Blog de Jamal Berraoui

Coupure culturelle ( Par Jamal Berraoui )

Il y a réellement une différence entre les gens de l’Oriental, du Nord et ceux de Casablanca. Pour qui habite la grande métropole, c’est un véritable choc. Il suffit d’être un peu observateur, pour s’en rendre compte. Malgré la surpopulation estivale, le trafic est fluide, il n’y a pas de klaxons intempestifs, les piétons ne se bousculent presque jamais, les commerçants sont souriants, agréables malgré l’afflux. Surtout tout le monde respecte la queue. Cela n’a l’air de rien, mais ce respect est le signe du respect de l’autre qui est à la base du vivre ensemble. Casablanca, dans la majorité des espaces est une véritable jungle. Les catégories les plus faibles, les vieux, les enfants, les handicapés ont beaucoup de difficultés à se mouvoir. Le savoir-vivre minimal a disparu de l’espace public.

C’est une étude sociologique à faire, pourquoi est-ce que Casablanca a tous ces défauts ? L’explication par la précarité est fausse. L’activité économique est plus forte à Casablanca et il y a autant de pauvreté dans toutes les villes du Maroc. Par contre le poids de l’exode, la ruralisation galopante paraît plus pertinente comme piste d’explication. Les cités relativement préservées ont pu sauvegarder une âme et intégrer les migrants. Dans ces villes, une véritable activité culturelle, associative se maintient dans des conditions matérielles assez difficiles. L’autre aspect, c’est l’urbanisme. Ces villes ont pu contrôler leur expansion et donc dégager une vue assez esthétique, maîtriser les voiries.

Il reste qu’il y a une vraie différence culturelle. La saleté par exemple est omniprésente à Casablanca, les espaces verts, peu nombreux par ailleurs, ne sont pas respectés. Tout se passe comme si pour les habitants de Casa, ce qui est collectif n’a aucune importance. Il n’est pas rare de voir quelqu’un sortir de chez lui et déposer un sac en plastique plein de détritus, alors que la poubelle municipale est à 30 mètres. L’un de mes amis avance une idée, qui pourrait expliquer bien des choses : il n’y a pas de Casablancais, l’attachement sentimental va à la région d’origine.

On peut esquisser les pistes, mais le constat est indiscutable. L’anarchie qui a présidé à l’expansion de Casablanca a eu son impact sur la vie sociale. Les gens sont souvent agressifs, peu sociables, rarement altruistes. Il n’y a qu’à voir les arrêts de bus à l’heure de pointe pour s’en rendre compte.

C’est la réappropriation de l’urbanisme qui est la solution. Refaire de la ville un cadre pensé et non pas subi doit être la mission principale à la fois des élus et du ministère de la politique de la ville. Cela nécessite beaucoup de moyens humains et matériels, de temps, parce qu’il n’est pas facile de réhabiliter ce qui a été mal fait pendant des décennies, mais aussi et peut être surtout, une véritable volonté politique.

Casablanca, capitale économique du pays, où vivent cinq millions de Marocains, le mérite bien. Driss Benhima avait dit « le choix est entre Calcutta et Barcelone ». Pour le moment, on est plus proche de Calcutta. Heureusement, de petites villes comme Essaouira, Chaouen, Asilah, Médieq etc… offrent une autre image du Marocain.

 
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