Ijara : mode opératoire
Ijara, qui figure parmi les six produits participatifs prévus par la loi bancaire, vient d’être réglementé par la Banque Centrale. Il est le produit le plus commercialisé après Mourabaha par les banques participatives en raison de sa simplicité et du peu de risques qu’il présente. Mais avant de passer en revue les règles qui vont régir sa commercialisation, il faut répondre à la question de savoir en quoi consiste-t-il. Pour reprendre la définition de la loi bancaire, Ijara est un contrat par lequel «une banque participative met, à titre locatif, un bien meuble ou immeuble déterminé et propriété de cette banque, à la disposition d’un client pour un usage autorisé par la loi».
Il ressort donc qu’il s’agit d’un contrat de location d’un bien, meuble ou immeuble (voiture, local à usage professionnel, logement etc.), entre la banque en sa qualité de propriétaire et son client (un particulier ou un professionnel). Le contrat est conclu pour une durée déterminée et le montant du loyer est fixe ou variable. Dans ce dernier cas, le contrat précise les conditions de sa variation avec un montant maximum et un montant minimum du loyer. Le client (locataire) a la possibilité de résilier le bail avant l’échéance sous condition de respecter les clauses du contrat.
En couverture du risque d’impayés, le contrat peut prévoir qu’en cas de retard dans le paiement, le client doit payer, sauf motif valable du point de vue de la Sharia, une indemnité couvrant les dommages causés à la banque. De même, il peut être assorti de toute garantie prévue par la législation en vigueur (caution, hypothèque,…) pour préserver les intérêts de la banque.
Lorsque la banque ne dispose pas dans son patrimoine d’un bien répondant aux besoins du client, celui-ci a la possibilité de demander à sa banque de l’acheter pour qu’il lui soit donné en location. Dans ce cas, le contrat Ijara peut être précédé d’une promesse unilatérale en vertu de laquelle, le client s’engage à prendre le bien en location dès son achat par la banque. La promesse comprend une description du bien ainsi que les modalités et le délai de sa mise à la disposition du client. Et pour s’assurer de la bonne fin de la promesse, la banque est autorisée à demander au client de lui verser «une avance de sérieux» dont le montant ne dépasse pas un pourcentage du coût d’achat du bien, tel que fixé par la Banque Centrale. En cas de non respect de la promesse de location, il est permis à la banque de prélever sur «l’avance de sérieux» un montant correspondant au préjudice effectivement subi. D’un autre côté, si la banque ne met pas le bien à la disposition du client selon les conditions convenues entre les parties, ce dernier récupère son avance sans préjudice de l’indemnité qu’il est en droit de réclamer à sa banque.
Le contrat Ijara n’est pas toujours un contrat de location pur et simple (Ijara Tachghilia), les parties peuvent convenir que la propriété du bien soit transférée au client au terme de la location. Dans ce cas, on parle de contrat Ijara Mountahia Bi-Tamlik qui présente presque les mêmes caractéristiques que le leasing. Le transfert de propriété s’effectue en vertu d’un contrat indépendant du contrat Ijara qui intervient obligatoirement après la fin de ce dernier.
Sur le plan fiscal et parafiscal, la question de la neutralité ne soulève plus de problème. En matière de droits d’enregistrement, le contrat Ijara portant sur un immeuble ou un fonds de commerce, sa résiliation en cours de location par consentement mutuel, ainsi que le contrat d’achat qui en découle sont soumis à un droit fixe de 200 DH. Concernant les droits de Conservation foncière, le contrat Ijara ainsi que le contrat de transfert de propriété en faveur du client sont soumis à un droit fixe de 500 DH chacun.
Par ailleurs, la Loi de Finances pour 2016, a introduit des mesures qui ont renforcé le principe de neutralité fiscale en garantissant au contrat Ijara Mountahia Bi-Tamlik, le même traitement fiscal que les produits conventionnels. Ainsi, en matière de TVA, la marge locative de la banque est taxée à 10% ( au lieu de 20% auparavant) avec exonération pour l’habitat social. Concernant l’IGR, le montant de la marge locative payé par le client dans le cadre d’un contrat Ijara pour l’acquisition d’un logement destiné à l’habitation principale est déductible, dans la limite de 10%, du revenu global imposable. Par ailleurs, la période d’occupation du logement par le client en tant que locataire, est prise en considération pour le calcul de la période de six ans, nécessaire à l’exonération du profit résultant de la cession du logement.