Economie

Introductions en bourse : l’espoir renait !

A côté de Disty Technologies, dont la première cotation en bourse aura lieu ce 20 juillet 2022, 5 à 7 autres introductions en bourse seraient en préparation auprès des banques d’affaires. L’espoir d’une reprise des IPO est de plus en plus présent chez les acteurs du marché boursier. Pourquoi cet optimisme ?

Si les tensions géopolitiques et les facteurs comme l’inflation ont fait baisser le nombre d’introductions en Bourse (IPO) dans le monde de moitié au deuxième trimestre 2022 par rapport à la même période en 2021, l’activité au Maroc, d’ailleurs avec ou sans pandémie, n’a pas pour autant connu de changement. Sur les trois mois concernés, 305 IPO ont été enregistrées pour un montant de 40,6 milliards de dollars américains à l’échelle mondiale, des chiffres en recul de 54% et 65% après une « année 2021 record » qui avait vu 1 171 entrées en Bourse, selon une récente étude du cabinet EY ( ndlr : EY, aussi connu sous son ancien nom Ernst & Young) .  

En Europe/Moyen-Orient/Inde/Afrique, où des « temps troublés et des incertitudes inhabituelles ont maintenu la volatilité du marché à des niveaux élevés », le nombre d’IPO a chuté à 83 (-62%), pour un montant levé de 14,8 G$ US (-44%). Au Maroc, la Bourse de Casablanca va accueillir sa première de l’année ce 20 juillet 2022 avec la première cotation de Disty Technologies, distributeur informatique, dont l’IPO portera à seulement 76 le nombre de sociétés cotées sur la place casablancaise. Il n’empêche, qu’à un peu moins de six mois de la fin de 2022, l’espoir d’avoir des introductions en Bourse renait. En effet, parallèlement à l’IPO de cette PME créée en 2011 par Younès Himdy, cinq à sept autres introductions en Bourse seraient en préparation auprès des banques d’affaires, selon plusieurs opérateurs du marché boursier casablancais. Parmi les opérations attendues, on peut citer celle du groupe Akdital Holding, spécialisé dans le secteur de la santé, qui prévoit une introduction en Bourse afin de financer son expansion à l’international.

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De son côté également, Dislog Group a déjà tracé déjà sa voie vers la Bourse. Annoncé pour 2022, le projet d’introduction en bourse à travers une IPO du groupe présidé par Moncef Belkhayat est finalement reporté en 2023. Les autres candidates à la bourse sont pratiquement toutes des PME. «Tout à fait, l’espoir renaît au niveau de la reprise des IPO en Bourse de Casablanca. En effet, les entreprises candidates semblent être des PME dont certaines sont accompagnées par des fonds de private equity. Aussi, malgré la correction des cours en 2022, les ratios de valorisation demeurent intéressants pour les vendeurs avec un P/E ( ndlr : Price-earning ratio (PER), appelé en français ratio cours sur bénéfices ) moyen supérieur à 20. De même, Disty qui fait partie du programme Elite, peut donner des idées aux plusieurs dizaines autres entreprises qui y ont participé», confirme Farid Mezouar, Directeur exécutif de FL Markets.

Il faut dire, que Disty viendra renforcer le segment du middle market de la Bourse de Casablanca qui cherche activement depuis un moment à étoffer le nombre de sociétés inscrites à la cote, notamment avec un programme Elite qui est à sa dixième cohorte. D’ailleurs, ce spécialiste de la distribution informatique sera la première PME issue de ce programme, qui vise à former les dirigeants d’entreprises éligibles à des IPO, à franchir le pas après avoir fait partie de la toute première cohorte en 2016. D’où l’optimisme des dirigeants de la place casablancaise qui espèrent que Disty créera des émules auprès des PME.

Intervenant au cours de la conférence de presse annonçant l’IPO de Disty, le Directeur général de la Bourse de Casablanca, Tarik Senhaji s’est félicité de cette opération qui est une première du genre puisque la PME sera cotée sur le marché A (Alternatif). Pour lui, cette IPO est d’une importance primordiale puisqu’elle servira de benchmark à de futures candidates rappelant que Disty fait partie de la première cohorte du programme Elite initié conjointement par la Bourse et la Bourse de Londres pour accompagner, encadrer et, éventuellement de préparer cette catégorie d’entreprises à ses IPO. 

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Aujourd’hui, plus d’une centaine de PME ont rejoint le programme depuis son lancement au Maroc en 2016. Depuis également, ces entreprises sont aptes à recourir aisément au financement du marché en effectuant des emprunts obligataires, des augmentations de capital ou des introductions en Bourse. Elles peuvent également recourir à des opérations de fusions-acquisitions, de joint-ventures… et ce, grâce à la préparation et l’accompagnement dont elles ont bénéficié en intégrant Elite Maroc.  Selon une source proche de la Bourse de Casablanca, le quart des entreprises ayant bénéficié du programme ont annoncé leur intention de réaliser une opération sur le marché, dont la majorité via IPO. Par ailleurs, 6 entreprises ont déjà réalisé des opérations d’ouverture de capital, 8 autres ont mandaté des banques d’affaires pour l’ouverture de leur capital et une quinzaine d’entreprises planchent actuellement sur la refonte de leur stratégie et/ ou entamé des démarches en vue d’améliorer leur gouvernance en prévision d’un recours prochain au marché financier.

Depuis décembre 2021, la Bourse de Casablanca mène une campagne de sensibilisation auprès des PME à l’intérêt que représente l’IPO pour les entreprises. Cette opération compte déjà quatre rencontres régionales à son actif, en l’occurrence celle destinée aux entreprises de la Région du Nord en décembre 2021, de Fès-Meknès en mars 2022, de l’Oriental le 13 mai, et de Casablanca-Settat le 16 mai. Ces rencontres ont suscité l’engouement des entrepreneurs et patrons d’entreprises. Il faut dire, qu’elles arrivent à mettre la lumière sur les opportunités de financement qu’offre le marché boursier pour les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur position géographique.

L’année dernière, grâce à l’introduction en bourse de TGCC et aux opérations d’augmentation de capital, les montants levés ont atteint les 3 milliards de DH en 2021. Ce n’est pas un hasard si dans les objectifs qu’elle a fixés pour développer le marché des capitaux, la Commission spéciale sur le Nouveau modèle de développement (CSMD) a insisté sur l’importance de diminuer le poids des banques dans la capitalisation boursière de 35% à 20% en 2035 et de porter le nombre de sociétés cotées de 76 en 2019 à 300 en 2035.  Logique donc, que le marché boursier se met à rêver de revivre le rush des introductions en bourse et des annonces d’IPO de la fin de l’année 2011. A l’époque, les entreprises faisaient la queue devant la cloche. Tour à tour, Stroc Industrie, S2M, Jet Alu, Afric Industries, s’étaient succédées à la bourse. Mais depuis 2016, les recrues se font désirer et c’est à peine pratiquement une IPO par an.

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En effet, malgré un potentiel important d’entreprises qui répondent aux critères d’introduction en Bourse et que la place casablancaise est classée cinquième dans la région du Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) selon l’importance de capitalisation boursière et 2ème en termes de volumes des transactions au niveau du continent, les opérations d’IPO restent encore rares. « Je suis tenté de dire que l’insuffisance du nombre d’IPO, relève d’une responsabilité collective. Ainsi, l’Etat préfère encore financer certaines entreprises publiques rentables (ex: Tanger-Med) par de la dette privée au lieu de tenter l’augmentation de capital en Bourse.

Aussi, selon les cas, les banques peuvent préférer orienter les entreprises clientes vers le crédit bancaire ou la dette obligataire. De même, la Bourse de Casablanca semble peiner à séduire au-delà de son public traditionnel comme le montre l’exemple du faible nombre de fonctionnaires qui participent aux IPO. De plus, le potentiel du marketing digital est sous-exploité pour la promotion des actions. In fine, une IPO demeure une prise de risque qui est encore peu admise dans la culture économique marocaine », analyse Farid Mezouar.

 
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