Les femmes entrepreneurs s’invitent au débat
Capital Immatériel. A la veille des premiers résultats du rapport de la Banque mondiale sur le capital immatériel au printemps de l’année en cours, l’AFEM, a organisé dans le cadre de son cycle mensuel de rencontres, une conférence débat sous le thème «Capital immatériel, société ouverte et participation des femmes: les nouvelles voies du développement?» par Ghizlaine badri
Le capital immatériel est au coeur de la politique de développement du Royaume. L’étude commanditée par le Souverain sur l’évaluation du capital immatériel du pays réalisée par le CESE et la Banque mondiale, devrait donner son verdict les mois prochains, mesurer ainsi la valeur globale du pays et des entreprises et tracer les grands axes d’amélioration des politiques de développement. Le Maroc est à l’apogée d’un bouleversement positif qui passe essentiellement par des réformes institutionnelles pour valoriser des actifs sous-exploités, une revalorisation qui passe essentiellement par la promotion d’une croissance concurrentielle et inclusive, notamment pour les femmes, par l’élaboration d’une politique de développement durable et par le renforcement de la gouvernance et des institutions.
Lors de cette rencontre, les intervenants ont souligné l’importance de l’égalité des genres, et l’urgence d’instaurer des mesures concrètes pour que les femmes puissent participer activement à la croissance et au développement des richesses du pays «Le Capital immatériel est calculé comme la différence entre la richesse totale et la somme du capital naturel, le capital fixe et les actifs financiers nets, il comprend implicitement le capital humain, le capital institutionnel et le capital social» a précisé M. Jean-Pierre Chauffour, économiste principal pour le Maroc et coordonnateur des échanges régionaux pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) de la Banque mondiale. «Et de rajouter : la consommation future est contrainte par la richesse actuelle, sans aucun revenu nouveau, un pays ou un ménage est contraint de consommer ses actifs. Le Maroc investit 35% de son PIB en actifs matériels, ce même niveau d’investissement a des rendements plus élevés en Asie par exemple, un écart qui tient essentiellement à l’impact du capital immatériel». En somme, la prise en compte du capital humain avec 50% de femmes au Maroc, l’équivalent de 16,24 millions d’habitants (Selon les statistiques du HCP-2012) est fondamentale. Sur ce point, et selon les estimations de la Banque mondiale, dans la région MENA la moyenne régionale de l’entreprenariat féminin est de 13% avec seulement 10% des entreprises détenues par des femmes au Maroc, alors que l’Egypte et le Liban sont respectivement à 20% et 30% de femmes chefs d’entreprises. Des chiffres qui montrent les disparités de l’approche genre dans le capital immatériel qui reposent sur deux facteurs, la liberté de choix des femmes (liberté d’expression, d’action) et les conséquences économiques de l’absence d’égalité homme-femme dans l’expression de leur libre-choix ou libre-arbitre. Des inégalités qui reposent sur l’absence de normes juridiques et administratives, malgré les avancées en la matière à travers notamment la Moudawana, il reste encore beaucoup à faire, concernant le droit de la famille (inégalités d’accès au divorce, inégalités dans les droits de succession, inégalités devant les tribunaux, inégalités des charges administratives, inégalités devant la transmission de la citoyenneté) et du droit du travail (interdiction de certaines professions aux femmes). En plus de ces contrastes, l’absence de lois de protection des femmes concernant les violences exercées contre elles, pèsent sur la balance des inégalités (62% des femmes déclarent un certain type de violence domestique, 15% font face à une violence physique), on note également, l’absence de législation spécifique couvrant la violence domestique et l’exigence du consentement judiciaire qui ne limite pas les mariages de mineurs (92% des demandes de mariage de mineurs ont été approuvées par les juges en 2010). En conclusion, les intervenants de cette rencontre-débat ont dressé le bilan des actions majeures à mettre en exergue pour l’égalité des genres, à savoir, le renforcement de l’égalité homme-femme comme capital immatériel, l’amélioration de l’éducation des filles en développant la gouvernance de l’enseignement et la qualité des programmes, le soutien de l’égalité de jure et de facto devant la loi, la promotion du secteur privé en permettant par exemple aux femmes de sortir d’une agriculture peu productive, pour des métiers plus rémunérateurs, une mise à niveau qui passe également par l’accès aux crédits en faveur des femmes chefs d’entreprises, et l’amélioration du contrôle qu’exercent les femmes sur leurs ressources économiques, ainsi que la promotion des normes culturelles qui promeuvent l’autonomie des femmes comme vecteur de développement économique et social.