Emancipation des femmes et pesanteurs sociales
La dernière enquête de l’Economiste-Sunergia sur le droit des femmes à l’égalité dans l’héritage et le droit d’accès au travail, tombe à point nommé, après le dernier discours du Trône. Les résultats de cette enquête reflètent les profonds obstacles culturels au changement sociétal.
63% des personnes sondées sont contre l’égalité des hommes et des femmes dans l’héritage. 29% y sont favorables. Quatre ans avant, en 2018, la part des réponses négatives était de 69%. Ainsi, en quatre ans, la progression est toute relative, avec une croissance annuelle moyenne de 1,25%. Il faudra attendre longtemps, à supposer que cette tendance soit continue et irréversible. Or ce sont 65% des femmes elles-mêmes qui s’y opposent majoritairement !
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L’expression « la femme, gardienne des traditions » est donc confirmée. Son rôle ne se limite pas à la reproduction biologique, mais aussi à la transmission des valeurs et coutumes culturelles, morales… Certes, dans le dernier sondage, les hommes opposés représentent 74%. Mais plus grave, ce sont les jeunes dans la tranches d’âge de 25-34 ans qui s’y opposent le plus, avec 77% contre, et 20% pour. En 2ème position, viennent les séniors âgés de plus de 65 ans, avec 74% contre. La tranche d’âge la plus favorable à l’égalité, en matière d’héritage hommes-femmes, est celle des personnes âgées de 55 à 64 ans, avec 36% pour et 56% contre. Jeunes et vieux se rejoignent en matière de conservatisme.
Les tranches d’âge intermédiaires représentent les générations ayant vécu à une époque d’ouverture où la gauche était au diapason dans la vie politique. La crise socio-économique, l’aggravation du taux de chômage et le taux de réussite croissant des femmes dans les études sont des facteurs à explorer. Qui dit héritage, dit propriété et donc classes sociales. Ce sont les catégories socio-professionnelles A et B, donc les plus aisées, qui sont le plus pour l’égalité, en matière d’héritage, avec un taux de 34%. La catégorie intermédiaire C se prononce pour l’égalité, avec un taux de 20%. 73% s’y opposent. Enfin, les catégories D et E sont pour avec 26%. 67% s’y opposent. Plus on est pauvre et jeune ou vieux, et plus on s’y oppose.
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Face au travail, les personnes sondées apparaissent plus réalistes, puisque 66% des personnes sondées sont pour le travail des femmes, au même titre que les hommes. Parmi ces personnes sondées, 81% des femmes sont favorables au travail des femmes. Mais 41% des hommes s’y opposent, rejoints par 16% des femmes dans cette attitude. La tranche d’âge des personnes sondées, âgées de 55 à 64 ans est la plus favorable à l’accès des femmes au travail, avec 82%. Cette tranche est hostile à l’égalité en matière d’héritage, tout en étant favorable à l’accès au travail par les femmes ! Et la tranche d’âge âgée de 35 à 44 ans est la moins favorable aux femmes, en matière d’accès au travail, avec 58% pour et 37% contre, suivie de la tranche d’âge de 25 à 34 ans, avec 62% pour. C’est un paradoxe qui mérite d’être creusé sociologiquement. Etre favorable au travail des femmes, et donc à la création des richesses, mais ne pas l’être face à la propriété qui est souvent le fruit du travail. C’est tout simplement une inégalité sociale aggravée.