L’Information, le Numérique et le Cyberespace : nouvelles guerres révolutionnaires du XXIème siècle [Par Mehdi Hijaouy]
Plus d’un demi-siècle après la création d’Internet, le monde d’aujourd’hui s’enchevêtre dans de multiples batailles et à de nombreuses facettes, plus diffuses : guerre de l’information, guerre du numérique et cyberguerre. Un conflit mondial hybride, multiprotéiforme et pluridimensionnel, déboussole la majorité des Etats qui n’arrivent plus à mettre en place une stratégie cohérente et percutante, pour une protection optimale de leurs souverainetés.
Intelligence Artificielle, Big Data, Biotechnologies, Robotique, Crypto-monnaies, autant de technologies et d’industries de pointe qui transforment, voire révolutionnent, de bout en bout, les cinq continents.
Propagation de la Cybermenace et Conflictualité Numérique
Cybercriminalité, Manipulation des réseaux sociaux, Divulgation massive de données sensibles sur Internet, Développement de logiciels de rançons pour ne citer que quelques actes de sabotage et d’espionnage informatiques qui ne se compteraient pas, même par milliers et auxquels les Etats sont exposés, de manière constante.
Un vol de données, à la suite d’une ingérence informatique, ayant abouti à leur publication sur Internet, parfois alimentées en fausses informations, deviennent des opérations fréquemment utilisées aussi bien par des personnes physiques que par des Etats, dans le but de semer la confusion, discréditer un pays, une personnalité, un artiste, un sportif de haut niveau, une organisation, voire pour secouer tout un processus politique. Même les grandes puissances qui, pourtant, disposent d’une véritable cyber stratégie, ne se limitant pas aux systèmes d’information, mais s’étendant à l’ensemble de la sphère informationnelle, en pâtissent fermement. D’autant plus que la numérisation des systèmes de production et leur interconnexion grandissante, les confrontant aux risques cyber, permet, commodément, aux malfaiteurs numériques de dérober et d’escamoter des données, de façon massive, voire d’anéantir des systèmes névralgiques d’Etats.
Aujourd’hui, le bornage entre les pays, les communautés cybercriminelles, les groupements d’activistes, les entreprises ou encore les individus n’est plus évident, surtout que les technologies de pointe deviennent à la portée du commun du mortel et non plus aux seules mains d’Agences de renseignement. Le réseau des réseaux appartient désormais à toutes les personnes, physiques et morales, publiques et privées, lesquelles contribuent, chacune à sa manière, à cette nouvelle forme de conflit, qu’est la Guerre mondiale numérique, une vraie bataille, permanente et à très bas bruit. In fine, il s’agit d’une compétition stratégique, loin d’être symbolique, entre Etats, répartis en deux principaux blocs mondiaux, laquelle concurrence est destinée à déstabiliser le camp adverse, en priorité, pour détenir le monopole spatial, maritime et terrestre, et par ricochet s’imposer économiquement et commercialement.
Imbroglio entre différents types de guerres
Entre hacking, trolling et fake news, s’agit-il d’une guerre de l’Information, d’une guerre numérique ou d’une cyberguerre ou bien ce sont plusieurs guerres parallèles et intermittentes ? Ce chevauchement entre divers conflits touche à tous les domaines : économique, financier, politique, social, culturel, sportif et militaire et s’opère sur tous les fronts. Mais en vain, le dénominateur commun à toutes ces guerres, c’est la TECH où les Etats, en appuyant des géants mondiaux, de grands groupes d’influence, des éditeurs de logiciels et des hackers essaient, chacun selon son intelligence et sa puissance, de s’arracher les perles rares (talents) du numérique.
L’OSINT, une arme légale, adaptée à toutes les guerres
La collecte de l’information à partir de sources ouvertes (OSINT) sert, dans une large mesure, pour un Etat et par ricochet à son Service de Renseignement, à prévenir des actions de propagande et de désinformation ou encore à traquer sur le web les traces de projets terroristes, d’espionnage ou de crimes transnationaux, commandités à l’encontre de la communauté internationale et contre l’Humanité. Ce qui permet au Renseignement d’accroitre sa capacité d’anticipation, de détecter et de répondre correctement aux incidents de sécurité, impactant l’intégrité des systèmes d’information du pays. Aussi, toujours est-il que la phase de renseignement est essentielle pour la prospective d’une attaque cyber, à travers le recoupement d’informations hétérogènes, pour mieux appréhender risques et menaces numériques.
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L’Afrique et le cyberespace
La plupart des pays africains, engloutis dans des crises politiques internes, dans la refonte de leurs systèmes politiques, économiques et sociaux, ainsi que dans une crise pandémique de Covid-19, commencent, timidement, à se préparer pour faire face à ces différentes formes de guerres. Des affrontements qui se déroulent dans des espaces numériques, en perpétuelle construction, sur lesquels reposent, depuis le début du XXIe siècle, les relations internationales contemporaines, dont le Maroc tire, majestueusement, son épingle du jeu, grâce à la conduite clairvoyante et aux orientations sages de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le Glorifie. En effet, le Royaume a réussi à forger de fines et larges expertises en matière de cybersécurité (cyberdéfense et cyberattaques), dotant ses Services de Renseignement « de yeux de lynx » agiles, défensifs et offensifs, sur le net, 24H/24.
Rien qu’en 2021, le Maroc, selon un rapport officiel de la Direction Générale de la Sécurité des Systèmes d’Information, a avorté près de 400 cyberattaques visant des systèmes d’information d’administrations, d’organismes publics et d’infrastructures d’importance vitale. Ce qui démontre la robustesse du dispositif national de cybersécurité dans les domaines de la détection des intrusions, de la sécurité des échanges électroniques et de la cryptographie, caractérisée, notamment, par des activités de recherche académique, ayant abouti, entre autres, à la conception d’un appareil local de chiffrage pour la protection des échanges de données, via différents systèmes de communication.
Parallèlement, le Maroc, en tant que principal leader africain dans le numérique et le cyberespace, ne manque jamais à apporter et continuellement son expertise à ses pays amis. A cet égard, le Royaume accueillera les 25 et 26 novembre 2021 la 10e édition des Assises de la Transformation digitale en Afrique, un événement grandiose, organisé conjointement entre l’université Mohammed VI Polytechnique et la Commission Nationale de contrôle de la protection des Données à Caractère Personnel et dont le thème retenu en dit tout : « Déployer une infrastructure résiliente, souveraine et durable pour encourager l’innovation africaine ».
Bien que l’Union Africaine ait placé l’usage des technologies d’information et de communication et l’intégration des pays africains dans le cyberespace parmi ses Objectifs prioritaires de Développement Durable, un énorme travail, purement basique, reste à faire, surtout qu’entre janvier et août 2020, 28 millions de cyberattaques ont eu lieu en Afrique et que le coût de la cybercriminalité est estimé à 3,5 milliards d’euros, selon Jeune Afrique. Compte tenu que l’Afrique fait drastiquement face aux défis protéiformes du cyberespace, particulièrement dans son espace subsaharien, il serait fort impératif de :
– créer un Institut Africain de cyberdéfense, dont le siège serait dans l’une des provinces du Sud, pouvant servir comme espace de formation et d’échange d’expertises entre différents pays africains, amis du Royaume, en matière de Renseignement, d’OSINT et de Gestion de l’Information au niveau de la toile numérique.
– mettre en place une Stratégie de cyberdéfense africaine, conduite par le Royaume du Maroc, en vue de sauvegarder la souveraineté numérique et de développer une résilience numérique des pays de ce continent.
– instituer une cyberpolice africaine, en tant qu’Armée numérique hautement qualifiée pour défendre la souveraineté des Etats africains.
– mener une campagne de sensibilisation de ses populations aux pratiques récurrentes et abondantes des fakenews, véhiculées par la facilité d’accès aux Smartphones et aux réseaux sociaux.
Par Mehdi Hijaouy, expert en Securité, Sûreté, Renseignement et Intelligences économique et stratégique. Fondateur du Washington Strategic Intelligence Center, Mehdi Hijaouy est titulaire d’un Executive MBA en « Stratégie d’Influence, Négociation et Guerre Psychologique » – École de Guerre Économique (EGE), Paris et d’un Executive MBA en « Management des Risques, Sûreté Internationale et Cybersécurité » – EGE, Paris.