Agro-Industrie

Huile de table : Les raisons profondes de la hausse des prix

L’augmentation des prix de vente de l’huile de table constatée ces derniers mois inquiètent énormément les ménages marocains, d’autant plus que le Maroc entame le mois sacré de Ramadan, synonyme d’augmentation de la consommation dans le pays.

Les Marocains font face à une flambée des prix de plusieurs produits de première nécessité depuis plusieurs mois. Carburant, produits alimentaires au rang desquels l’huile de table, la tomate… les prix augmentent et la situation commence vraiment à peser sur leur pouvoir d’achat. Le dernier conseil de Bank Al-Maghrib tenu le 21 mars prévoit un taux d’inflation record de 4,7% en 2022. Il va sans dire que cela ne rassure pas les ménages, d’autant plus que le Maroc entame le mois sacré de Ramadan, qui est synonyme de hausse de la consommation.

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D’ailleurs, l’un des produits les plus utilisés pendant ce mois de sacré est l’huile de table dont le prix a connu des hausses ces derniers mois. Quelles sont donc les raisons profondes de cette flambée ? « Les tensions géopolitiques entre plusieurs pays contribuent à la hausse des prix des matières premières dont l’huile végétale. Colza, tournesol, arachide, olivier et palme : voilà les principales plantes oléagineuses cultivées dans le monde. On en tire de l’huile végétale pour notre alimentation, des tourteaux pour celle des animaux, mais aussi des biocarburants. La hausse des prix de l’huile végétale pourrait être expliquée par les tensions entre l’Inde et la Malaisie », confie un expert, qui fait clairement le lien entre les crises internationales actuelles notamment la guerre en Ukraine et ses conséquences comme des raisons de la hausse des prix.

Dépendance aux importations

Force est de noter que depuis vingt ans, la demande mondiale en huiles a explosé proportionnellement à la démographie des pays émergents et aux modes alimentaires de leurs habitants. Ce qui augmente davantage la pression sur le Maroc qui reste trop dépendant du marché international. Selon un rapport du Conseil de la concurrence publié en 2021, près de 98,7% des besoins domestiques du pays sont importés, essentiellement sous forme d’huiles brutes, et seules 1,3% sont couverts par les graines produites localement. « A ces raisons structurelles, s’ajoutent quelques motifs conjoncturels pour expliquer la hausse des prix actuelle. En 2021, la production européenne n’a pas dépassé 17 millions de tonnes pour le colza, et celle d’autres oléagineux (tournesol, soja, pois) 30 millions de tonnes. C’est bien loin des rendements espérés pour satisfaire les besoins des fabricants de biocarburants et d’huiles alimentaires et des triturateurs. Ces industriels qui broient les grains pour produire la nourriture animale. Ajoutons à cela la baisse des récoltes au Canada et aux États-Unis, du fait des sécheresses dans ces pays », poursuit notre expert.

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« Amorphe avec la crise du Covid-19, le marché a repris des couleurs. Il est, en plus, dopé par les besoins croissants en biocarburants, du fait du cours très élevé du pétrole. Mais l’offre est à la peine. Les producteurs sont confrontés à un double problème : une pénurie de main d’œuvre et des stocks au plus bas. Par exemple, l’Indonésie, premier producteur d’huile de palme, a drastiquement baissé ses exportations pour privilégier le marché domestique. Cela explique en grande partie que ce type d’huile se vende aujourd’hui 61% plus cher qu’il y a un an. Un record », fait-il également remarquer. Cependant, ce n’est pas tout. Les conditions climatiques jouent aussi un rôle significatif. Sécheresse, inondation dues aux abondantes pluies dans les principaux pays producteurs de matières premières ont impacté la récolte mondiale de l’ensemble des oléagineux. Autant de facteurs qui influent donc sur le prix final auquel les ménages marocains vont acheter leur huile de table au marché.

Un enjeu de taille

D’ailleurs, le Conseil de la concurrence l’a très bien expliqué dans son rapport de l’année dernière : « Les augmentations des prix sont dues d’une part, aux insuffisances structurelles de la filière oléagineuse locale et, d’autre part, aux éléments conjoncturels liés aux fluctuations des cours mondiaux des huiles brutes, de l’énergie et du transport », détaille le conseil. Sur le plan local, force est de constater que l’Etat n’a cessé de multiplier les efforts ces dernières années pour limiter l’impact de son exposition au marché international dans ce secteur. En effet, il va sans dire que que la hausse des prix des matières premières a démontré l’importance de développer la production nationale d’oléagineux pour réduire la dépendance du Maroc aux importations et améliorer l’autonomie alimentaire.

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Ces efforts se sont ainsi traduit par la mise en place de contrats programmes entre l’Etat et la profession. Ces ambitions sont portées par l’interprofession marocaine (Folea) et soutenues par le programme Maghreb Oléagineux, cofinancé par l’Union européenne et Terres Univia, qui accompagne les agriculteurs marocains souhaitant développer les cultures du colza et du tournesol. Ainsi, depuis 2012, la filière oléagineuse a enregistré une évolution de la productivité moyenne annuelle de 57%, celle du tournesol est passée de 19.000 tonnes en 2012 à 38.000 tonnes pendant la campagne 2017-2018. Avec des besoins moyens de 1.080.000 tonnes de tourteaux et 756.000 tonnes d’huiles de graines principalement issues des importations, il est clair que l’enjeu est de taille pour le Maroc.

 
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