Assises de la fiscalité : les cliniques privées portent plainte contre Zouhair Chorfi
La réaction de l’Association nationale des cliniques privées (ANCP) ne s’est pas fait attendre, suite au coup de gueule du secrétaire général du ministère de l’Economie et des Finances, Zouhair Chorfi, en marge des Assises de la fiscalité organisées les 3 et 4 mai à Skhirat. En effet, Redouane Semlali, président de l’ANCP, contacté par nos soins, affirme que l’association a déjà porté plainte contre Zouhair Chorfi pour diffamation.
« Ce qu’a affirmé Zouhair Chorfi est complètement erroné. Il parle du fait que nous sous-déclarons nos revenus à hauteur de 90% au fisc. C’est tout à fait dommage qu’un économiste averti puisse croire qu’un secteur soit capable de cacher 90% de son activité, sans couler. En plus, l’administration fiscale avec laquelle nous avons discuté pendant six mois n’a pu redresser que 1,5% de toute l’activité des cliniques. Donc, le fisc a reconnu 1,5% d’écart », confie Redouane Semlali.
« Il accuse le système de santé privé marocain de corruption. Il confond encaissement au noir et en cash, parce qu’aujourd’hui, le Marocain n’est pas assez bancarisé, et donc quand il n’a pas de chèque, il paie en cash. Et ce cash est bien sûr déclaré, sinon nous coulons. Cette confusion est une aberration économique. Il dit que nous ne prenons pas de chèque alors que, de sources bancaires, 80% de nos encaissements et dépôts bancaires sont des chèques. S’il y a quelqu’un qui refuse les chèques, c’est bien l’administration, et non les cliniques privées. En plus, ce qui est plus grave, c’est qu’il déclare publiquement que l’administration est capable de fermer les yeux sur des fraudes fiscales de 20% », poursuit-il.
« Nous avons saisi la justice parce que nous estimons que c’est de la diffamation. Donc, nous sommes déjà dans les procédures judiciaires. Nous avons aussi saisi les partis politiques marocains, parce que c’est grave qu’un homme d’Etat de la dimension d’un secrétaire général d’un ministère affirme que l’Etat peut renoncer à 20% de ses recettes. Et en plus de tout cela, nous préparons une Assemblée générale qui aura lieu d’ici la fin de la semaine ou le début de la semaine prochaine au plus tard, où nous décideront de la mesure syndicale à prendre. Cela peut aller jusqu’à une grève conséquente », assure Semlali.
Pour rappel, Zouhair Chorfi était intervenu lors d’un panel dans le cadre des Assises de la fiscalité où il a fustigé certaines habitudes des professions libérales. « Il est venu le moment de nous dire les choses avec responsabilité, d’arrêter de dire une chose et de faire son contraire, et surtout de commencer à avoir un peu d’humilité et une dose d’autocritique. Certaines interventions que j’ai entendues m’ont choqué. Tout est social. Je ne veux pas attaquer une profession, mais aujourd’hui, les données sont connues profession par profession. Nous ne sommes pas dans des minorations des valeurs de 10% ou de 20%. Personne n’aime payer l’impôt. Que les gens minorent leur déclaration de revenus de 20%, ce n’est pas grave, mais qu’ils les minorent de 90%, là, j’ai un problème », avait-il déclaré.
« Nous ne sommes pas là aujourd’hui pour seulement dire qu’il faut modifier des textes de loi. Non. Nous sommes là pour changer de posture, changer de comportement. C’est notre attitude, au quotidien, collectivement qui doit changer. Quand je vais dans une clinique et qu’on me dit qu’on n’accepte pas le chèque, mais qu’est-ce que cela veut dire ? Il faut que ça cesse ! La corruption, ça suffit ! Le noir, ça suffit ! Nous voulons construire notre pays ! Ce n’est pas que des individus, c’est aussi le rôle des associations, des ordres. La moralisation de la vie publique n’est pas que l’affaire de l’Etat. A quoi sert un ordre ? A quoi sert une association si elle ne peut pas rappeler à l’ordre ses adhérents en cas de manquement ? Chacun doit faire l’effort nécessaire de balayer devant sa porte », avait-il conclu.