Maitre Bouchachi, «la torture est toujours pratiquée»
L’ancien président de la LADDH (Ligue algérienne des droits de l’homme), Maitre Bouchachi persiste et signe, il ne fait aucune concession au pouvoir sur la situation des droits de l’homme en Algérie : il invoque encore la pratique de la torture, en exigeant la réforme de la législation nationale.
«La torture ; comme moyen d’obtenir des informations et des aveux, existe toujours en Algérie. Elle est certes moins fréquente depuis l’abrogation de l’état d’urgence en 2011, mais elle fait toujours des victimes» dénonce-t-il. Pour cet ancien député qui a démissionné du Parlement, ce genre de dépassement est favorisé par l’absence de mécanisme de contrôle au niveau des services de police judiciaire, lors des arrestations des prévenus ou de suspects. Maitre Bouchachi soutient clairement que «la justice algérienne n’est pas indépendante et qu’il n’existe aucun mécanisme pour contrôler ce genre de dépassements ». Il rappelle à ce sujet sa dernière tentative pour l’élaboration d’une proposition de loi au niveau de l’APN (Assemblée nationale) dans le but d’amender le code pénal algérien. Cette proposition, selon le défenseur des droits de l’homme permettrait aux avocats d’assister leurs clients au moment de leur arrestation. Cette proposition de loi n’a jamais fait l’objet d’un débat et c’est
l’une des raisons qui a contraint Maitre Bouchachi à remettre son mandat de député. Il considérait cette assemblée comme illégitime et non représentative.
Plusieurs cas de tortures on été enregistrés et qui échappent la plupart du temps au contrôle du parquet général «la police judiciaire agit sans contrôle», affirme un
bâtonnier. Plusieurs associations et personnalités politiques appellent à une réforme du système judiciaire algérien pour mettre un terme à ces dérives.
Pour Maitre Bouchachi, « il faut mettre en place des lois et des législations qui donnent le droit aux accusés et aux prévenus de recevoir une visite familiale, d’entrer en contact avec leurs avocats et de ne pas faire de déclarations sans la présence de la défense». En ajoutant qu’il « faut une réelle volonté politique pour une véritable séparation des pouvoirs ».
Trois rapports ont été remis au comité contre la torture par les autorités algériennes, dans lesquels elles affirment le respect des dispositions de la convention internationale. Toutefois, ce comité reste sceptique, en plus, il y a un flou sur la définition de la torture,dans sa globalité ainsi que dans la législation nationale.
Les disparitions forcées enregistrées durant la décennie noire sont aussi considérées comme une forme de torture.
Elles ont eu de graves conséquences sur une bonne partie de la population algérienne, notamment les familles des
disparus, dont le nombre dépasse 18.000. Une chercheuse en psychologie à Constantine, indique « les enfants victimes d’enlèvement, ayant assisté directement à la scène de kidnapping de leurs parents développent des troubles psychologiques inquiétants. Ses effets peuvent apparaitre 15 ans plus tard. Les enfants manifestent beaucoup de troubles liés aux drames qu’ils ont vécus, qu’on qualifie de stress post-traumatique»… Selon toujours cette psychologue, les pouvoirs publics doivent prendre en charge ces victimes qui sont aujourd’hui âgées entre 20 et 24 ans.
On a toujours essayé d’occulter le problème de disparitions forcées, mais c’est une vraie bombe à retardement qui peut exploser à tout moment. La réconciliation nationale, prônée par Bouteflika a été un échec.
Sur le même volet des droits de l’homme, des ONG interpellent l’UE et exigent des mesures concrètes.
Quatre organisations ont saisi l’Union européenne sur la situation des droits de
l’homme en Algérie ; jugée «sombre»… Il
est demandé à l’Union européenne, principal partenaire de l’Algérie, d’agir dans les plus brefs délais pour mettre un terme à cette situation.. Human right, Amnesty international, la FIDH, le réseau euro- méditerranéen des droits de l’homme ont arrêté des objectifs qui doivent être pris en considération dans le cadre de la coopération entre l Algérie et l’U.E. «nous attirons l’attention de l’Union européenne sur la nécessité d’adopter des objectifs concrets dans le domaine des droits humains, assortis d’un calendrier de réformes devant être engagées à court terme par l’Algérie», Indique le communiqué commun de ces organisations.
Ces ONG rappellent que la coopération de l’Algérie avec les experts et mécanismes des Nations unies , ainsi que des ONG internationales reste insignifiante, voire inexistante. Tout ceci intervient au moment où le comité des droits de l’ONU vient de prononcer… La 19 ème condamnation de l’Algérie sur de nouveaux cas de disparition durant les années 90.
ALGER – Abdou Merouane