Agro-Industrie

Huile de table. Les prix ne vont pas baisser malgré la suspension des droits de douane 

Dans le contexte actuel de hausse continue des cours des matières premières l’impact de la suspension des droits de douane, demeure minime. C’est ce qu’indique l’Association Professionnelle des Fabricants d’Huile au Maroc (APFHM) qui annonce avoir proposé un plan d’action au gouvernement pour protéger le Maroc contre la flambée des prix à l’international. Les détails.

En suspendant les droits d’importation applicables aux graines oléagineuses et les huiles brutes de tournesol, soja et de colza, le 3 juin dernier, le gouvernement espérait atténuer l’impact de la hausse des cours des matières premières sur le prix de vente des huiles de table aux consommateurs mais l’effet d’une telle mesure est « minime », selon l’Association Professionnelle des Fabricants d’Huile au Maroc.

Pour les fabricants d’huile, cette décision de suspension des droits d’importation n’offre pratiquement qu’un seul avantage : elle « permettra d’harmoniser les droits de douane des différentes origines, mais surtout à terme rendra le marché à l’import plus compétitif ».

En effet, selon l’Association, 80% des importations du Maroc en huiles brutes et graines oléagineuses, sont déjà assujetties à 0% de droits de douane, en provenance des pays signataires des accords bilatéraux comme l’Europe et les Etats Unis.  « Le reste des importations (20%), proviennent essentiellement des pays comme l’Argentine ou l’Ukraine avec des droits de douane de 2,5% », a justifié les producteurs d’huile de table dans un communiqué. « Soit le gouvernement n’a pas bien mesuré l’impact de sa décision de suspendre les droits de douane  ou soit les fabricants d’huile n’ont pas la volonté de répercuter cette suspension sur les prix », analyse un expert en industrie agroalimentaire.

Aujourd’hui, sur le marché national, les prix de l’huile de table ne cessent d’augmenter sous l’effet de la hausse des prix des intrants au niveau international. A titre d’exemple, en l’espace de 18 mois, le prix de la bouteille de 5 litres de la marque « Huilor » est passé de 60 DH à 147 DH, celui de la marque « Lesieur » de 51 DH à 120 DH. La marque « Afia », quant à elle, affiche le même prix pour le même volume.

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Il faut dire que le Maroc est directement confronté aux fluctuations du marché international, puisqu’il importe 98 % de la matière première qui s’utilise dans la fabrication de l’huile de table, et par conséquent les prix finaux sont fortement affectés. Le Royaume recourt au marché international pour importer des huiles végétales brutes, notamment du soja, avec une facture annuelle d’environ 4 milliards de DH, puisque les oléagineux produits localement ne contribuent qu’à 1,3 % des besoins nationaux. Quelle marge de manœuvre pour faire baisser ces prix  quand on sait que la crise russo-ukrainienne ne s’arrêtera pas de sitôt et par conséquent la pression se poursuivra au cours de 2022 sur les prix des matières premières, à savoir les tournesols ou le soja ?

Depuis plusieurs années, l’État subventionne à travers la Caisse de compensation plusieurs produits dont le butane ou encore le sucre pour les particuliers, afin d’assurer la stabilité des prix de ces produits. D’ailleurs, l’exécutif vient d’approuver dans ce sens un projet de décret pour mobiliser des crédits supplémentaires d’un montant de 16 milliards de DH pour continuer à soutenir les dépenses de cette Caisse de compensation.

Mais il y a quelques années, l’État s’est retiré du subventionnement direct de l’huile de table, du diesel et de l’essence.  Pourtant, nombreux sont ceux qui réclament depuis des mois le retour des subventions pour l’huile de table et le carburant dans les stations-service, au vu des prix.  Pour les hydrocarbures, par exemple, la ministre des Finances et de l’Économie, Nadia Fattah Alaoui, a répondu négativement aux demandes de subventions. Selon elle, l’Etat « n’a pas les ressources financières suffisantes pour fournir le carburant subventionné ». Un retour en arrière sur la décision de libéraliser le secteur des carburants n’est donc pas possible. C’en est vraisemblablement le cas pour l’huile de table. « Face à la faiblesse de la production locale et aux fluctuations du marché international, le stockage reste une solution parmi les solutions, mais la réalité révèle que la capacité de stockage disponible au Maroc de l’huile de table », estime l’expert en industrie agroalimentaire qui précise que dans ce cas, les acteurs de l’industrie des huiles de table devront faire d’importants investissements dans les infrastructures pour augmenter cette capacité de stockage.

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Mais pour l’Association Professionnelle des Fabricants d’Huile au Maroc, la solution passe par une Souveraineté nationale en termes de culture des graines oléagineuses, à ce titre, elle dit travailler conjointement avec le gouvernement pour mettre en place les mécanismes nécessaires pour assurer une meilleure production locale de graines oléagineuses. À terme, les producteurs d’huile de table estiment que c’est le seul moyen pour protéger le Royaume contre la flambée des prix à l’international. À cet effet, plusieurs mécanismes sont à activer, selon eux. Dans ce sens l’association affirme avoir proposé un plan d’action au gouvernement.

Pourtant, le Maroc disposait d’environ de 150 000 hectares plantés par an en oléagineux, notamment le tournesol à l’ouest et au nord du Royaume, mais cette superficie a considérablement diminué pour jusqu’à atteindre seulement 17 000 hectares au cours de l’année 2021.  D’après les chiffres du Département de l’Agriculture, le Maroc dispose d’une superficie estimée à 600 000 hectares qui peuvent être exploités pour augmenter la superficie des oléagineux avec des graines de tournesol et de colza. Ce qui permet de sécuriser un prix minimum garanti au profit des agriculteurs, quel que soit le prix des oléagineux prioritaires sur le marché international, avec l’utilisation de semences homologuées et à haut rendement par les agriculteurs.  La principale raison de l’abandon des oléagineux est que les agriculteurs recherchent des cultures moins risquées et plus rentables, car les autres chaînes de production sont bien organisées et offrent des incitations importantes à l’investissement comme c’est le cas par exemple de la chaîne de production sucrière.

 
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