Les multiples facettes du coronavirus
C’est une menace à prendre au sérieux. Coronavirus a défié les frontières géographiques et sociales. Mais ce « nouveau » virus devrait être examiné sous plusieurs angles.
Le principal danger du « Covid-19 » réside dans sa capacité exponentielle de contamination. Il n’est pas aussi mortel que d’autres maladies infectieuses, mais il se propage vite, très vite. Et il met à nu des systèmes de santé incapables de prendre en charge simultanément un grand nombre de personnes contaminées et donc de réagir efficacement face à une situation exceptionnelle où la demande de soins est massive.
Au cours des dernières décennies, les systèmes de santé ont, en général, été prisonniers de deux logiques complices et complémentaires : la privatisation des services de santé et la réduction des dépenses budgétaires des Etats, affectées au secteur public de la santé.
Coronavirus, « nouvelle version », va bousculer cette évolution. Il va surtout révéler le fait que les Etats ne mettent pas ou mettent insuffisamment l’être humain et la préservation de la nature au centre des politiques publiques. Les modèles de développement adoptées depuis plus d’un siècle, basés sur la course à la production et la consommation de l’énergie fossile, ont eu un effet principalement destructeur.
En effet, aujourd’hui, il a suffi à la Chine, devenue grande puissance industrielle, de baisser son activité pour provoquer en chaîne un séisme économique et financier mondial. Baisse des valeurs boursières, arrêt d’activités dans plusieurs secteurs, ruptures de stocks impactant les circuits de production (…). Mais, à côté de cet impact socio-économique négatif, au niveau mondial, un autre impact, cette fois-ci positif, sur l’environnement, mérite d’être souligné. Moins de pollution dans l’atmosphère. Une « petite pause environnementale » qui risque de ne pas durer longtemps. Moins d’activité de transports terrestres, maritimes et surtout aériens. Arrêt ou ralentissement des processus de fabrication industrielle, moins de consommation de produits pétroliers (…).
Autre aspect méritant d’être souligné : la perception dominante de la maladie. C’est presque un retour à un passé que l’on croyait révolu. Le malade est redevenu un « suspect ». Les êtres humains s’observent avec méfiance. En fait, la maladie est à nouveau source de sentiment de culpabilité, voire de malédiction, mais aussi de profit, les soins ayant été largement marchandisés.
Alors, voilà la dimension la plus profonde, révélée par le « nouveau » coronavirus : le processus de déshumanisation étroitement lié au processus de marchandisation des rapports humains. Et c’est cette dimension-là qui mérite d’être abordée dans les débats publics au cours de l’après coronavirus.
En effet, l’urgence actuelle de la lutte contre la propagation de ce virus et les actions sécuritaires exceptionnelles nécessaires ne doivent surtout pas occulter cette réalité ou étouffer la prise de conscience de l’échec des anciens et actuels modèles de développement, très souvent sources de destruction des écosystèmes et à l’origine des différentes formes d’aliénation, causes de notre aveuglement actuel. Espérons que coronavirus soit un déclencheur de cette prise de conscience globale menant vers une réconciliation entre les humains et entre ces derniers et la nature.