Après le constat, que fait-on ? par ( Jamal berraoui )
Lahcen Daoudi, le ministre de l’enseignement supérieur a été enseignant universitaire. Dans une longue interview, accordée à un quotidien casablancais, il sait qu’on s’est trompé sur la vocation de l’université. Il dresse un bilan catastrophique. Il est en charge du secteur et sait de quoi il parle.
Cependant s’il parle de mesures déjà prises, ou à prendre, on ne voit pas un nouveau projet dans ce qu’il dit. De manière objective, cela n’est pas possible, tout simplement parce que réinventer l’université ne peut pas être l’œuvre d’un ministre.
Le constat que Daoudi tire, est fait depuis très longtemps. Mais c’est la première fois que c’est le ministre lui-même qui fait cet aveu d’échec des politiques publiques et c’est à mettre à son crédit. Tous les observateurs dénoncent le gâchis, l’énorme gâchis. On dépense énormément d’argent pour des cursus qui n’apprennent même pas aux étudiants comment apprendre.
Parce qu’il n’est pas dogmatique, Lahcen Daoudi reconnaît que les langues sont un problème, que les étudiants n’en maîtrisent aucune, qu’il faut renforcer le français pour être en adéquation avec la réalité du marché du travail. Nous en sommes là, des licenciés des « masterisés », ne maîtrisent pas la langue censée être celle de l’enseignement qu’ils ont suivi. C’est suffisant pour n’accorder aucune valeur aux diplômes nationaux, ce que font des recruteurs. Les banques, les assurances, les grandes entreprises, ne laissent aucune chance aux diplômes universitaires nationaux. Ils jettent les CV à la poubelle.
1200 Marocains ont intégré les écoles françaises cette année. Les parents désireux d’offrir à leurs enfants les meilleures chances, se saignent à blanc. D’autres choisissent des écoles privées au Maroc, sans garantie de qualité.
Lahcen Daoudi n’a pas évité la question qui fâche. Faut-il défiscaliser les parents qui font un effort financier pour les études de leurs enfants ? L’équité voudrait que cela soit le cas. Sa réponse est limpide, pour le faire, il faut que l’accès à l’université soit payant et c’est politiquement intenable. Il y a 20 ans, feu Nadir Yata, avait écrit un éditorial demandant la fin de la gratuité totale contre l’amélioration de la qualité de l’enseignement. Les bonnes âmes avaient crié au scandale.
Nadir n’est plus là, pour recevoir des demandes d’emploi dans une langue improbable. Il y a vingt ans il dénonçait la baisse du niveau. Je suis sûr que Nadir n’imaginait pas un seul instant, que cela pouvait atteindre ce que l’on voit aujourd’hui. Des thèses « copier-coller » qui permettent l’accès au poste d’enseignant.