Faux débat par ( Jamal Berraoui )
Cette fois, c’est par le biais de la fiscalité que l’alcool fait une intrusion dans la vie politique. L’opposition a présenté un amendement pour surtaxer les alcools de luxe, whisky champagne et compagnie, tout en préservant les vins, le gros rouge qui tâche et les bières. Le gouvernement l’a refusé.
Les commentaires sont très variés. Il y a bien sûr, ceux qui reprochent aux Islamistes de ne pas, purement et simplement, interdire la vente d’alcool, mais, le plus amusant c’est la référence à la lutte des classes. L’opposition défendrait les pauvres, le gouvernement préserverait les riches.
Trêve de plaisanteries. Pour différentes raisons, il faut surtaxer l’alcool :
– Ce n’est pas un produit de première nécessité même pour les alcooliques, à condition qu’ils soient correctement pris en charge.
– Les caisses de l’Etat ont besoin de rentrées d’argent
– Les importations de spiritueux et de vins français occasionnent des sorties de devises importantes, alors que nos réserves de change fondent.
A l’inverse, l’argument du gouvernement peut être entendu. En effet, à partir d’un certain niveau de prix, c’est une incitation à la contrebande. Mais, il existe des moyens légaux pour la combattre et on n’est pas sûr qu’ils soient mis en œuvre de manière sérieuse.
Il faut arrêter d’introduire la religion ou la morale dans ce débat. A moins de changer la nature du régime, de la société, l’alcool ne sera jamais interdit au Maroc. Cela constituerait une perte de dizaines de milliers d’emplois, la faillite de très petites entreprises et installera la contrebande qui sera alors aux mains de mafias et non pas une contrebande vivrière.
La fiscalité de l’alcool et des cigarettes se veut aussi dissuasive. Les expériences ne sont pas réellement probantes. En France par exemple, le nombre de fumeurs a augmenté et ce sont les buralistes des pays frontaliers qui en profitent. Le chiffre d’affaires de la bière au Maroc est en croissance, malgré des hausses successives.
Par contre, la prévention au Maroc reste le parent pauvre. Il y a un grand effort à faire en particulier vers les jeunes. Cela bute sur le mythe du pays musulman. On ne peut pas conseiller aux gens de boire modérément alors que c’est illicite.
J’aurai préféré que l’opposition chiffre sa proposition et que le gouvernement expose une courbe de la tolérance à la hausse. Même si, au pif, je ne crois pas que les consommateurs d’alcools forts s’adressent massivement à la contrebande.
La situation budgétaire impose à l’exécutif de chercher l’argent dans toutes les niches. Il me paraît normal que les consommateurs d’alcool trinquent en premier.