L’ogre arrive par ( Jamal Berraoui )
Il suffit d’écouter les radios, elles reflètent l’opinion publique marocaine et ses préoccupations. Le Ramadan et ses dépenses font l’essentiel des débats. Le gouvernement affirme que les marchés seront bien approvisionnés, c’est probablement vrai, mais à quel prix ? Selon les auditeurs, le prix du sésame a augmenté de 20 dh, celui des amandes de 15 dh. Ce sont des produits très utilisés par nos mères pour préparer les gâteaux.
Le Ramadan n’est pas un mois de consommation normale. C’est une question culturelle, on peut le regretter, ergoter là-dessus, mais la consommation des ménages au titre de l’alimentaire est démultipliée. Par ailleurs, ils consomment plus d’électricité parce qu’ils veillent tard.
Le minimum quand on gère un pays, c’est de prendre en considération ces aspects culturels. On le fait par le bas. Depuis une décennie, l’INDH, des Associations soutiennent les familles dans la précarité, par des dons en nature représentant le strict nécessaire. Mais, il n’y a aucune initiative pour maintenir les prix.
C’est un problème économique. Les familles des classes moyennes sortent du Ramadan avec le portefeuille à zéro, quand elles ne se sont pas endettées. Or, elles auront à affronter les congés, puis la rentrée scolaire. Je ne suis pas sûr que les chiffres corroborent ce que je dis, mais, j’ai l’impression que l’endettement des ménages va s’accentuer cet été.
Je ne plaide pas pour un changement de culture qui ne peut être que le résultat de transformations sociales. Mais, il est possible de peser sur les prix, en facilitant l’offre, voire en la gonflant par une action des autorités publiques. Les produits les plus utilisés sont communs à toute la population marocaine, répertoriés et les besoins facilement calculés. Il suffit qu’une autorité quelconque s’occupe de l’approvisionnement pour que la spéculation cesse.
Autre sujet d’inquiétude pour les familles, en dehors du pouvoir d’achat, c’est l’occupation des enfants. Nous sommes en pleines vacances estivales, que peut-on proposer aux 7-17 ans ? Rien. Les parents délaissent les plages pour des raisons de convictions religieuses, la famille vit au rythme du Ramadan, sommeil et réveil tardifs, et les enfants s’ennuient.
Il me paraît nécessaire de répondre à ce genre d’angoisses. Il ne suffit pas de prétendre, au nom de la modernité, changer les attitudes. Il faut prendre en charge les déphasages entre la culture enracinée et les exigences de la vie moderne, pour faciliter la vie aux citoyens. Le reste c’est de la parlotte, qui n’évite pas que le Ramadan, mois sacré, soit craint comme un ogre.