Le dispositif de la VEFA est en panne
Plus de trois ans après son introduction, le nouveau dispositif de la vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement (VEFA) n’est pas encore opérationnel et ce, en raison du retard excessif qu’accuse l’adoption du décret devant définir les conditions relatives aux garanties. Pendant ce temps, les promoteurs immobiliers opèrent en toute liberté sachant que l’opération d’achat de biens immeubles en cours de construction présente de gros risques pour les acheteurs.
La culture dominante dans le secteur de la promotion immobilière est-elle hostile à la formule de la VEFA (vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement) ? Après l’échec total de la première version VEFA introduite en 2002, les pouvoirs publics ont lancé, avec en toile de fond de nombreux scandales immobiliers touchant toutes les régions du pays, une réforme qui a abouti à la publication d’une nouvelle loi au début de l’année 2016.
Certes, la réforme a introduit un dispositif, qui malgré ses imperfections, instaure une sorte d’équilibre dans les relations entre le promoteur immobilier et l’acheteur. Pour réduire le risque que prend ce dernier en optant pour l’achat d’un logement ou d’un local commercial en cours de construction, le régime de la VEFA impose au vendeur un mode de déroulement des opérations dont il ne peut pas s’éloigner.
Ainsi, est prévue la signature obligatoire d’un contrat préliminaire qui doit être établi par un professionnel du droit -en général un notaire- qui est tenu de veiller à l’application stricte de la loi. Le contrat préliminaire qui décrit en détail le bien acheté est accompagné d’un certain nombre de pièces et documents dont la présentation par le promoteur est obligatoire, faute de quoi le contrat préliminaire ne peut pas être signé. Entres autres, ce dernier doit fournir au professionnel du droit en charge du dossier de vente, le certificat de propriété du bien support du projet immobilier, le permis de construire, le cahier des charges, le plan d’architecture et le plan de béton armé. Le contrat préliminaire prévoit également l’échéancier de paiement du prix d’achat et la date de livraison.
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Et pour boucler le déroulement de l’opération de vente, la loi met en place un système de garantie destiné à préserver les intérêts de l’acheteur qui paie 80% du prix avant la signature du contrat définitif de vente et sans être sûr de l’aboutissement de l’opération. C’est dans ce cadre que la loi impose au promoteur immobilier de fournir à l’acheteur soit une garantie d’achèvement des travaux, soit une garantie de restitution des montants payés en cas de non-exécution des termes des contrats.
La garantie n’est libérée qu’après inscription sur les registres de la Conservation foncière du contrat de vente lorsque l’immeuble est immatriculé ou la signature du contrat définitif de vente si l’immeuble n’est pas immatriculé.
A noter que l’obligation de fourniture de garantie ne s’applique pas aux entreprises publiques de promotion immobilière dont le capital est détenu par l’Etat ou des personnes morales de droit public.
Tel que construit, le dispositif VEFA mis en place en 2016 après l’échec de la première expérience, comporte des dispositions de nature à préserver les intérêts des deux parties à l’opération de vente. Pour le promoteur, il lui offre la possibilité de bénéficier d’un financement gratuit de la part des acheteurs et en ce qui concerne l’acheteur, il lui garantit au moins le remboursement des avances payées au vendeur.
Mais malheureusement, ce schéma n’existe que sur le papier puisque les mêmes pratiques continuent comme par le passé. Chaque promoteur se fixe ses propres règles qui, dans toutes les hypothèses surprotègent ses intérêts au détriment de l’acheteur qui n’a aucune garantie ni en ce qui concerne le prix, ni en ce qui concerne les équipements du logement acheté, ni en ce qui concerne le délai de livraison ni en ce qui concerne la restitution des montants payés en cas de non aboutissement de l’opération de vente.
Plus de trois ans après sa publication, la loi qui instaure le dispositif VEFA est toujours en stand-by. Ceci pour la simple raison que le décret devant définir les conditions d’octroi de la garantie en faveur de l’acheteur n’est pas encore publié. A ce jour, seules les entreprises publiques appliquent le dispositif VEFA grâce à leur exonération de la fourniture de la garantie de remboursement des montants payés et celle de l’achèvement des travaux.
Et en attendant que le décret d’application soit signé, les citoyens sont livrés en pâture aux promoteurs véreux sachant que ce vide juridique a déjà fait des milliers de victimes à travers tout le pays.