L’histoire selon Benkirane ( Par Jamal Berraoui )
Le Chef du gouvernement a prononcé un long discours devant le congrès de la jeunesse de son parti. Tous les observateurs ont maintenant le décodeur pour lire Benkirane. Il habille l’essentiel d’anecdotes, le tout paraît décousu mais les messages sont clairs. Le message cette fois était partisan « nous sommes sur la même ligne, soutenez-moi et nous y arriverons. Ne vous ai-je pas déjà menés à la victoire ».
Pour faire passer ce message, très personnel pour ne pas dire egocentrique, il plie l’histoire à son dessein. La période El Othmani est sèchement critiquée mais de manière subliminale. « En 2007, les électeurs ne nous ont donné que 4 sièges supplémentaires parce qu’ils estimaient que nous avons mal géré l’après 2003 ».
Sur cet épisode, personnalisant les événements, Benkirane a sa propre lecture. « Je suis Chef de gouvernement alors que ceux qui m’accusaient de responsabilité morale ont été broyés par l’histoire ». Il rappelle que c’est le Roi qui a refusé la dissolution du PJD. Sauf que les choses sont beaucoup plus compliquées. Seul Mohamed El Yazghi avait évoqué la dissolution. La responsabilité morale demeure parce que le discours du PJD et de sa presse avant le 16 mai et même après « courait » derrière les salafistes, Benkirane ne peut occulter qu’il a lui-même viré « Serrat » l’auteur d’un article traitant le Maroc de bordel.
Ensuite, il saute l’étape 2004. Le PJD, de manière intelligente peut-on dire rétrospectivement, s’est allié avec tous les partis, sans distinction en fonction des villes, dans une opération normalisation sans principes. Il ne parle pas de cette étape parce qu’il en a été partie prenante et qu’il l’a même dirigée.
Les contorsions vont plus loin quand il parle du PAM et de sa réaction face à ce parti. Il affirme que le PJD a gagné Agadir et qu’il l’a laissé à l’USFP. Contre vérité absolue, Kabbaj était largement premier, avec le plus fort tour au Maroc et n’avait besoin que de deux voix pour constituer sa majorité. Il oublie sciemment de dire qu’ils sont alliés au PAM à Marrakech et dans d’autres localités. Sur Casablanca, où le PJD gère avec Sajid depuis 10 ans, il affirme que les 6 premières années le bilan est excellent, mais qu’après l’entrée du PAM dans la majorité ça s’est gâté. Alors que les élus Islamistes sont toujours dans le bureau.
Il considère les élections de 2002 et 2007 comme sincères, après avoir crié pendant des années qu’on lui a volé des sièges. Il promet que son gouvernement réussira toutes les réformes dans les années à venir. Mais son auditoire n’était concerné que par l’Egypte. Il n’en a pas pipé mot. « Nos cœurs avec les frères musulmans et nos épées avec Sissi », telle semble être la politique du gouvernement du PJD. Combien de temps ce grand écart peut-il tenir ?