En Tunisie, la constituante a voté deux fois le même texte et finalement pour le même résultat. Elle a rejeté un projet de loi qui éliminait, tous ceux qui ont assumé des responsabilités de haut niveau, du temps de Ben Ali, de la compétition démocratique. 
La dictature de Ben Ali, avait cela de particulier qu’elle n’avait pas d’opposition réelle, visible, qu’elle réprimait à feu et à sang. Du coup, le RCD, le parti de Ben Ali était réellement présent, dans l’encadrement des populations. Et des gens biens, désireux de servir leur pays, ont collaboré avec ce système. Certains d’entre eux l’ont
fait avec les meilleurs sentiments du monde.
En Libye, ils ont éliminé tous ceux qui ont été nommés par Kadhafi. Pour nous situer, tous ceux qui chez nous, auraient eu un jour, une nomination par Dahir. Le résultat, c’est que ce pays n’a pas de gouvernement, n’a pas d’administration, est incapable de s’assumer. 
On peut multiplier les exemples, la problématique est la même. Peut-on passer d’une dictature absolue à une démocratie, en punissant ceux qui ont, cherché ou simplement accepté des responsabilités ?… Je pense  que c’est une véritable erreur. 
Dans nos pays, le système éducatif est en faillite ce qui réduit le nombre de compétences en présence. Une reconstruction qui élimine les compétences, s’obstrue le chemin d’entrée, quels que soient les slogans adoptés. 
Mais, il faut aller plus loin. En Tunisie que faisait l’opposition contre Ben Ali, quel mouvement de masse a-t-on enregistré avant la révolution ? rien. En Libye c’est encore plus caricatural, 90%  des docteurs en sciences politiques, qui friment devant les caméras, ont fait une thèse, sur le « livre vert », la diarrhée de Mouammar. 
Ces dictatures  n’ont pas été abattues par une opposition organisée, autour d’une idéologie définie mais par des mouvements de foule, très peu homogènes. Croire qu’à partir de là on peut éliminer toutes les élites qui ont « collaboré » avec le régime précédent y compris en tant que compétence technique, est une folie. Ni la Tunisie, ni la Libye n’ont les moyens de cette folie.