La filière de la pêche appelée à relever de nouveaux défis
Comme tout système agroalimentaire résilient, la pêche est un élément stratégique, d’autant plus que cette grande richesse nationale est leader sur le marché mondial. L’industrie de la conserve de poisson marocaine a connu un développement extraordinaire. Œuvrer pour la protection de cette richesse nationale est le leitmotiv de toutes les parties prenantes face aux défis et menaces qui visent essentiellement la ressource.
Le Maroc dispose d’un littoral s’étendant sur plus de 3.000 km au long de sa façade Atlantique et sur 500 km le long de sa côte Méditerranéenne. Il occupe actuellement le 1er rang mondial des producteurs/exportateurs de conserves de sardine «Sardina Pilchardus Walbaum ». En effet, le secteur, assure 66% de la production mondiale et détient 46% de parts de marché.
Place de la pêche dans l’économie nationale
Les principaux produits de l’industrie de transformation et de valorisation des produits de la pêche sont les conserves de sardine, de maquereau et de thon rouge. Les principaux marchés d’exportation des produits marocains en conserves sont l’Europe, l’Afrique, le Moyen orient, l’Amérique et l’Asie.
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Ces dernières années, l’activité de valorisation des produits de la mer a affiché une part à deux chiffres des exportations. Le plan Emergence a hissé l’industrie de transformation et de valorisation des produits de la pêche parmi les métiers mondiaux du Maroc. La filière traite près de 70% des captures et exporte 85% de sa production vers les marchés extérieurs d’une centaine de pays dans les quatre coins du monde. La dernière note de conjoncture des finances, montre une évolution positive de l’activité de pêche côtière et artisanale à fin juillet. En effet, au terme des sept premiers mois de 2022, «le volume des débarquements de la pêche côtière et artisanale s’est consolidé de 19,8%, bénéficiant d’une performance de +7,9% au mois de juillet, de +58,3% au deuxième trimestre 2022, atténuée par une baisse de 21,3% au titre du premier trimestre de la même année».
A fin août 2022, les débarquements des produits commercialisés par la flotte de la pêche côtière et artisanale marocaine ont totalisé 893.585 tonnes (T), soit une hausse de 26% par rapport à la même période de l’année écoulée. Les débarquements des produits commercialisés de la pêche côtière et artisanale ont augmenté de 26% à 893.585 tonnes à fin août 2022 pour une valeur qui a dépassé 6.55 milliards de DH (en progression de 8% par rapport à août 2021.
Pour ce qui est de la flotte de pêche côtière et artisanale immatriculée, elle comptait 2524 bateaux en 2019, dont 82% étaient constitués de trois types, les palangriers (877 soit 35%), les senneurs ou sardiniers (610 ou 24%) et les chalutiers (581 ou 23%). Le tonnage réalisé par ces trois catégories s’élevait en 2019 à 115.817 TJB sur un total global de 142.092 TJB, soit 82%. (Tonneaux de jauge brute. Un tonneau de jauge brute vaut 100 pieds cubes, soit environ 2,832 m3). Par ailleurs, le secteur compte plus de 30.000 emplois directs et plus de 80.000 emplois indirects sur le territoire national.
Les menaces sur le poisson et sur la reine des protéines
Certains experts et professionnels s’accordent pour dire que le secteur souffre au moins de trois menaces : la baisse des stocks, la concurrence inter-filières et le manque structurel de la ressource. On assiste de temps en temps à une diminution des volumes destinés à l’industrie de transformation/valorisation et par conséquent, à celle des marges industrielles. En effet, la hausse des captures est souvent synonyme de baisse des stocks. L’Union Nationale des Industries de la Conserve de Poisson (UNICOP), avait précisé en Octobre dernier, qu’une régulation sur la base du temps et du quota par filière est une solution adéquate. Elle s’avère primordiale pour assurer une durabilité spatio-temporelle, notamment quand les bancs de sardines sont accessibles pour éviter les abus qui nuisent au potentiel de valorisation de la ressource.
Il est important de signaler à cet effet, que le ministère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts, vient ce mardi 27 septembre, d’interdire la pêche anarchique de certaines espèces de poisson à forte consommation, dont la sardine. Ainsi, du 1er mai au 30 juin de chaque année durant les cinq années à venir, cette pêche doit impérativement respecter les nouvelles conditions adoptées. Cette décision avait déjà été prise, notamment en 2017 et couvre une région de 20 miles marins dans l’Océan Atlantique. Souhaitons qu’un suivi aussi rigoureux et un contrôle à la hauteur de cette décision puissent préserver notre ressource nationale.
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Quant à la concurrence inter-filières (pêche, commercialisation, congélation, farine de poisson…), elle recouvre plusieurs aspects conflictuels dont la solution et l’arbitrage équitable, permettrait un salut pour tout le monde. Chaque fois qu’il y a une capture énorme par rapport aux possibilités logistiques des filières de commercialisation de poisson frais, explique un professionnel, le plus grand volume des captures sera vendu aux exportateurs de farines. La filière de la conserve de poisson qui génère plus de valeur ajoutée et assure la durabilité de la ressource halieutique, se trouve freinée dans ses objectifs, notamment de croissance. S’agissant des intrants et autres approvisionnements, la situation est parfois compliquée. L’UNICOP a estimé que « le secteur souffrait d’une flambée des coûts des intrants qui, additionnés aux problèmes d’approvisionnement, impactent les prix de revient depuis plusieurs mois ».
Des systèmes agroalimentaires résilient sont un élément stratégique
Pour une analyse pertinente et approfondie du secteur, il faut d’une part, veiller à fournir aux chercheurs et analystes, les grandeurs macroéconomiques et les données détaillées les plus récentes. D’autre part, l’analyse doit être collective et multidisciplinaire. Elle doit aussi suivre les approches nouvelles scientifiques et socio-économiques. La FAO, vient d’adopter le concept de Chaîne d’approvisionnement alimentaire à la place du concept de «chaîne de valeur alimentaire». Ce nouveau concept consiste en une série d’activités connectées qui englobent la production primaire d’aliments issus de la culture, de l’élevage, des forêts, de la pêche et de l’aquaculture ; les activités de stockage, de transport et de transformation qui ajoutent de la valeur, et la vente en gros et au détail. Cette définition se différencie de la définition «chaîne de valeur alimentaire» telle que proposée par la FAO (2015), en ce qu’elle exclut la consommation alimentaire et l’élimination des déchets.