Ingénieur, manager, blogger
Il a une carrure de rugbyman, et à 36 ans, ce jeune père de famille a deux bébés dans sa vie: son fils et son entreprise. Entre blogosphère, twittoma et ses activités à la CGEM, Smael Sebti surfe sur la vague des nouvelles technologies depuis ses débuts, et il en a même fait sa vie.
E
st-ce une vocation que d’entreprendre? Faut-il passer par le circuit des grandes écoles parisiennes pour y parvenir? Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a pas de “recette” d’entrepreneur. En tout état de cause, il a suffi à Smael Sebti de partir d’une bonne formation généraliste, d’un cursus d’ingénieur d’une école française qui lui a inculqué ce que la France a de mieux à proposer en matière de technologie, et d’une formation de manager. Il ne s’est donc pas embarrassé des parcours du combattant des classes préparatoires pour se focaliser sur des études moins académiques certes, mais qui préparent à l’essence de l’ingénierie, à savoir: créer, inventer et acquérir une expertise technique.
Né en 1978, à Casablanca, Smael est l’aîné des trois enfants d’un couple d’industriels dans le secteur du textile. Son père avait auparavant travaillé dans la marine marchande, lorsque sa mère s’est depuis reconvertie dans le coaching et le développement personnel. Son enfance aura pour cadre la plus grande ville du pays, dont elle est le poumon économique. Ce sera une période agréable dont il garde encore des souvenirs vivaces. “ Un simple détail révélateur de l’époque quand nous pouvions nous permettre des choses qui ne sont plus possibles de nos jours. Il m’arrivait régulièrement d’enfourcher mon vélo et en quelques minutes, aller chercher des beignets au coin de la rue. Il est clair que de nos jours, une telle emplette n’est pas sans risque. D’ailleurs, il ne me vient pas à l’esprit d’en charger un de mes enfants”, explique-t-il, non sans regret. Mais jamais sans se départir de son sourire. L’entrepreneur qu’il est devenu, nous reçoit poliment, dans la salle de réunion. La silhouette massive, l’air avenant, il est confortablement assis dans un fauteuil qui sied à la fonction.
Une enfance casaouie
“J’ai eu la chance de grandir dans une famille très unie. Ensemble, nous partagions beaucoup d’activités d’intérêt commun. Tel un voyage mémorable en Europe. Le périple nous a conduit à travers l’Espagne, la France avant d’arriver en Allemagne. Toute la famille dans la même voiture et pratiquement à l’aventure. Cela semble simple de nos jours. Mais à l’époque, sans internet, sans téléphone mobile, il n’était pas aisé de tout organiser. Par exemple, s’informer sur les régions traversées, réserver les hôtels à l’avance, et qui ne correspondaient pas toujours aux descriptions des guides touristiques.”, explique-t-il, dans un élan passionné, qui tranche avec ses postures détendues. Sa scolarité se passe dans les écoles de la Mission française de Casablanca. Issu d’un milieu favorisé, il a la chance de multiplier les activités extra scolaires, comme les arts martiaux, le basket, le football et les sports de glisse. La proximité de la mer offre les avantages de la plage et de la piscine. Un regret néanmoins. Celui de n’avoir jamais pu faire de la musique. Par contre, il aura la chance d’être parmi les “few happy” à disposer d’un ordinateur, à l’époque. La famille se portera en effet acquéreur de leur premier ordinateur familial au début de la micro-informatique. Dès ses 16 années, il aura son premier ordinateur portatif. Mais lorsqu’on lui demande s’il était un geek, il répond : “je n’étais pas très populaire, mais j’avais cet intérêt pour l’informatique et j’appréciais assez les mangas. Ce n’est qu’en école d’ingénieur que j’ai découvert de vrais geeks”, se défend-t-il. Au lycée, Smael est un élève moyen, précise-t-il modestement, et après avoir obtenu un bac scientifique, il peut s’envoler pour Paris poursuivre ses études.
Monter à Paris pour les études
Nous sommes en 1997, et internet commence à peine à percer au Maroc. Depuis une année, Smael, déjà mordu, squatte les fauteuils des cybercafés de Casablanca. Il sera alors surpris, lorsque arrivant à l’Ecole Supérieure d’Ingénieur en Electronique et Electrotechnique de Paris, il apprend que l’école n’a pas de connexion internet. Avec ses camarades, ils prennent un abonnement et câblent les chambres de la résidence étudiante où ils étaient logés. Ils peuvent alors surfer sur cette lame de fond qui révolutionnera l’économie classique et la communication. Entre amis, ils partagent les mêmes expériences, préparent les mêmes examens, et s’initient aux technologies limites. Ce qui permettra à de simples étudiants de pirater des cartes des chaînes de télévision du câble et des puces de consoles de jeux. Il passe cinq années à l’école d’Ingénieurs qu’il a intégrée, et ne s’en contente pas. Smael décide de parfaire ses études par un cursus de gestion. “Je n’étais pas fait pour les finances. Dès le début, mon objectif était d’entreprendre, et c’est la formation que j’ai suivie à Sup de Co Rouen”, se rappelle-t-il, objectivement. A la sortie de l’Ecole Supérieure de Commerce de Rouen, Smael fait ses débuts dans le conseil. “C’est un milieu très structuré où l’on apprend à travailler. Comme l’on est confronté à différents domaines, on développe des expertises très diverses”, développe-t-il. Il a alors l’occasion de travailler pour différentes entreprises, telles qu’Air France, Gaz de France, SFR et même pour l’Administration des Impôts. Il nous révèle avoir une passion secrète, un hobby : la politique. A ce moment, il tient déjà un blog, mais même s’il est étranger en France, il veut se frotter à ce monde de la politique qui le fascine et l’intrigue. Il va jusqu’à s’encarter dans le parti centriste du Modem. “Lorsqu’on entre en politique en France, on commence par le bas. C’est par ses propres moyens qu’on développe son réseau et qu’on gravit les échelons. J’ai même rencontré des gens qui m’ont proposé de rejoindre le premier cercle autour de François Bayrou. Ce que j’ai fait”, assène-t-il. Une révélation s’il en est…
De la politique en France à la CGEM au Maroc
L’expérience lui sera profitable, puisque Smael découvre la violence et la compétition du monde politique. Au sein de l’ équipe, il apprend à optimiser la communication sur les réseaux sociaux et à se perfectionner dans cette expertise. Déjà, il a des envies d’entreprendre. Mais Smael doit rentrer au Maroc. Un temps d’adaptation ou plutôt de réadaptation est nécessaire. Il sera mis à profit et poursuit dans son domaine, le conseil. Il lance sa propre entreprise, avec 20 000 DH et un seul client. L’entreprise croît néanmoins progressivement et sûrement. Nous sommes en 2011, et Smael se marie. Son premier enfant voit le jour dans la foulée, et sa vie tourne alors autour de sa famille et de son entreprise : “j’ai deux bébés, mon fils et mon entreprise”, commente-t-il, dans un rire enjoué. L’entreprise se développe à l’international, qui a une représentation à Paris, propose des prestations bien moins chères qu’en France, à qualité égale. Il attire des clients d’Espagne et d’ Algérie. Arrive 2012, Quant Smael intègre la commission communication de la CGEM: “Lorsqu’on est dans une organisation telle que celle là, on sait que l’on a accès au milieu des affaires dans ce qu’il a de mieux. Economiquement, c’est là que cela se passe. On a l’impression que l’on a plus de poids, parce que plus proche des centres de décisions,” avance-t-il. En parallèle, il continue de blogger et d’être constamment présent sur le web. Twitter et Facebook ne sont que quelques uns des médias sur lesquels il est présent et sur lesquels il regrette qu’il n’y ait pas plus d’intellectuels et de journalistes qui investissent ce champ. Pendant ce temps, son entreprise WBC poursuit sa croissance. Smael continue à s’exprimer sur la toile et de discuter des modèles et standards internationaux sur la scène économique, en rêvant de stimuler la création de starts ups par un système de défIscalisation des stocks options. Les rêves ont ceci qu’ils peuvent toujours se réaliser, par surprise ou consciemment…