Les métiers de l’assurance, le besoin de nouvelles compétences
Les bouleversements techniques et réglementaires qu’ont connus ces dernières années et que connait encore le paysage de l’assurance marocaine- concurrence exacerbée, fusions-acquisitions, innovations technologiques, nouvelles niches pour une meilleure pénétration de l’assurance, apparition de nouveaux acteurs de la distribution- n’ont pas été sans conséquence sur l’organisation des entreprises et des intermédiaires et ont eu un effet direct sur les contenus des emplois et les nouveaux métiers de l’assurance. Comment et dans quelles filières donc, les assureurs doivent se positionner et innover en formation ? par A.alami
Une opération d’assurance consiste en une promesse à échéance : d’un côté, l’assureur s’engage, dans le cadre d’un contrat d’assurance, vis-à-vis d’un assuré à lui garantir le versement d’une somme d’argent, à titre d’indemnité, de rente ou de capital, en cas de survenance d’un élément aléatoire avant ou à l’échéance du contrat.
Les métiers de l’assureur doivent intégrer une série de process pour permettre d’atteindre les objectifs définis aussi bien dans cette relation contractuelle que par rapport à l’environnement réglementaire qui régit la profession. Ces process se déclinent en plusieurs actions consistant en :
La conception d’une offre adaptée aux attentes des assurés et notamment à la diversité des périls qui les menacent, la pluralité des assurés (particuliers et entreprises) et l’évolution de ces périls créant un champ d’innovation immense ;
La commercialisation de ces offres par des méthodes de distribution adaptées ;
La réalisation de la vente de ces offres, se traduisant par l’échange des consentements et le paiement de la prime ;
La gestion de ce portefeuille de contrats ;
La gestion des évènements (sinistres), donc la fourniture des prestations auxquelles l’assureur s’est engagé ;
La gestion financière des fonds nécessaires à son activité ;
Et l’adaptation aux évolutions règlementaires.
Une demande accrue de spécialistes chez les entreprises d’assurances
Alors que le développement de nouveaux métiers se traduit par une demande soutenue de spécialistes d’assurances, compte tenu de la technicité croissante des contrats proposés et de la tendance, sinon de la nécessité actuelle des entreprises à se recentrer sur leur métier d’assureur, la future réglementation qui verra le jour avec les prochains amendements au code des assurances viendra renforcer les process sus-indiqués pour adapter les formations à l’évolution permanente de l’environnement, voire même l’anticiper car la réactivité dans un cadre innovant doit rester une préoccupation permanente de l’assurance.
Développer le métier de la conception des produits et de calcul des risques
Les nouvelles contraintes techniques des assureurs associées aux exigences croissantes de l’assuré consommateur, viennent directement impacter leurs métiers dont principalement le marketing et l’actuariat. Si la segmentation du portefeuille clients à partir de l’exploitation des bases de données disponibles, ainsi que les statistiques correspondantes ont émergé de nouvelles approches de marketing en assurance, le métier d’actuaire, principal concepteur des produits d’assurances, se trouve aujourd’hui au centre des débats et d’un vaste mouvement de réorganisation interne des entreprises d’assurances. Avec les futures règles prudentielles dont celles-ci seront soumises (Solvabilité II), le rôle de l’actuaire prend une nouvelle dimension quand il s’agit de calculer le coût global d’un produit et de l’événement qui pourrait en découler sur la base d’une évaluation prédictive et dans la finalité d’une prestation de service réparatrice.
Mieux, au niveau des orientations relatives au système de gouvernance au sein d’une entreprise d’assurance imposées par les normes de la Solvabilité II , le métier d’actuaire revêt une importance stratégique puisqu’il constitue l’ossature de l’environnement de contrôle interne de la compagnie. L’actuaire se trouve, en effet investi de graves responsabilités allant jusqu’à la certification de la fiabilité de calcul des provisions techniques de l’entreprise d’assurances vis-à-vis de l’Autorité de contrôle. Les tâches de la fonction actuarielle dépassent cet aspect et celle-ci se voie imposée, de par la réglementation, d’émettre des avis sur la politique de souscription, sur les contrats de réassurance et les liens entre ceux-ci et les provisions techniques.
Dans ce sens, les métiers du marketing et de l’actuariat évoluent d’une manière conjointe et complémentaire.
– Les métiers de la gestion des contrats et des prestations, enjeu clé du secteur
La gestion des produits d’assurance offerts à la clientèle et des prestations qui leur sont fournies en cas de réalisation des sinistres, constitue le cœur du métier de l’assureur. Les prérequis des savoirs techniques et juridiques sont incontournables pour tout nouveau recru dans ce marché ; à cela, s’ajoutent les dimensions commerciales de la formation. Plus techniques et complexes, ces métiers doivent aussi s’inscrire dans des modes de fonctionnement qui, à la faveur des techniques informatiques déployées, reposent sur un travail d’équipe et un processus de formation continu. Celle-ci est nécessaire à toutes les étapes d’une opération d’assurance, qu’il s’agisse de connaître un risque pour en évaluer les contours et la valeur ( dont le tarif et les franchises à appliquer), pour en suivre l’évolution tout au long de la vie du contrat, et bien évidemment lors de la mise en œuvre des garanties souscrites, c’est-à-dire au moment de la réalisation de l’événement ouvrant droit à indemnisation. La particularité de l’assurance, celle de l’inversion du cycle de production correspondant au décalage entre le moment du paiement de la prime et la mise en jeu des garanties prévues dans les contrats, fait du règlement du sinistre un « moment de vérité » dans la relation assureur/assuré.
De ce fait, les fonctions de souscription des contrats d’assurances et d’indemnisation prennent une importance commerciale qui vient, par le jeu de la qualité du produit et du service après vente, combler une partie du déficit d’image dont sont taxés parfois les assureurs.
Défis de la distribution : des stratégies de formation en pleine mutation
La relation classique entre intermédiaire d’assurance et son client s’est complètement métamorphosée ces dernières décennies : les canaux de connexion avec le consommateur sont en train d’être repensés non seulement sous forme de points de conseil et de vente, mais aussi en termes de dispositifs modernes recentrés sur le client avec, comme stratégie, la collecte et la fiabilisation des données des assurés et leur exploitation avec, pour objectifs, la concrétisation de la vente de produits d’assurances adaptés . Mais, plus que l’optimisation de la distribution, l’instauration d’une « culture client » au sein du cabinet fait figure de pilier de la réussite, car le consommateur est aujourd’hui très attaché à la qualité de la relation client ou « consumer relationship management ». Reste à savoir comment enclencher et pérenniser cette relation ?
La souscription en ligne au Maroc reste encore très marginale et le consommateur s’oriente dans la grande majorité vers un contrat humain avec son assureur-conseil pour souscrire son contrat d’assurance. Cela ne doit pas occulter une autre réalité : les nouveaux usages numériques sont en train de révolutionner la phase « d’avant-vente » en permettant à l’internaute facilement et de manière autonome, de comparer des prix et de se renseigner sur la réputation de l’agent ou du courtier, aussi bien en termes de qualité des garanties proposées que de services après-vente, des phases primordiales, à mettre à profit par la plupart des opérateurs pour développer des services de fidélisation, mais aussi, exploitées par des internautes pour partager leurs expériences.
Le phénomène marquant, celui de l’utilisation exponentielle du web comme canal d’entrée en relation de recherche d’information et de simulation dans une logique multicanale, doit permettre au réseau traditionnel de venir en relais, compte tenu du souhait d’un grand nombre d’assurés de bénéficier d’un échange physique avec un conseiller ou un agent, d’où l’intérêt de formations visant à ajuster les compétences des collaborateurs pour répondre à cette nouvelle génération de consommateurs.