Maroc. L’école, un enjeu vital
« Un enfant qu’on enseigne c’est un homme qu’on gagne ». (Victor Hugo) . Nous avons depuis des décennies un débat sur l’école. Il pose des questions sur les moyens insuffisants, les programmes, la formation des enseignants et depuis quarante ans on tourne en rond. Le débat n’aboutit pas, parce qu’on ne fait pas le bon diagnostic, faute d’avoir posé le vrai problème.
J’avais posé à feu Méziane Belefkih la question de savoir quel est le sens de la phrase « former de bons citoyens » dans le rapport de la Commission spéciale éducation-formation (COSEF) dans une discussion en privé. Cet homme viscéralement attaché à l’école publique m’a répondu : « Nous sommes piégés par la recherche du consensus ». L’idéologisation de l’école est le vrai drame de ce pays. L’école n’est pas là pour formater idéologiquement les enfants, mais pour en faire des citoyens, capables d’avoir un esprit critique et de choisir par eux-mêmes. Le seul « bon citoyen » que l’école est chargée de former, c’est celui qui peut argumenter, accepter les avis contraires, même dans le cadre de débats vifs, mais respectueux des droits de l’autre.
Lire aussi | Nouveau modèle de développement au Maroc : pour la création d’un exécutif économique
Pour cela, l’école a une arme formidable : la transmission du savoir, des lumières. Il faut que les cursus permettent de prendre connaissance des théories philosophiques, scientifiques, des controverses historiques, y compris à l’intérieur de la pensée islamique, mais sans intervention idéologique de l’enseignant. Plaider pour interdire l’enseignement de Darwin est un obscurantisme. L’enseigner en précisant qu’elle ne fait pas consensus scientifique est du rôle de l’école.
Lire aussi | Bientôt une Université privée à Oujda
Cette idéologisation de l’école a commencé avec l’arabisation. On en a fait un enjeu identitaire, donc purement idéologique. Le résultat c’est qu’un enseignant des sciences cite un verset du Coran pour introduire un cours sur l’eau, sous couvert du miracle scientifique du Coran. La connaissance précise passe au second rang. Si on ne répond pas à ce défi, tout l’argent du monde n’arrêtera pas l’hémorragie.