Insécurité : les chiffres et les sentiments
Le Ministère de l’Intérieur n’en peut plus des cris à l’insécurité. Il a préféré répondre par les chiffres. On apprend que le Maroc enregistre deux fois moins de délits et de crimes, par millier d’habitants que la Belgique par exemple et que le taux de résolution est de 85 %. Le Maroc en terme d’insécurité est classé 160ème sur 200 pays. Pour la première fois, les autorités sont heureuses de se retrouver dans les profondeurs d’un classement international, ces chiffres sont cependant à nuancer. Les Marocains n’ont pas le reflexe citoyen de porter plainte, chaque fois qu’ils sont victimes d’un larcin ou même d’une agression.
Le problème avec l’insécurité c’est que c’est d’abord un sentiment. Or il est fortement diffusé au sein de la société. Ensuite les chiffres doivent être détaillés, ce qui augmente au Maroc, ce sont les atteintes aux personnes, or c’est ce qui alimente le sentiment d’insécurité. La délinquance en col blanc, les braqueurs de banque ou les escrocs n’agissent pas sur les sentiments du public de la même manière que le camé du coin, qui agresse la vieille dame à l’aide d’un coutelas.
L’effort d’information et de communication des départements concernés est à marquer d’une pierre blanche. Il faut le saluer et espérer qu’il se développe encore plus. Mais il est clair qu’il y a des problèmes en matière de police de proximité. La présence policière est handicapée par la faiblesse des moyens humains. Contrairement à une idée reçue il n’y a pas assez de flics au Maroc. L’encadrement policier, par rapport à la population, est plus faible que tous les pays européens, que l’Algérie, la Tunisie, la Turquie ou l’Inde qui a pourtant plus d’un milliard d’habitants. Seuls les pays où l’armée se charge de l’ordre public ont un taux d’encadrement policier, plus faible. Mais ce n’est pas le choix sociétal qui est le nôtre.
Autre chiffre inquiétant c’est la récidive, elle est quasi automatique. Les déficiences des prisons sont montrées du doigt. Mais leurs efforts pour l’aide à la réinsertion ne sont pas encouragés par une société qui offre peu d’opportunités un ancien délinquant même quand il a payé sa dette. Une stratégie sécuritaire ne peut être que globale.