Les chiffres de l’ACAPS sont inquiétants
Exception faite du régime de la CIMR, tous les autres régimes ne sont pas rassurants. Les chiffres du régulateur du secteur des assurances et de la prévoyance sociale, laissent conclure que leur viabilité est en péril. C’est ce qui plaide pour une réforme profonde de l’ensemble des régimes en vue de préserver les intérêts des futurs retraités.
Selon le dernier rapport de l’Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale (ACAPS), les actifs qui cotisent aux régimes de retraite de base (voir encadré) ont atteint au 31 décembre 2018, un effectif de 4,6 millions, en évolution de 2,2% par rapport à 2017. Le taux de couverture retraite ressort ainsi à 42,3% de la population active occupée contre 41,8 une année auparavant, soit une augmentation de 4,2 points sur les cinq dernières années. Quant au nombre de bénéficiaires de ces régimes, il s’est établi à la même date à 1,4 million d’individus dont 73,1% de retraités principaux et 26,9% de bénéficiaires de pensions de réversion (conjoints et orphelins).
Le rapport démographique diffère très sensiblement d’un régime à l’autre, fait ressortir le rapport de l’ACAPS. Celui de la CMR (régime de pension civile) a connu une forte baisse sous l’effet cumulé de l’augmentation des départs à la retraite sur la période 2014- 2018 et de la baisse de l’effectif des cotisants. Il est ainsi passé de 3,3 actifs pour un retraité à 2,3 actifs seulement. Celui du RCAR a connu, quant à lui, une augmentation en 2017 et 2018 à la suite de l’affiliation à ce régime des professeurs des Académies régionales d’Education et de Formation. Son rapport démographique reste toutefois relativement faible (1,9). Quant à la CNSS, elle enregistre le rapport démocraphique le plus élevé de 8,8 actifs pour un retraité.
Concernant leur situation financière, le rapport de l’ACAPS fait ressortir que les régimes de retraite ont collecté en 2018, un montant de cotisations de 54,9 milliards de dirhams en évolution de 8% par rapport à l’année 2017. De leur côté, les prestations servies aux retraités se sont établies à 54,7 milliards de dirhams, soit une hausse de 6,2 par rapport à 2017. Reste que durant les cinq dernières années, les prestations servies ont enregistré une augmentation plus rapide que celle des cotisations (8,6% contre 6,8%).
A fin 2018, la CNSS a pu réaliser sur les cinq dernières années, grâce à la démographie favorable du secteur privé, des excédents techniques d’un montant de 6,5 milliards de dirhams. En ce qui concerne la CMR (régime civil), le solde technique a continué à se dégrader depuis l’enregistrement du premier déficit en 2014, mais avec une cadence moins élevée depuis l’entrée en vigueur de sa réforme paramétrique en 2017, pour s’établir à – 6 milliards de DH. Pour ce qui est du solde technique du RCAR qui est négatif depuis 2004, il s’est légèrement amélioré en 2018 pour atteindre – 2,5 milliards de DH contre – 2,8 milliards en 2017.
Dans le même cadre, les placements des caisses de retraite ont atteint 308,8 milliards de DH, en augmentation de 4,7% par rapport à l’exercice précédent. Leur structure se caractérise par une prédominance des placements en obligations avec 70,5% contre 27,2 pour les placements en actions.
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Les choses ne vont pas s’arranger dans les années à venir comme le démontrent les évaluations actuarielles réalisées par l’ACAPS sur un horizon de projection de 60 ans (2078) sur la base des données de l’année 2018 et des hypothèses de projection déduites des évolutions démographiques, économiques et financières des différents régimes de retraite. Selon les résultats de ces évaluations, le rapport démographique des régimes de retraite de base continuerait à se dégrader. Il s’établirait en 2078 à : 2,7 pour la CNSS (contre 8,8 en 2018), à 1,9 pour la CMR (contre 2,3 en 2018), à 1,3 pour le RCAR (contre 1,9 en 2018) et à 1,5 pour la CIMR (contre 2,8 en 2018).
L’évolution de la situation financière des différents régimes de retraite n’aurait pas tendance à s’améliorer. Concernant le régime CMR, le poids de ses engagements continuerait à peser sur sa viabilité et ce, malgré la réforme paramétrique de 2016. Son déficit technique atteindrait 33,9 milliards de dirhams en 2049 avant de se redresser sur le reste de la période pour se fixer à 0,7 milliard en 2078. De son côté, la CNSS enregistrerait son premier déficit global en 2024, alors que ses réserves s’épuiseraient en 2040.
Quant au RCAR, les évaluations de l’ACAPS concluent que son solde technique, déficitaire depuis de nombreuses années, cesserait d’être compensé par les résultats financiers à l’horizon de 2025, date à partir de laquelle le déficit global serait financé par les réserves du régime jusqu’en 2045.
Pour ce qui est de la CIMR, les projections de l’ACAPS font ressortir que son avenir n’est pas aussi inquiétant que celui des autres régimes. Son régime continuerait à enregistrer des soldes globaux excédentaires et à accumuler des réserves sur toute la période de projection. Il devrait toutefois enregistrer un solde technique déficitaire vers la fin de la période de projection (2078).