Amzazi planche sur les examens de fin d’année
La pandémie de Covid-19 a fait subir aux systèmes éducatifs un choc sans précédent dans l’histoire, bouleversant la vie des élèves et des étudiants dans tous les pays. Saaïd Amzazi, ministre de l’éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, revient sur les mesures prises par son département pour accompagner ce changement auquel le système éducatif national s’est trouvé confronté pour la 1ère fois. Il fait le bilan du 1er semestre de cette année scolaire, et explique comment son ministère compte mettre à profit les leçons tirées de cette crise. Face aux questionnements des parents d’élèves concernant les examens de fin d’année, le ministre nous livre la vision de la tutelle sur l’organisation et le déroulement de cette étape cruciale de l’année scolaire.
Challenge : A la rentrée scolaire 2020-2021, vous avez opté pour un modèle pédagogique hybride (présentiel et auto-apprentissage) tout en mettant en place un protocole sanitaire très rigoureux. Pourriez-vous nous faire un bilan du 1er semestre de cette année scolaire, compte tenu de ces choix ?
Saaïd Amzazi : Tout à fait, nous avons laissé le choix aux familles entre ce modèle hybride qui devait nous permettre d’assurer une continuité pédagogique avec un pourcentage important d’activités d’apprentissage en présentiel, soit 50 à 100% du temps scolaire en fonction des effectifs des élèves dans les classes, et un autre modèle totalement en distanciel, qui consiste à assurer l’enseignement à distance via la plateforme TelmidTICE, des cours télévisés, et bien sûr des classes virtuelles chaque fois que les équipements technologiques des familles le permettent. Nous avons aménagé pour cela la possibilité pour les enseignants de superviser les classes virtuelles à partir de l’établissement scolaire, en s’appuyant sur la connectivité et les équipements technologiques qui y sont disponibles.
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Le bilan à mi-parcours de l’année scolaire est plus que satisfaisant, puisque mis à part les établissements qui ont vu apparaître des foyers de contamination de Covid-19 et qui ont été obligés de fermer provisoirement pour une à deux semaines, la majorité des établissements scolaires ont pu s’adapter à ce modèle pédagogique certes peu habituel, mais imposé par le souci majeur de préserver la santé des élèves et du corps pédagogique et administratif.
En ce qui concerne la qualité des apprentissages des élèves, une étude de terrain sur un large échantillon représentatif est actuellement menée par l’Inspection générale des affaires pédagogiques, afin d’évaluer les résultats effectifs du premier semestre de l’année et déterminer les points forts du modèle adopté et de remédier aux points qui nécessitent des améliorations.
Challenge : Quelles sont les mesures prises par le Ministère pour accompagner ce changement auquel le système éducatif national a été confronté pour la 1ère fois de son histoire ?
Elles sont de deux natures : d’abord sanitaires, avec toute l’organisation que cela sous-entend en matière de mise à disposition de produits désinfectants divers, de gestion des flux des personnes au sein des établissements, de réorganisation spatiale et temporelle des classes ainsi que de protocoles de surveillance du respect des mesures sanitaires et de fermeture des établissements en cas d’apparition de foyers épidémiques. Ensuite pédagogiques, avec la mise en place de l’enseignement hybride. Pour ces dernières, nous avons tenu à très tôt communiquer aux familles et à l’opinion publique nationale, soit plusieurs jours avant la rentrée des classes, les choix optimums effectués par le Ministère après concertation avec toutes les parties prenantes et après analyse de l’évolution de la situation épidémiologique nationale. En outre, chaque établissement a été appelé à préparer les emplois du temps des groupes allégés et à mettre au point avec les enseignants les dispositifs de gestion des programmes scolaires, ce qui a nécessité un travail minutieux de spécification des activités à mettre en place nécessairement en présentiel et de celles à déléguer aux élèves sous forme d’activités autonomes, et ceci pour l’ensemble des disciplines scolaires, tous niveaux confondus et dans des temps records.
Ces mesures, comme vous pouvez vous en douter, ont nécessité des moyens matériels et financiers supplémentaires et très conséquents, ainsi qu’une mobilisation inconditionnelle et très soutenue du personnel de l’administration pédagogique et du corps inspectoral sur le terrain, y compris dans les établissements situés dans les endroits les plus reculés.
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Challenge : La pandémie a contraint le Ministère à prendre des décisions et à mettre en place des mesures inédites, comment comptez-vous mettre à profit les leçons tirées de cette crise pour construire cette nouvelle école à laquelle nous aspirons tous ?
Tout d’abord, il faut savoir qu’à la fin de cette année scolaire, nous allons disposer d’une banque très complète de cours numériques qui couvrent tout le curriculum scolaire des douze années, en plus des activités du préscolaire et des cours en langage des signes destinés aux enfants en situation de handicap sous format numérique. Cela représente près de 30.000 séances de cours, d’exercices, de travaux pratiques et d’examens solutionnés enregistrés.
C’est un travail titanesque, qui a été fortement accéléré par la crise pandémique, et qui nécessite certes des améliorations continues, mais qui nous permettra dans le futur de pouvoir à tout moment basculer vers un dispositif «ORSEC-Education» pour assurer la continuité pédagogique chaque fois que le présentiel deviendra impossible.
A cet acquis majeur s’ajoute bien sûr la prise de conscience collective des enseignants et des familles de la nécessité de doter les élèves d’une autonomie et d’une responsabilité renforcées dans la gestion de leurs apprentissages.
Notre objectif est d’œuvrer davantage au développement des classes virtuelles ainsi qu’à l’usage généralisé du numérique grâce à la mise en place d’environnements numériques de travail, notamment en s’appuyant sur les MOOC (Massive Open Online Courses), les exerciseurs, les tests de positionnement ou des examens de validation des acquis. La forte imprégnation à la fois des élèves, du corps professoral et des familles par les technologies du numérique dans l’éducation nous permettra d’accélérer les mutations du système éducatif que nous avons entamées avant la crise du Covid-19, à la lumière des leçons et des acquis liés à cette pandémie.
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Challenge : Des craintes sont exprimées, notamment par les familles concernant les examens de fin d’année : avez-vous actuellement une vision claire quant à la façon avec laquelle seront gérés ces examens ?
En réponse à votre question, je voudrais tout d’abord préciser que par rapport à l’année dernière, la situation est complètement différente cette année, et bien plus favorable :
• L’année scolaire en cours a commencé au moment habituel qui est le début du mois de septembre, avec une opération de soutien scolaire intensif pour combler les lacunes éventuelles résultant de l’arrêt prématuré de la scolarité en présentiel l’année dernière, en raison de la pandémie de COVID 19. Ainsi, tout le mois de septembre a été consacré au rattrapage et au développement des prérequis nécessaires aux élèves pour poursuivre leur scolarité.
• La scolarité durant le premier semestre s’est caractérisée, de manière générale, par un déroulement normal, grâce aux modèles pédagogiques adoptés, lesquels ont permis la poursuite sécurisée des apprentissages malgré les contraintes de la pandémie. Le bilan du premier semestre est positif en ce qui concerne la régularité de la scolarité et la conduite du contrôle continu, puisque 99,59% des élèves de tous les cycles confondus ont reçu leurs bulletins scolaires du premier semestre.
Concernant les examens normalisés des niveaux certificatifs (certificat de fin d’études primaires, certificat de fin de cycle secondaire collégial, examen régional de la première année du cycle du baccalauréat, examen national du baccalauréat), ces derniers seront organisés en tenant compte des données relatives à l’état d’avancement des cours et de l’accomplissement des programmes durant les trois mois restants du semestre en cours, ainsi que de l’évolution de la situation épidémiologique à l’échelle nationale. Dans tous les cas, le Ministère veillera, comme toujours, à assurer l’équité et l’égalité des chances à tous les candidats et les candidates, et à préserver la fiabilité et la crédibilité de nos diplômes nationaux.
Toutefois, en cas de nécessité absolue, nous n’écartons pas l’éventualité de la mise en place de certaines mesures exceptionnelles, telles qu’une prolongation de la période de scolarité pour rattraper les éventuels retards dans l’exécution des programmes prescrits, ou encore la possibilité pour les AREFs (Académie Régionale d’Éducation et de Formation) et les DPs (Directions Provinciales) d’adapter les cadres de référence des examens normalisés en fonction de l’avancement réel des programmes dispensés au niveau régional et provincial (uniquement pour l’examen provincial normalisé de fin de cycle primaire et pour l’examen régional normalisé de fin de cycle collégial), certaines localités ayant été impactées beaucoup plus que d’autres par les fermetures d’établissements liées à l’apparition de foyers épidémiologiques.
Quant aux devoirs de contrôle continu du deuxième semestre des niveaux certificatifs, ils porteront sur les parties du programme qui auront été réalisées de manière effective au niveau local (l’établissement scolaire), et prendront la forme d’épreuves communes au niveau de l’établissement, notamment en ce qui concerne les apprentissages de base pour le primaire et le collège, et pour les matières distinctives des séries et sections du cycle secondaire qualifiant. Ces épreuves seront conformes aux procédures et normes des examens normalisés en vigueur, aussi bien au niveau de leur élaboration qu’au niveau de leur déroulement et de leur correction, afin d’assurer à leurs résultats fiabilité et crédibilité.