Le scénario égyptien par ( Jamal Berraoui )
Contrairement à bien de commentateurs, j’ai beaucoup de respect pour le cinéma égyptien, surtout les anciens. La version égyptienne de Thérèse Raquin, « y a dalim lak youm » avec Mahmoud Lamliji, me paraît supérieure à toutes les versions du cinéma français. Mais le scénario politique actuel me paraît ridiculement basique.
Sissi n’aura qu’un seul concurrent Hamdine Sabbahi, déjà candidat malheureux contre Morsi. Entre-temps, le candidat civil, ou présenté comme tel, a soutenu le coup d’Etat, la feuille de route ou la prétendue feuille de route, n’a pas dénoncé la répression sauvage.
Il est clair que ce n’est qu’un faire-valoir pour accorder une crédibilité démocratique au plébiscite du maréchal qui n’a mené qu’une seule guerre, celle contre les Islamistes, qu’il n’a pas encore gagnée, loin de là.
Le scénario est connu, il n’y a aucun suspense. Sissi sera élu à une forte, très forte majorité. Le chiffre de la participation sera falsifié. En Algérie, ils ont fait voter les « réfugiés » de Tindouf pour augmenter le nombre de participants. Toute honte bue, ils affirment que dans la Wilaya de Tindouf, la participation a atteint 79 %. Les militaires ne sont pas connus pour leur tact.
Revenons à l’Egypte et son à scénario. Abdelfettah Sissi président, aura besoin d’un parti. Parce que pour respecter les formes, il lui faudra une majorité parlementaire, et tenir les instances locales. Il ne peut pas utiliser l’armée, gouverner, légiférer au nom de l’armée, qui pourtant détient tous les pouvoirs.
Alors, je vous le délivre en avant-première, le scénario est bouclé. Sabbahi sera battu, mais de manière digne. Il aura plus de 10 % de suffrages. Il reconnaîtra sa défaite et ralliera le nouvel homme fort. Celui-ci, magnanime, au nom de l’unité, le nommera Premier ministre et le chargera de former un nouveau gouvernement qui aura autant de pouvoirs qu’un Lion’s club. Ensuite, le même Sabbahi créera un nouveau parti présidentiel, qui ressemblera de manière étonnante au parti national de Moubarak, qui bien sûr remportera toutes les élections.
Youssef Chahine peut se retourner dans sa tombe, ils n’ont aucune créativité. En Algérie, 14 soldats ont été assassinés au lendemain du film Bouteflika. Les choses ne sont peut-être pas liées, mais les scénarios prévisibles font rarement de bons films.
Ce sont les peuples qui payent à la place des producteurs et c’est cela le plus malheureux. L’Egypte a acheté son ticket pour l’enfer. Celui de la violence et de l’instabilité.