Le virus de la fragmentation sociale
Chaque pays a réagi en fonction de son identité de son système politique. Si globalement la démarche qui a consisté à privilégier le sanitaire par le confinement, puis à desserrer l’étau a été celle des pays où la valeur solidarité existe. Ailleurs, c’est la bérézina.
Ceux qui ont instauré la responsabilité individuelle en totem sont des sociétés fracturées, malgré la tragédie des morts et des cadavres sans sépulture. Au Brésil, les chiffres très contestés font état de 15.000 morts. Et pourtant, le président a organisé une manifestation, à visage découvert, pour critiquer les 26 gouverneurs qui ont choisi de confiner pour tenter de stopper le virus.
Quels sont les soutiens au sein de la société ? Ce ne sont ni les bourgeois capitalistes « avides » ou prétendument tels, ni des intellectuels épris de liberté, ni des ouvriers craignant pour leur emploi. Non c’est le lumpenprolétariat*, les vendeurs ambulants en tête. Pourtant, la ville de Rio leur offre une aide, certes insuffisante, mais qui couvre les besoins vitaux. Ils ne réclament pas plus de solidarité, dont ils pourraient bénéficier, ils revendiquent le droit de revenir à la rue. Au-delà du jeu politique brésilien, cela met à nu une vraie fracture. Il réclame un coup d’Etat pour rétablir l’ordre qui lui convient celui du chacun pour soi et la mort pour tous.
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En Europe une fracture d’un autre genre s’impose. Elle est entre ceux qui pensent que tout reviendra comme avant et ceux qui croient à une nouvelle société. L’institut Montaigne, think tank libéral veut faire travailler plus, les autres réclament un nouveau modèle. Ce débat cache en fait le vrai, celui qui définit le vivre-ensemble et la relation entre l’individu et la société.
Au Maroc, les niveaux de solidarité agissante atteints lors de cette crise imposeront le débat. 17 Millions de marocains sont officiellement en situation précaire. C’est une donnée qui s’imposera au débat politique et aux futures politiques publiques. Le soutien direct sera une revendication très populaire. L’Eté sera chaud, très chaud, partout dans le monde.
*NDLR : Le lumpenprolétariat est un terme marxiste, parfois traduit « sous-prolétariat », désignant les « éléments déclassés, voyous, mendiants, voleurs, etc. » du prolétariat