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Financement : Les PME à la merci des banques

La crise économique mondiale a accentué les difficultés des petites entreprises marocaines. Elle a aussi fait ressortir le déséquilibre des forces dans la relation qui les lie à leurs banques.

Dure dure, la vie d’une petite entreprise ! Même si tout le monde s’accorde sur l’importance du tissu des PME dans une économie, les difficultés que celles-ci rencontrent avec les banques, surtout en période de crise, sont bien réelles. « Du jour au lendemain, les banques peuvent toutes resserrer leurs conditions à notre égard. Elles se transforment en un simple coffre pour déposer de l’argent. Or, on attend plutôt d’elles qu’elles accompagnent nos besoins en termes de liquidités et de financement», témoigne un chef d’entreprise dans le secteur de la construction. De plus, elles demandent des garanties souvent jugées draconiennes par les petits entrepreneurs: «En apportant en caution un bien personnel de 4 MDH, mon entreprise ne s’est vu accorder que 600.000 DH de prêt».
Des problèmes bien plus importants
Les problèmes rencontrés par les PME avec leurs banques sont loin de se limiter aux cautions. Mohamed Azzedine Berrada, ancien DG du GPBM, y a consacré tout un livre : «Le casse-tête des erreurs bancaires sur les intérêts et commissions». Pour lui, «la PME est la grande oubliée du projet de la nouvelle loi bancaire». Dans son ouvrage, il développe tout un ensemble de pratiques bancaires, à la limite de la légalité, et qui peuvent causer beaucoup de tort aux entreprises. Le fait de raccourcir l’année bancaire à 360 jours au lieu de 365 ou 366 jours permet de gonfler indûment les taux d’intérêts. Des erreurs sur les dates de valeurs permettent aussi à la banque de facturer plus d’intérêts que de droit.
L’ancien responsable a aussi mis en exergue les problèmes qu’une entreprise peut rencontrer lors du changement du directeur de son agence bancaire. Dans ce cas, les PME peuvent faire l’objet d’une rupture subite de leur ligne de crédit que représente leur facilité de caisse, ainsi que d’autres avantages. Mais pour l’avocate Maria Bahnini, « c’est surtout le cas lorsqu’il s’agit d’arrangements officieux. Lorsqu’un contrat est établi en bonne et due forme, il engage l’agence et le changement de son directeur ne devrait pas impacter l’entreprise ».
Mohamed Azzeddine Berrada attire aussi l’attention sur les contrats bancaires «qui peuvent être abusifs dans certains cas et qu’il faudrait apurer».Cela concerne notamment le taux des pénalités de retard, qui peut, in fine, largement dépasser les 2% prévus par Bank Al Maghrib. Mais les problèmes peuvent aussi être d’un tout autre ordre.« Lorsque j’ai voulu changer de banque, il m’a été impossible d’obtenir les papiers nécessaires. La banque a eu un comportement agressif. J’ai dû avoir recours à Bank Al Maghrib pour pouvoir transférer les comptes et les prêts de mon entreprise chez une autre banque », assure notre chef d’entreprise.

Des recours sont possibles, mais…
En cas de litige, l’entreprise peut tenter un recours gracieux au niveau de la banque. Il reste toujours la solution judiciaire, mais « c’est la meilleure façon de ne pas résoudre le problème », selon Maria Bahnini, avocate. Un recours en justice prend en effet du temps. « Et même quand des jugements sont prononcés, ils ne sont souvent pas exécutés », s’insurge-t-elle. Pour elle, « les PME doivent faire l’objet d’une discrimination positive tant sur le plan du financement, que du règlement de leurs factures par l’Etat ».

PAR Karim touach

 
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