge : Qu’est-ce qui a poussé PwC à réaliser une telle étude sur l’évolution de la publicité dans les médias traditionnels et ceux en ligne ?
Amine Sebti : Depuis 20 ans, le Global Entertainment and Media Outlook de PwC, présente une analyse détaillée concentrée sur les changements et évolutions dans la publicité et les dépenses de consommation. Cette analyse permet aux entreprises d’adapter leurs stratégies de contenu et de distribution aux progrès technologiques et à l’expérience de l’utilisateur. Nos prévisions pour la période 2019-2023, portent sur les tendances de l’industrie identifiées dans 14 segments à travers 53 pays. Il s’agit de la prévision la plus complète de l’industrie Médias & Loisirs. Cette étude est d’autant plus pertinente qu’elle dévoile une période de renouveau avec l’arrivée de nouveaux players qui viennent disrupter le paysage actuel, essentiellement de la presse écrite et audiovisuelle.
Quels sont les points clés de cette étude à retenir ?
Cette 20ème édition prévoit que l’accès à internet, la publicité digitale, les vidéos en ligne et les jeux vidéo seront les quatre principaux moteurs de croissance du secteur au cours des cinq prochaines années, à l’inverse du segment des journaux et magazines qui devrait afficher une décroissance au niveau mondial sur la même période. Notre étude révèle que la zone Afrique du Nord et Moyen Orient suit la même tendance, avec un secteur des médias traditionnels en perte de terrain, et qui devrait accuser une baisse de revenus de plus de 6 % entre 2018 et 2023.
Le Maroc ne devrait pas être une exception. Avec un taux de pénétration d’internet supérieur à 60% et l’évolution des habitudes et comportements d’une nouvelle classe de consommateurs, la révolution digitale y est également en marche. L’environnement est ainsi propice pour le développement des médias dits «milléniaux».
Les médias traditionnels au Maroc accusent déjà le coup depuis plusieurs années, avec une diminution de leurs recettes publicitaires notamment. Votre étude prédit la poursuite de cette tendance. Les médias traditionnels sont-ils condamnés à disparaître ? Que doivent-ils faire ?
Ma réponse est définitivement non. Les médias traditionnels n’ont pas vocation à disparaître, mais à se transformer pour s’adapter aux habitudes d’une nouvelle génération de consommateurs appelés souvent les digital natives, ce qui n’annonce pas pour autant la disparition du papier. Les médias traditionnels l’ont déjà compris. Ils sont de plus en plus nombreux à proposer des offres éditoriales englobantes diversifiant les canaux de diffusion (sur papier, sur le web et les réseaux sociaux). Mais, il faudra désormais penser hors des sentiers battus. Leur business model et leurs méthodes de travail devront également évoluer. Les médias traditionnels ne devront plus hésiter à aller à la conquête de nouveaux marchés. Avec une connaissance affutée de ce que recherchent leurs lecteurs, ils pourront développer des partenariats ciblés, notamment avec les nouveaux players régnant sur le paysage des médias digitaux (bloggeurs, influenceurs…).