Le Trône et le Sport
« Sa Majesté le Roi du Maroc, premier sportif du pays », ce n’est là ni une formule de flatterie courtisane ou une allégeance au Souverain par des pratiquants et dirigeants lorsque survient la performance. On en connaît, quelques uns qui, sous d’autres latitudes ricanent et se gaussent quand un de nos champions dédie sa victoire ou sa qualification au Roi du Maroc. Sauf que dans le cas de notre Royaume, il n’est pas un sportif qui ne ressent de la fierté, de la motivation, lorsque le Souverain l’encourage. On ne le répétera jamais assez, et tant pis pour ceux qui n’y croiraient pas, l’osmose entre le peuple et le Trône est bien réelle, elle est parfaite même, si tant est que la perfection existe sur Terre, et chaque Marocaine et Marocain ne peut décrire le sentiment de fierté qui l’habite, lorsque le Roi lui adresse encouragements et félicitations.
En sport, nos champions sont en mission, en service, au service de Sa Majesté. Et rien n’est plus gratifiant pour une délégation que lorsqu’elle se sait observée et scrutée dans ses rendez-vous avec la gloire.
Demandez aux Zaki, Bouderballa, Aouita, Zahraoui, Dolmy, Naybet, Boutayeb, Mehdi Bennani, Hasna Benhassi, R’hilou et tant d’autres, parce qu’on ne peut pas les citer tous, tous les autres, quel est le meilleur souvenir de leur carrière. Ils vous répondront, le jour où Sa Majesté le Roi a reçu, téléphoné, accueilli, ou même écouté.
En 1976, retour d’Ethiopie et de « la » Coupe d’Afrique des nations, le Prince héritier Sidi Mohammed, futur Roi du Maroc, accompagné de S.A.R le Prince Moulay Rachid était à l’aéroport de Nouaceur à Casablanca, pour accueillir des footballeurs entrés, à ce jour, dans l’Histoire comme les seuls à avoir gagné une Coupe d’Afrique des Nations. A ce souvenir les yeux des Acila, Cherif, Moujahid, Semmat, Glaoua ou encore Guezzar et Bouali, s’embuent, et les récits de ce jour et de toute cette épopée sont devenus légendaires. Il n’est pas une manifestation d’envergure ou de performance qui ne porte la marque du sceau Royal.
Et pas qu’en foot ou en athlétisme, car la Famille Royale s’est impliquée partout, pour la plus grande gloire du pays. Que seraient les sports équestres au Maroc sans la passion et la ténacité de la regrettée Lalla Amina qui consacra sa vie à la noble cause du cheval. Le golf aurait-il atteint les cimes de l’European Tour sans l’implication et la volonté de SAR Moulay Rachid. Mais nous n’allons pas ici faire une sorte d’inventaire à la Prévert de tout ce que doit le sport du pays au souverain et à la famille Royale, nous n’allons pas le faire parce qu’ici, à l’occasion de ce numéro spécial de « Challenge », on évoquera ce que le sport peut devenir dans les années à venir.
Il y a comme un frémissement dans le ciel du sport national, un frémissement annonciateur de gros changements qui risquent de bouleverser la vie de tous les partenaires du sport.
Car comme disait Clémenceau à propos de la guerre « qui est une chose trop sérieuse pour être confiée à des militaires », le sport est certainement une activité trop majeure pour le développement de la Nation, pour être laissé aux seuls sportifs. Des sportifs qui, au Maroc, ont un leitmotiv, ils réclament des moyens, toujours de plus en plus de subventions, de plus en plus de moyens financiers, en un mot de l’argent. Or, depuis l’avènement de SM Mohammed VI, l’aide matérielle au sport a connu une augmentation conséquente, souvent même colossale, sans que, mille fois hélas, les résultats sur le terrain ne s’en ressentent.
En 2008, lors des Assises nationales du sport, à Bouznika, il y eut dans ce premier coup de semonce, la désormais célèbre lettre Royale où étaient dénoncés, soulignés, tous les errements dans la gestion de la chose sportive.
9 ans se sont écoulés depuis, et aujourd’hui le Souverain est passé à la vitesse supérieure.
La lettre adressée au récent Symposium de la CAF à Skhirat (voir notre édition précédente de Challenge, n°612), est venue rappeler que les constats émis par le Roi Mohammed VI, lors des Assises de 2008 à Bouznika, ne devaient pas rester lettre morte, car plus que jamais le sport joue un rôle essentiel dans l’épanouissement de la société. Et le Roi souligne cela dans cette phrase révélatrice : « Le développement de la pratique sportive, toutes branches confondues, et du football en particulier, est l’un des préalables essentiels pour renforcer les compétences des jeunes, assurer leur insertion dans leur environnement socio-économique et accroître leur immunité contre toute forme de déviance et d’extrémisme. Le but ultime est de les dissuader de risquer leur vie et de compromettre leur avenir en empruntant le chemin de l’émigration illégale ».
Et pour tous ceux qui n’auraient pas compris que les choses ont changé, car comme toute chose, le sport évolue, et qu’il est inconcevable de rester en dehors de cette évolution, le Roi du Maroc a rappelé dans cette lettre adressée au symposium de la CAF : « (on se doit) aujourd’hui plus que jamais, de relever les défis de rénovation et de modernisation qui se posent et à se mettre au diapason des évolutions accélérées du sport mondial »
Fini la gestion en petit père tranquille où celui qui est chargé de gérer l’argent mis à sa disposition par l’État, agit comme il l’entend, sans respecter les contrats d’objectifs, ni même de se donner la peine de présenter un bilan clair et précis justifiant ces dépenses.
Autant de dérives qui n’ont que trop duré et le Souverain de rappeler la nécessité d’une « bonne gouvernance ».
Et, nous laisse-t-on à croire, ceux qui n’auraient pas encore compris ce message en cet an de grâce 2017, s’exposent à de graves problèmes.
Déjà des audits sont en cours pour les fédérations qui ont dépassé les bornes, des fédérations qui reçoivent des centaines de millions et qui déclarent forfait quand il s’agit de participer. Vu les moyens matériels mis à la disposition de tous, les excuses traditionnelles ne sont plus permises et les sanctions, pénales, sont promises. Quelques présidents d’associations (fédérations et clubs) risquent d’avoir bientôt les surprises qu’ils méritent.
La gabegie et l’impunité ont fait leur temps. La jeunesse marocaine est trop importante et son avenir est une préoccupation majeure dans l’esprit du Roi, pour que les choses demeurent en l’état.
C’est là le frémissement que l’on percevait dans le ciel du sport marocain et dont on vous parlait plus haut.
La récréation est terminée.
L’État encourage tous les sports. À travers le Royaume, tout le monde s’adonne à sa discipline de prédilection. Le surf, le badminton, le jet ski, la gymnastique, la natation, et tutti quanti. La jeunesse marocaine est demandeuse, peu exigeante si ce n’est du respect qu’elle est en droit d’attendre de ceux qui sont censés la former, l’encadrer, et lui assurer un développement humain, matériel et moral. C’est pour cela que les manquements à l’éthique et à la plus simple honnêteté ne doivent plus être tolérés, et ne le seront plus.
La survie même de notre sport et de nos sportives et sportifs en dépend.
Qui peut admettre que notre sport qui peut être florissant pour peu qu’il soit bien gouverné, bien géré et professionnellement dirigé, puisse tomber dans les abysses ?
Le sport est trop noble pour subir un si funeste sort.
Et le Premier de tous les sportifs ne saurait le tolérer.
Qu’on se le dise.
Ce sera la leçon, pour ne pas dire l’avertissement, le dernier, en ce mois de juillet 2017 où la Fête du Trône consacre l’osmose entre le peuple et son Roi.
Une osmose qui oblige les uns et les autres à être dignes de nos plus nobles ambitions.