«Je suis fier de faire partie de cette profession»
Interview. C’est avec une philosophie savamment entretenue que Karim Habib exerce son art. A 45 ans, il est depuis juin 2012 à la tête du design de BMW et supervise le design des futurs modèles de la marque munichoise. L’occasion de revenir en sa compagnie sur sa vision du métier et son appréciation sur l’évolution du design automobile. Propos recueillis Par David Jérémie
Challenge : Vous avez débuté votre carrière courant 98, période durant laquelle la décision fut prise de plancher sur la Série 7 E65, le modèle de la rupture stylistique voulu par BMW. Que vous inspire cette période?
Karim Habib : Ce fut une période relativement captivante. Nous étions effectivement en pleine révolution stylistique, notamment avec la quatrième génération de la Série 7 E65 dont la commercialisation a débuté courant 2001. Elle fut le premier modèle de la marque à intégrer la technique de dessin «flame surfacing» inspiré par Chris Bangle. Je reste convaincu que ce que nous faisons actuellement s’inscrit parfaitement dans la continuité de ce qu’avait entrepris Chris et toute l’équipe.
C. : Justement, quelle est votre appréciation à ce jour du design de la marque ?
K.H. : Toute l’équipe a effectué un excellent travail et continue à le faire comme en témoigne notre gamme actuelle de produits tant sur le plan stylistique, que technique. Nous poursuivons notre marche en avant et comme vous avez pu le constater, le design des BMW i en est l’illustration parfaite et prouve que nous pouvons faire de très belles choses. Sachez que je ne suis pas en charge de ce design, c’est la raison pour laquelle je peux vous en parler de façon très objective. C’est un design tellement clair, très authentique, c’est un vrai design industriel que j’apprécie vraiment beaucoup.
C. : Dans la gamme des véhicules d’époque de BMW, y a-t-il eu un design qui vous ait fortement séduit ?
K.H. : Absolument ! La liste est longue. Je pourrais vous citer la 2002 Touring (de 1968 ndlr), de la 2800 CS (de 1968), des 3,0 CSL et CSI (de 1971). Il faut y ajouter le coupé 3200 CS (de 1962) crayonné par Bertone. Des véhicules au design soigné et très élégant.
C. : Cela a-t-il alimenté votre créativité ? Qu’est-ce qui vous inspire aujourd’hui ?
K.H. : Oui, ce sont manifestement des sources d’inspiration. Disons que l’inspiration est à tous les niveaux, aussi bien dans l’automobile que dans l’architecture ou le design de meuble pour ne citer que cela. Ce qui suppose un examen attentif à la fois de l’environnement dans lequel nous évoluons, des produits qui le composent et de chacun de ses aspects.
C. : Comment est-ce que vous percevez l’évolution du design automobile ?
K.H. : Aujourd’hui, il n’y a presque plus de mauvaises créations stylistiques à quelques rares exceptions près. La clientèle a accès dans toutes les gammes de prix à du très beau design et, en cela, je suis fier de faire partie de cette profession. Pour autant, il y a beaucoup de défis à venir et nous devons les affronter de façon courageuse. C’est le cas de la conduite autonome et ce qu’elle va engendrer en termes de créativité, d’aérodynamique, d’utilisation de matériaux…
C. : Comment évoluera au fil du temps le design de BMW ?
K.H. : Quelle est la place de l’automobile dans notre société et comment évoluera-t-elle ? Qu’en est-il de la mobilité individuelle, de l’élégance, du plaisir de conduite, de la sportivité, de la technologie et des attentes de la clientèle … autant de questions et de thèmes récurrents que nous pouvons cerner et pour lesquels nous avons des réponses qui nous permettent d’avancer dans notre créativité. Je crois par-dessus tout qu’il faut rester honnête et authentique dans notre démarche. ■
Bio Express
1970 : né à Beyrouth
1994 : fin de ses études à l’Art Center College of Design de Pasadena
1998 : intègre BMW
2009 : chef du design chez Mercedes
2011 : chef du design extérieur BMW
2012 : responsable du design