Emploi : Les multinationales supplantent les champions nationaux
Les champions de l’emploi au Maroc (soit ceux qui comptent plus de 10.000 collaborateurs au sein d’activités marchandes homogènes) sont, désormais, limités à une douzaine d’acteurs économiques. Combien pèsent-ils ? Qui sont-ils et quel est leur marché ? Et surtout comment sont-ils devenus ces méga-employeurs que toute politique économique serait bien avisée d’en favoriser l’éclosion et surtout le maintien au sein de nos territoires ? La radioscopie de ces mastodontes, pour certains assez méconnus du grand public, a de quoi surprendre !
Depuis la mise en place en 1983 du fameux plan d’ajustement structurel (PAS), dont le coût social a été des plus désastreux, la problématique de l’emploi et de lutte contre le chômage a toujours été le talon d’Achille de toutes les politiques économiques mises en place, avec à chaque fois un bilan peu reluisant à ce niveau. L’économie marocaine ne créé pas suffisamment d’emplois, même quand la croissance économique est plus qu’honorable (c’est à dire peu ou prou quand le PIB agricole affiche une croissance à deux chiffres !). Une donne que pointent malheureusement du doigt toutes les instances et agences internationales à chaque fois qu’elles font le diagnostic de notre pays et qu’elles livrent leurs conclusions quant aux handicaps qui l’empêchent encore de sortir de la trappe des « pays à revenus intermédiaires » à l’instar de la Banque Afrique du Développement (BAD) qui a enfoncé le clou l’année dernière dans un rapport Perspectives économiques en Afrique en 2018. La banque panafricaine basée à Abidjan, y affirme qu’en matière d’élasticité de l’emploi par rapport au PIB (indicateur qui mesure le rapport entre le taux de croissance de l’emploi et le taux de croissance du PIB), le Maroc avec son indice médiocre de 0,3 (calculé sur une période allant de 2000 à 2014), fait pire que bon nombre d’économies africaines, pourtant moins loties que lui sur pas mal de registre, tels l’Egypte (0,55), la Côte d’Ivoire et le Cameroun (0,9) ou encore le Liberia (1,25).
Aussi, le nouveau modèle de développement économique et social auquel tout le monde appelle de ses vœux depuis la sortie du Roi Mohammed VI en 2017 où il avait appelé à une « réévaluation du modèle de développement national et à l’élaboration d’une nouvelle approche », se doit en priorité d’apporter des réponses simples et efficaces à cette question épineuse et persistance de l’emploi.
Et si pour l’instant, ce nouveau modèle tarde à sortir des athanors politiques et autres alambics des cercles bien-pensants du Royaume, il ne fait aucun doute que la feuille de route en faveur de la promotion de l’emploi que le gouvernement a promis pour fin 2018 (et qui sera vraisemblablement dévoilée lors des prochaines Assises Nationales de l’Emploi prévues au cours du deuxième semestre de l’année en cours), fera la part belle à la PME et à la TPE (grand leitmotiv actuel) en mettant l’accent sur les mesures d’encouragement à l’auto-emploi et les incitations au recrutement chez la PME (par exemple en rendant le programme Tahfiz encore plus attrayant). Une telle démarche serait des plus logiques au vu de la forte prépondérance des très petites, petites et moyennes entreprises (TPME) dans le tissu entrepreneurial marocain (estimée à près de 95%) et bien que celles-ci contribuent à peine à 20% du PIB du pays, ce qui en fait un rôle moteur dans la création d’emplois. L’OIT (Organisation Internationale de Travail) ne dit pas autre chose dans son rapport sur l’«Emploi et questions sociales dans le monde 2017: entreprises et emplois durables» où elle démontre que la PME est responsable de 52% de l’emploi total créé dans les pays en développement (contre « à peine » 34% dans les économies émergentes et 41% dans les économies développées). Soit ! Mais qu’en est-il de l’autre moitié des entreprises pourvoyeuses d’emplois tout aussi pérennes (sinon bien davantage) ?
Il s’agit bien évidemment de la grande voire la très grande entreprise, une catégorie certes moins fragile que la PME et qui, de facto, a moins besoin des yeux de Chimène d’un Etat bienveillant (entre aides ciblées et mesures incitatives de toutes sortes). Mais ces agents assumés de la mondialisation tous azimuts ne requièrent pas moins un environnement réglementaire et économique et un cadre fiscal des plus opportuns pour jouer individuellement un rôle de champion de l’emploi qu’eux seuls sont à même d’incarner.
D’ailleurs, il est avéré aujourd’hui que si le Maroc affiche des résultats louables dans ces « nouveaux métiers mondiaux » c’est surtout grâce à sa capacité d’attirer des mastodontes internationaux qui ont consolidé petit à petit leur présence dans le pays, en créant autour d’eux des clusters formés aussi bien d’entreprises locales (notamment de PME) que de PME et ETI (Etablissement de Taille Intermédiaire) européennes, voire africaines en cours d’internationalisation. Une montée en puissance qui s’est traduite par des recrutements massifs au point où certains de ces acteurs se sont propulsés, assez discrètement cela soit dit en passant, en quelques années parmi le top 15 des premiers employeurs du pays.
Mais qui sont ces super-employeurs qui revendiquent un effectif de plus de 10.000 employés directs au Maroc (soit l’équivalent de quelques milliers de TPME en moyenne !) ? Bénéficient-ils d’avantages fiscaux et/aides spécifiques ? De quels secteurs sont-ils majoritairement issus ? S’agit-il de champions nationaux à capitaux marocains ? Ou plutôt de filiales de groupes internationaux ayant érigé le Maroc en plateforme importante de leur dispositif mondial ? Et pour quels motifs ? Les différents plans de développement économique mis en place successivement depuis 15 ans (Plan Emergence, Pacte National pour l’Emergence Industrielle, Plan d’Accélération Industrielle…) y sont-ils pour quelque chose ? La digitalisation galopante de l’économie ne vient-elle pas menacer les emplois créés par ces mastodontes ?
Avant de s’atteler à répondre à ces questions, il est de bon aloi de rappeler que les grandes entreprises sont toujours plébiscitées au Maroc par les primo-accédants à l’emploi les plus qualifiés. Une récente étude menée en fin 2018 par l’EmLyon Casablanca, sur les attentes des jeunes diplômés marocains vis-à-vis du marché du travail, nous apprend qu’une tranche de 41% de cette population rêve de travailler pour des entreprises multinationales basées au Maroc, alors que 38% préféreraient entamer leur carrière dans des entreprises marocaines de grande taille. Ce qui limite à un petit cinquième, la part des jeunes diplômés ayant plutôt une préférence pour la PME et le secteur public.
De prime abord, il faut rappeler que l’absence de données précises et de statistiques exhaustives quant à l’évolution et la structure des effectifs chez les gros employeurs, rend la tâche de leur recensement et encore davantage de l’analyse de leur trajectoire assez ardue et ce, d’autant plus que certaines firmes multinationales opèrent parfois au Maroc à travers plusieurs filiales et de surcroit ne relevant pas toujours, dans leurs organisations respectives, de la même business-unit au niveau mondial. Et ce n’est malheureusement pas du côté du très discret (trop même !) Observatoire National du Marché du Travail-ONMT (qui n’a rien à voir avec son homonyme beaucoup plus disert en charge de la promotion du tourisme marocain à l’étranger) dont on ne connait aucun fait d’armes notoire depuis sa création il y a plus de cinq ans et qui ne dispose même pas de site web, qu’on pourra espérer grand-chose ! Qu’à cela ne tienne, la rédaction a pu assembler différents éléments du puzzle pour établir, à défaut d’un classement exhaustif et de données d’une précision de métronome, sinon un panorama assez large pouvant servir de base suffisamment fiable à une analyse fine et transverse et qui couvre des entreprises ou des groupes d’entreprises opérant dans des secteurs homogènes (automobile, aéronautique, textile, mines, etc.). Ce qui laisse volontairement en dehors du champ de l’analyse les conglomérats et les groupes multi-métiers qui opèrent dans des branches d’activités totalement différentes et, partant, présentent des dynamiques à l’emploi aux logiques assez différenciées. Une exclusion qui finalement, n’écarte pas grand monde, car hormis Al Mada qui emploie allègrement plus de 30.000 salariés, les autres ténors du capitalisme marocain ayant un profil de conglomérat diversifié (AKWA Group, Financecom, Holmarcom, Saham ou encore le groupe public CDG…) ne comptent pas encore plus de 10.000 collaborateurs toutes activités confondues (bien que certains s’en approchent à grands pas).
Ces précisions étant faites, il ressort en première lecture que les champions de l’emploi ne sont pas légion au Maroc contrairement à ce que l’on pourrait croire pour un pays qui aspire dans sa stratégie industrielle actuelle à capter une partie des emplois de première transformation que la Chine aurait commencé à perdre dans le sillage de sa montée en gamme ! Tout au plus, on en dénombre une douzaine d’acteurs dont cinq groupes maroco-marocains et sept filiales de firmes multinationales, mais à eux seuls ces mastodontes pèsent près de 180.000 emplois, soit presque autant que le total des emplois nets créés par toute l’économie marocaine en cumulé en 2017 et 2018. En termes de répartition sectorielle, et quand bien même le textile n’y compte plus aucun représentant (alors qu’il fut jadis la première source d’emplois industriels avec quelques fleurons de l’emploi), l’industrie trône toujours en tête de peloton (aussi bien en nombre d’acteurs qu’en volume cumulé d’emplois) grâce notamment à l’Automobile qui place dans cette hiérarchie six poids lourds (cinq équipementiers et un constructeur) et dans une moindre mesure au secteur Mines/Chimie et plus particulièrement à l’OCP. Ce dernier maintient, par ailleurs, son statut historique de premier employeur du pays avec 27.000 employés tout en étant, désormais, talonné de près par l’américain Delphi et l’italo-nippon Sumitomo Sews qui viennent de le rejoindre récemment au sein du club très fermé de ceux qui emploient plus de 20.000 collaborateurs au Maroc. Du côté des services, on en dénombre aussi bien deux institutionnels financiers de premier plan, à savoir les deux premiers groupes bancaires marocains, Attijariwafa bank et BCP (Banque Centrale Populaire), qu’une filiale d’un groupe européen, en l’occurrence Webhelp, qui opère dans les métiers de l’off-shoring et particulièrement le call center et qui est devenue en quelques années seulement, le premier employeur privé de Rabat avant de diversifier les bassins d’emplois et d’arriver à un total de 17 sites différents répartis entre Fès, Meknès, Kénitra, Agadir et Casablanca ou encore le Groupe Marjane, leader de la distribution moderne au Maroc (alimentaire avec les enseignes Marjane et Acima et électronique & électroménager avec Electroplanet) qui emploie plus de 10.000 salariés dans sa centaine de points de vente. Aussi, à eux deux, les deux «métiers mondiaux» du Maroc, l’Automobile et l’Off-shoring, accaparent plus de la moitié des 180.000 emplois globalement créés par ces champions de l’emploi. C’est dire que le Plan Emergence et ses différentes versions améliorées, n’ont pas totalement démérité quoi qu’en disent certaines voix par trop critiques. Quant au secteur du BTP qui représente tout de même 10% des emplois au Maroc (pour 7% du PIB) en comptant en son sein quelques champions nationaux qui rayonnent en dehors de nos frontières, il n’est pas du reste avec un représentant. Il s’agit du leader incontesté, le groupe SGTM (et le seul groupe familial de ce classement) qui emploie un peu plus que 10.000 salariés (dont certes une bonne partie d’intérimaires).
L’autre constat à la lecture de cette «nouvelle» hiérarchie des champions de l’emploi est sa très faible corrélation avec celle des poids lourds économiques du pays. En effet, seuls trois colosses parmi les cinquante entreprises les plus importantes en termes chiffre d’affaires font également partie des 12 méga-employeurs identifiés (en l’occurrence l’OCP, Renault et l’américain Lear). Cela s’explique aussi bien par la faible création d’emplois de certaines activités fortement capitalistiques telle celle de l’énergie (dont les représentants trustent la moitié du top 10 des plus grandes firmes marocaines) que par les changements technologiques qui ont façonné d’autres secteurs en leur imprimant une inflexion non négligeable de leur business model notamment pour ce qui est de l’utilisation des facteurs de production dont le capital humain (voir ci-après) Enfin, les établissements publics ne sont plus majoritaires dans un tel classement comme cela fut le cas deux ou trois décennies auparavant, à telle enseigne qu’à peine deux rescapés (certes non des moindres) y figurent encore, en l’occurrence l’OCP et la BCP, ce qui n’est pas pour déplaire aux tenants sous nos cieux d’un état minimum limité à ses missions régaliennes et son rôle de régulateur et stratège.
Quant à savoir si ces employeurs de masse ont-ils bénéficié ou pas d’avantages spécifiques ayant pu favoriser leur «boulimie» pour l’emploi, il est à préciser que seuls de méga-investisseurs comme Renault ou encore plus récemment son confrère français PSA (lequel lui n’est encore à peine «qu’à» près de 2.000 salariés), dont l’arrivée au Maroc a été déterminante pour l’émergence d’un véritable cluster automobile de dimension mondiale, ont pu obtenir des concessions importantes par l’Etat marocain, comme par exemple pour le deuxième constructeur européen un foncier offert gracieusement, le partage des investissements à travers la CDG qui a pris une participation de 47,6% dans Renault Tanger Méditerranée (la structure qui détient l’usine de Melloussa) et un taux d’IS nul pendant 5 ans puis réduit à 8,75% pendant 20 ans. Aussi, peut-on dire qu’il n’y a pas de dispositif incitatif spécifique pour les grands employeurs. Mais il est vrai par ailleurs, que certaines aides et subventions mises en place par le gouvernement, à l’instar de celles prévues par le Fonds de Promotion des Investissements (e.g. prise en charge par l’Etat de l’infrastructure hors site et même d’une partie de l’effort lié à l’acquisition du foncier) requièrent, entre autres critères d’éligibilité chez l’investisseur, de disposer d’un programme d’investissement d’au moins 200 millions de dirhams sur trois ans. Ce qui, de facto, limite ce genre d’avantages aux entreprises d’une certaine taille dont font partie naturellement les mastodontes objet de cette étude.
Par ailleurs, l’analyse de la dynamique des recrutements chez les sept filiales de groupes internationaux précitées démontre que, pour leur majorité, elles n’ont point choisi du jour au lendemain d’ériger le Maroc en base importante de leur présence mondiale en y recrutant en si peu de temps plusieurs milliers de salariés. Bien au contraire, la consolidation de leurs activités s’y est faite généralement par vagues de décisions successives ayant conduit ces opérateurs de dimension mondiale à y renforcer progressivement leurs effectifs, voire à y régionaliser leur présence (à l’exception de Renault dont l’essentiel des effectifs est concentré sur son site de Tanger Med) et ce, comme en témoignent les parcours par exemple de l’américain Delphi (filiale du conglomérat Aptiv) ou encore du japonais Yazaki, dont l’implantation initiale au Maroc remonte à 1999/2000 (soit bien avant que le pays ne se fasse une place au soleil dans l’échiquier mondial de l’industrie automobile). Leur développement s’est fait très graduellement avec une accélération à partir de 2010, qui s’est traduite par l’ouverture de nouveaux sites de production en dehors de leur base historique tangéroise, notamment en jetant leur dévolu sur Kénitra (devenue un pôle automobile à part entière depuis l’annonce de l’implantation de PSA à Atlantic Free Zone) ou encore Meknès (ville très bien connectée aux principaux ports du pays et qui connait moins de pression sur le coût de la main d’œuvre). En 2017, le spécialiste nippon des systèmes de distribution d’électricité et de composants électroniques intégrés, a même transféré une partie de son business en Tunisie (fortement secoué par des troubles sociaux) vers la ville du Detroit qui concentre encore plus de la moitié de ses effectifs marocains. Cela vient confirmer, s’il en est besoin, que ni les carottes fiscales ni même le niveau bon marché de la main d’œuvre ne sont pour grand-chose dans la montée en puissance au Maroc de ces super-employeurs. Une telle trajectoire épouse davantage des situations émaillées par ce que les économistes appellent la construction d’« avantages auto-consolidants » où l’accroissement des qualifications, le développement des industries sous-traitantes et des fournisseurs à proximité vient auto-consolider l’avantage comparatif initial (proximité géographique, main d’œuvre disponible et bon marché..). Il faut dire que l’arrivée de Renault à Tanger-Melloussa avec une usine de taille mondiale, suivie quelques années par PSA à Kénitra, a vraisemblablement intimé bon nombre d’équipementiers d’accélérer leurs investissements au Maroc, voire à y poser leur baluchon pour ceux qui ne l’avaient pas encore fait. L’autre attrait déterminant et qui a été construit dans la durée, c’est la création d’une offre suffisante en ressources qualifiées de techniciens et en moindre mesure d’ingénieurs, notamment grâce aux efforts déployés par l’Etat en matière de formation avec la mise en place de l’Institut de Formation aux Métiers de l’Industrie Automobile (qui dispose de trois sites à travers le pays avec une capacité de formation de plusieurs milliers de techniciens par an), même si la production d’ingénieurs peine encore à se hisser au diapason des ambitions de l’industrie marocaine. Cela a vraisemblablement convaincu ces investisseurs à franchir le pas sans craindre d’être pénalisés dans leur développement par la pénurie du capital humain.
Enfin, pour ce qui est de la digitalisation de l’économie que tout le monde appelle de ses vœux, l’exemple de Maroc Telecom est là pour prouver que ce nouveau virage n’est pas toujours une panacée pour l’emploi. La filiale à 53% du géant émirati Etisalat qui fut encore, jusqu’en 2012, un des premiers employeurs privés du Royaume, a vu depuis ses effectifs fondre comme neige au soleil parallèlement aux évolutions technologiques que connaît le secteur des télécoms avec comme toile de fond une digitalisation galopante de plusieurs maillons de la chaine de création de valeur, à commencer par l’automatisation des processus métiers, la digitalisation et la modernisation des systèmes d’information et l’amélioration de l’expérience client à travers le multicanal. Aujourd’hui, le leader marocain des télécoms ne compte plus que moins de 8.000 collaborateurs au Maroc. Il s’agit là donc d’une tendance lourde qui va certainement reconfigurer la structure et les besoins en emplois de plusieurs secteurs économiques (à des échelles différentes bien sûr) avec laquelle il faudra composer. Et si certains emplois faiblement qualifiés risquent en effet d’être menacés avec la vague digitale, celle-ci sera également génératrice d’opportunités d’emplois nouveaux, notamment pour les Millenials qui sont des «digital natives». D’où toute la pertinence du projet gouvernemental de formation de 700.000 jeunes marocains dans les domaines des nouvelles technologies et de l’information. Une digitalisation bien négociée, notamment au niveau de l’administration et des services publics, à quoi aspire le Plan Digital 2020, ne manquera pas donc d’améliorer l’environnement des affaires et, par ricochet, l’attractivité de la destination Maroc auprès des investisseurs étrangers.
Au demeurant, la radioscopie des champions de l’emploi au Maroc démontre que les cartes ont été significativement rebattues au cours des deux dernières décennies, grâce principalement à la politique industrielle volontariste du pays qui a eu le mérite de favoriser l’émergence de nouveaux super-employeurs étrangers (ce qui n’a jamais été à l’actif des politiques économiques antérieures)….certes un peu trop concentré sur l’Automobile qui ne peut, de toute évidence, assurer l’intégration professionnelle aux 300 000 jeunes en âge de travailler qui se présentent chaque année sur le marché du travail. L’aéronautique ou le Textile sont par exemple les grands absents dans cette hiérarchie, alors que leurs poids respectifs dans l’industrie et l’export sont importants. De même qu’on pourrait légitimement déplorer qu’hormis le secteur financier, la politique des champions nationaux sectoriels ne se soit pas traduite jusqu’à présent par l’émergence de champions nationaux de l’emploi. Pour ce faire, il aurait fallu que ces géants locaux soient plutôt orientés vers l’export vu la taille du marché marocain, assez limitée somme toute. Certes, quelques-uns cheminent sereinement sur un tel creuset tels Intelcia et Azura Group (Voir encadré), mais on est encore loin de ce que certaines nouvelles puissances économiques ont pu réaliser en la matière telle la Turquie où l’Etat a fortement encouragé les conglomérats locaux à partir à la conquête du monde et devenir, ce faisant, des géants économiques et des méga-employeurs. Gageons que cela sera parmi les objectifs de la future stratégie industrielle qui viendra succéder à l’actuel PAI (Plan d’Accélération Industrielle)…dont il sera bientôt l’heure du bilan.