Edito. Le corporatisme contre l’Etat social
Le Maroc a l’ambition de devenir un acteur international à part entière, capable de contribuer à la promotion de la paix dans le monde. Cette ambition est déclinée à plusieurs niveaux, aussi bien dans la diplomatie classique que dans les domaines économique, financier, environnemental, culturel, sportif (…). Ainsi, le Maroc a pu affirmer son leadership régional et mondial dans la transition énergétique. Les récents évènements et rencontres, organisés dans les villes historiques de Marrakech ou Fès, illustrent bien cette réalité. Juste après le Festival du Film à Marrakech, grande réussite, qui a su redonner un nouveau souffle au 7ème art, le Forum mondial des civilisations, organisé le 22 novembre par l’ONU dans la capitale spirituelle du Maroc, a été une nouvelle occasion de réitérer le profond message du Royaume où la diversité humaine est synonyme de richesse immatérielle, premier ingrédient de la paix entre les peuples.
Le rayonnement international du Maroc est indissociable des politiques menées en interne. Si le principe de construction de l’Etat social est un consensus, le mode de construction de cet Etat social doit être tranché dans les règles de la démocratie. La généralisation de la protection sociale, la refonte du système national de santé pour garantir un accès équitable de toutes et de tous à des soins de qualité et la réforme du système d’éducation pour reconstruire une « école de l’égalité des chances », constituent les trois axes fondamentaux de l’Etat social. Leur réalisation effective exige un sacrifice collectif et une rupture avec les attitudes déficitaires en matière de civisme au sens le plus large, y compris la dimension fiscale. Le corporatisme ne doit pas être un obstacle à la construction d’un « vivre ensemble », fondé sur la solidarité active. L’intérêt général devrait l’emporter sur les intérêts particuliers, sans pour autant étouffer les voix minoritaires.
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Depuis au moins deux décennies, la lutte contre la pauvreté a abouti à de faibles résultats, car non basée sur des politiques stratégiques et cohérentes visant des transformations structurelles. La pauvreté qui n’est pas une fatalité, est générée et entretenue par des inégalités structurelles. Le principal défi actuel est de contribuer à une évolution favorable à des ruptures nécessaires pour réaliser des changements structurels. Après le « temps des charlatans », du brouillard et des désillusions de la décennie 2011-2021, voici le temps du « pragmatisme pur et dur » dont les limites devraient favoriser la voie à une réhabilitation des idéaux de départ, ceux exprimés à l’aube de l’indépendance, perçus à tort comme subversifs mais constamment défendus par les « générations sacrifiées ». Cette profonde réconciliation interne est toujours d’actualité. Elle est possible. C’est la force première du Maroc solidaire, celui de l’espoir, bien ancré dans l’histoire des luttes sociales et des sacrifices.