Discours du 46ème Anniversaire de la Révolution du Roi Et du Peuple (Rabat, 20 août 1999)
«Louanges à Dieu, que la paix et la bénédiction soient sur le prophète, sa famille et ses compagnons.
Cher peuple,
Dans ce climat de tristesse et de chagrin dont l’impact est toujours aussi profond en nous tous, à la suite de la disparition du père de la nation, notre auguste père Sa Majesté le Roi Hassan II, que dieu l’ait en sa sainte miséricorde, intervient l’anniversaire de la révolution du Roi et du peuple, cette révolution qui a été menée de concert, dans un après combat pour la libération du Maroc et le recouvrement de son indépendance, par notre aïeul Feu Mohammed V, que dieu bénisse sa mémoire.
Il a conduit, sur lui la bénédiction devine, un combat remarquable sur des fronts divers et complémentaires et en premier lieu sur le front politique, combat qui s’est concrétisé par les positions héroïques qu’il a adoptées en affrontant les plus grands défis de cette étape.
Face à ces positions qui ne faisaient que raffermir la ténacité et raviver le courage à chaque fois que la crise s’intensifie, le colonisateur a été acculé à la conspiration contre la légitimité allant jusqu’a sommer le symbole de la nation d’abdiquer ou d’encourir l’exil hors du pays.
Avec une foi inébranlable, il a, que Dieu ait son âme, catégoriquement écarté l’idée de renoncer au trône, action qu’il a assimilée à la trahison de la mission dont il a été investie par son fidèle peuple et a préféré l’exil.
C’est ainsi qu’il a été conduit en compagnie de sa noble famille, en Corse puis à Madagascar du 20 août 1953 au 16 novembre 1955. Sincère et loyal, le peuple marocain a été, tout au long de cette période, imbu de l’esprit du combat sacré mené par Mohammed V, rejetant unanimement ce que le colonisateur a tenté de lui imposer, et optant avec fermeté pour la poursuite de son combat et de ses sacrifices, jusqu’au retour de son Roi qui incarnait toutes les valeurs religieuses et les idéaux de la nation.
La communion qui était si profonde entre la nation et son leader exile, a conforté cette dernière dans sa détermination à faire face aux tentatives du colonisateur de conférer une quelconque légitimité à sa conspiration.
Les marocains avaient la conviction intime que Mohammed V, même dans son lointain exil, avait en fait son trône dans leur coeur.
Cher peuple,
C’est avec cet esprit que la lutte s’est poursuivie jusqu’au retour du Roi héros, auréole de la victoire, apportant la bonne nouvelle de la fin de la période du protectorat et de l’avènement de l’indépendance et de la liberté, pour continuer le combat en vue du raffermissement de cette indépendance.
Si, comme l’a voulu la volonté divine, il a été prématurément rappelé à Dieu, avant de réaliser pour le Maroc ce a quoi il aspirait, le très haut qui a entouré ce pays de sa divine bénédiction, a confié la succession à celui qui allait assumer la mission au mieux, son digne successeur et compagnon de lutte, notre auguste et regretté père, Sa Majesté Hassan II.
Il a scrupuleusement respecté les jalons qui ont été posés par notre vénéré aïeul et en a consolidé les fondements, pour se lancer dans des oeuvres d’édification et d’unification qui ont conféré au Maroc, une position remarquable eu égard à la renaissance générale qu’il a initiée, plaçant le Maroc sur la voie d’un combat continu pour faire face à toutes les crises et à tous les défis, pour trouver des solutions aux divers problèmes, et en premier lieu la question de l’intégrité territoriale qu’il a traitée avec sagesse et pondération, respectant les résolutions des Nations Unies et apportant un soutien total pour la réussite du referendum confirmatif dans nos provinces du sud.
Il a couronné, que Dieu ait son âme, cette position remarquable du Maroc, par sa pensée politique moderne et novatrice, matérialisée par l’institution d’une monarchie constitutionnelle prônant la concertation avec la nation, et l’association de celle-ci à l’exercice des responsabilités à travers des conseils élus, et par le biais d’une décentralisation régionale tout en étant parfaitement conscient des droits et des devoirs des uns et des autres.
Si Sa Majesté Hassan II a été rappelé à Dieu, qu’il l’ait en sa sainte miséricorde, nous Mohammed VI, lui succédons pour être à ton service cher peuple, et au service du Maroc.
Nous demeurerons fidèle à la voie hassanienne, attaché à la Baiea qui nous engage et qui t’engage, Baiea qui s’inscrit en droite ligne de celles qui l’ont précédée durant plus de douze siècles, qui puise sa substance dans le livre saint et la tradition du prophète, et qui est intimement liée à la constitution marocaine qui stipule que le Roi, Amir Al Mouminine, est le représentant suprême de la nation, le symbole de son unité, le garant de la pérennité et de la continuité de l’état, de la sauvegarde de la religion, de la patrie et de l’unité du royaume à l’intérieur de ses frontières authentiques, celui qui veille au respect de la constitution, qui assure la défense des droits et libertés des citoyens et dont la personne est sacrée et inviolable.
Compte tenu de ces lourdes responsabilités que nous impose la mission suprême dont nous sommes investi, de notre attachement aux valeurs sacrées, religieuses et nationales, et de notre souci d’asseoir les institutions sur des fondements solides, nous invitons tout un chacun avec vigueur et fermeté, sans relâchement ni répit, au respect des dispositions de l’état de droit dans le cadre des libertés que garantit la constitution aux individus et aux organisations, des procédures qui régissent L’exercice de ces libertés et la jouissance des divers droits, et dont la violation ou le non respect expose à l’application des lois en vigueur.
Cher peuple,
Le Maroc a réalisé sous le règne prospère hassanien et par la volonté de notre auguste père de précieux acquis dans le domaine des droits, qui se réfèrent aux préceptes islamiques lesquels honorent l’être humain, et qui incitent à l’adhésion à la déclaration universelle des droits de l’Homme et des chartes internationales qui en découlent.
Il a oeuvré, que Dieu bénisse son âme, au raffermissement de ces droits et à l’élargissement de leur champs d’application aussi bien sur le plan organisationnel que sur celui de la mise en place des institutions, ainsi qu’au niveau des textes qui les sauvegardent, des mesures qui ont été prises en leur faveur et bien d’autres actions qu’il serait laborieux d’énumérer. Ce sont la autant d’initiatives qui ont permis au Maroc d’occuper une place de choix dans le concert des pays avancés dans ce domaine.
C’est dans cette optique que nous avons crée une instance d’arbitrage indépendante auprès du conseil consultatif des droits de l’Homme en vue de déterminer l’indemnisation des victimes et ayants droit des déclarés disparus et ceux ayant fait l’objet de détention arbitraire, et avons donné nos instructions pour que cette commission entame ses travaux.
Soucieux d’oeuvrer activement à la préservation de ce précieux acquis et à sa consolidation, et mu par une volonté spontanée et une foi profonde et inébranlable quant à la nécessité de garantir à toutes les catégories de notre peuple, les droits qui leur assurent une vie digne et décente, nous avons accordé notre intérêt, alors que nous étions encore prince héritier, aux questions sociales intéressant l’ensemble des citoyens, civils et militaires, avec une sollicitude particulière envers les catégories démunies ou défavorisées.
La réflexion sur cette réalité, nous amené à nous interroger avec peine et commisération: comment réaliser le développement global alors que notre monde rural se débat dans des problèmes qui contraignent ses habitants à abandonner la terre dont Dieu a fait une source de subsistance pour venir s’installer dans les villes, en l’absence d’une stratégie de développement intégrée, fondée sur l’organisation des activités agricoles et autres, en l’absence de l’intérêt qu’il faut accorder à l’habitat et à l’enseignement, de l’amélioration des équipements de base, de la limitation de l’exode par la mise en place d’un plan tenant compte de la promotion des communes rurales, de la création de nouveaux pôles de développement dans les centres situés autour des villes et de la gestion des aléas tels que la sécheresse et autres?
Comment atteindre le progrès scientifique et être en phase avec le monde évolué, alors que des contingents de nos jeunes, instruits et qualifiés, sont au chômage et trouvent les portes fermées devant eux, les empêchant de gagner leur vie à défaut d’une formation adéquate permettant de mettre en valeur leur vocation et leurs compétences et de leur assurer la maîtrise du savoir dont le prophète -sur lui prière et bénédiction- a recommandé l’utilité et l’ouverture sur la vie active, et en l’absence d’un plan qui appelle pour son application la conjugaison des efforts des entreprises et de l’ensemble des opérateurs économiques?
Comment espérer atteindre le progrès et la prospérité alors que les femmes, qui constituent la moitié de la société, voient leurs intérêts bafoués, sans tenir compte des droits par lesquels notre sainte religion les a mises sur un pied d’égalité avec les hommes, des droits qui correspondent à leur noble mission, leur rendant justice contre toute iniquité ou violence dont elles pourraient être victimes, alors même qu’elles ont atteint un niveau qui leur permet de rivaliser avec les hommes, que ce soit dans le domaine de la science ou de l’emploi?
Comment assurer une égalité des chances pour tous, si les handicapés physiques sont marginalisés et écartés des domaines pour lesquels ils sont formés et préparés, alors que l’islam, la religion de l’entraide et de la solidarité, appelle à prendre soin des faibles, à les aider à s’insérer dans la société pour en devenir des membres actifs et productifs?
Nous ne détenons pas une baguette magique par laquelle nous prétendons résoudre tous ces problèmes et bien d’autres, mais nous sommes fermement déterminés à leur faire face, par la grâce de Dieu et dans les plus brefs délais, avec les moyens dont nous disposons, le potentiel moral dans lequel nous puisons, la mobilisation, la solidarité et le sacrifice nécessaires, la sincérité, le dévouement et la conscience éveillée qui doivent être les nôtres, autant de conditions sans lesquelles la vraie citoyenneté ne peut s’exprimer, le progrès ne peut être réalisé, et la foi même ferait défaut.
A cet égard, et comme nous l’avons promis dans le discours du trône, nous nous pencherons sur le dossier de l’enseignement, à la lumière du projet de la charte élaborée par la commission royale spéciale chargée de l’éducation et de la formation, avec l’intérêt qu’il mérite, de par son importance dans la préparation et la qualification des générations futures.
C’est avec un intérêt aussi soutenu que nous suivrons la politique de notre regretté père, que Dieu l’ait en sa sainte miséricorde, en ce qui concerne la question de notre intégrité territoriale, réitérant notre engagement vis-à-vis des résolutions des Nations Unies, notre soutien à la Minurso et au haut commissariat aux réfugiés, et notre contribution au succès du referendum confirmatif dans nos provinces du sud.
Cher peuple,
Au terme de ce discours que nous t’adressons à l’occasion du quarante sixième anniversaire de la révolution du Roi et du peuple, nous voudrions te réitérer ainsi qu’à nos forces armées royales, à la gendarmerie royale, aux forces auxiliaires, aux forces de la sûreté et aux éléments de la protection civile, l’expression de nos remerciements pour la loyauté et le soutien sincère exprimés lors de la douloureuse épreuve qui nous a affecté ainsi que la nation toute entière du fait de la disparition de notre vénéré père à tous, Sa Majesté Hassan II, que Dieu ait son âme.
Eu égard à notre engagement vis-à-vis du pacte de militantisme que nous a légué notre père et dont il a hérité de notre grand père, que Dieu les ait en sa sainte miséricorde, à notre souci de poursuivre la construction du grandiose édifice qu’ils ont bâti, à notre attachement aux liens solides qui nous unissent, nous célébrons ce glorieux anniversaire national et nous continuerons par la grâce de Dieu, à le célébrer. Il constitue une date mémorable pour toute la nation, qui nous appelle impérativement à l’évocation permanente de la mémoire de tous les résistants, pour nous inspirer du combat qu’ils ont mené avec abnégation et nous remémorer les grands sacrifices qu’ils ont consentis dans les différentes provinces et sur tous les fronts. Un hommage particulier doit être rendu aux ouléma, aux penseurs, aux hommes politiques et à la catégorie des travailleurs et des agriculteurs dont il sied de louer le grand rôle dans la libération du pays, en accordant davantage d’intérêt à leurs familles, en nous inclinant devant les vaillants martyrs parmi eux, et en implorant le très- Haut de les avoir aux côtés de notre père et de notre grand père ‘’ avec ceux que le très – Haut a comblés parmi les prophètes, les apôtres, les martyrs et les saints. quels meilleurs compagnons’’ (coran)
Que la paix, la miséricorde et les bienfaits de Dieu soient sur vous ‘’.