Portrait

Manager en Chine, promoteur du surf marocain

 

Camile Saideddine, fondateur de Moor’s Surfboards

Ne vous fiez pas à son âge. Du haut de sa trentaine, ce manager qui a fait toute sa carrière en Chine s’est enfin lancé à son compte pour créer la première marque de surf marocain. Moor’s Surfboards en est encore à ses débuts, mais compte concurrencer les géants dans un environnement hautement concurrentiel et très technique. Par Noréddine El Abbassi

I l est vrai que, souvent pour réussir, il faut suivre le chemin de ses passions. D’ailleurs, l’adage ne conseille-t-il pas: “trouvez un métier qui vous plaît et vous ne travaillerez plus un seul jour de votre vie”. Et c’est bien ce que Camile Saideddine a fait. Sa vie n’aura été qu’une longue quête à la recherche du chemin de ses envies, qui l’ont mené à ses passions de toujours.
Camile est né en 1981, à Casablanca. Deuxième d’une fratrie de trois enfants, il grandit dans la capitale économique, au moment où cette dernière justifiait son appellation. “J’étais ballotté entre deux mondes. Celui de la Mission française cadrée où je passais mes journées, et celui de la rue, au quartier du Maârif où je passais une bonne partie du reste de mon temps,” se remémore-t-il dans un rire, empreint de nostalgie. A cette époque-là, et de son propre aveu, il rappelle avoir été un garçon aventureux, sans conscience aucune du danger qu’il encourait, déboulant dans les rues de la ville, en patins à roulettes et en skateboard. On imagine le jeune homme athlétique et dynamique qu’il est maintenant, en enfant turbulent, qui adore les sports de glisse, avec un goût prononcé pour l’aventure. Prémonitoire cette appétence pour les sports de glisse, industrie en pleine croissance, et où il fera carrière 20 années plus tard en créant la première marque de surf Moor’s surfboards. C’est peut-être que le climat, autant que la proximité de la mer s’y prêtent, puisqu’il commence à pratiquer le surf à l’âge de 10 ans. “Pendant notre temps libre, nous partions en bande, et par nos propres moyens, depuis la ville jusqu’à la plage “Pepsi”. Là où justement, s’est implanté, le premier McDonald’s d’Aïn Diab. Les vacances, c’étaient la période des destinations plus lointaines, dans le Sud, dans la région d’Agadir, propices à la “chasse des vagues”. Cela nous  permettait en outre, de connaître l’arrière-pays en profondeur”, développe-t-il, toujours avec la spontanéité des gens qui vivent de leurs passions. A l’école, il optera pour la section STT, plus par attirance, que par “orientation”. “Plus jeune, j’ai souvent fait des stages, dans des entreprises de parents de mes amis. Je voulais mieux connaître le monde de l’industrie et de l’entreprise. Les visites de classe dans ces structures, ne me suffisaient pas”, développe-t-il. Une voie abstraite? Très peu pour lui. Il préfère toucher le concret du monde de l’entreprise et de la matière. En somme, tout ce qui peut le laisser appréhender, ce que sera la vraie vie et ressembler à un avenir probable.

La France pour les études, la Chine pour la carrière

Le bac en poche en 1999, Camile s’envole pour Toulouse, dans le Sud de la France. Dans la ville rose, il poursuit d’abord des études en Gestion Financière, l’objectif étant l’expertise comptable. Mais en milieu de parcours, il réalise qu’un tel métier n’est pas compatible avec son caractère: “un expert comptable passe sa vie dans les bureaux, alors que moi, je recherchais le contact avec les gens. Nouer des contrats, plutôt que de gérer leur rentabilité”. Il tranche donc et se réoriente dans le commerce international. Camile quitte alors Toulouse pour Clermont Ferrand en 2001 où il reste jusqu’en 2003 dans un IUP de Commerce international. Mais déjà, la Chine est sur toutes les lèvres, et il sent que l’avenir de l’industrie s’y trouve. Il s’envole donc pour Shanghai à la fin de son année universitaire pour y compléter son master et puis enchaine à Guangzhou dans le centre du Pearl Delta River, pour terminer son cursus avec un MBA de la prestigieuse EM Lyon délocalisée dans le sud de la Chine. Il travaille dans l’industrie en semaine et étudie les week-ends. Entre l’industrie pharmaceutique et l’automobile, Camile développe le champ de ses compétences, entre des missions de certification ISO 9001, mise en place de système de gestion de management de la qualité et autre remise à niveau sociale et environnementale pour  le compte de groupes chinois et étrangers pour accompagner leur développement. “Normalement, on poursuit un cycle d’ingénieur avant de faire du management. Moi j’ai fait l’inverse. J’ai commencé par la gestion, mais par la force des choses, j’ai dû me mettre au point en industrie”, explique-t-il, dans l’un des nombreux éclats de rire, qui agrémenteront notre entretien. Ce que sa barbe de trois jours, taillée, lui donne des airs de jouisseur, qui croque la vie à pleines dents.

Débuts dans le monde des affaires

Les études terminées, il rejoint tout naturellement une entreprise de textile, basée à Hong-Kong. Il est d’abord en charge de la R&D à Shenzhen et rapidement, il est promu en tant que directeur de business development, avec pour objectif d’élargir le portefeuille qui comptera plusieurs clients dans le monde du luxe, du sport et de l’administration européenne. Entre LVMH, des administrations des postes et l’Armée de Terre et de l’Air française et suisse, il se forge un nom dans sa capacité à gérer des projets complexes pour le compte de clients exigeants dans un environnement chaotique et sophistiqué. Camile maîtrise alors différents corps de métier et surtout jongle entre des industries tout aussi différentes : injection plastique, travail du bois, du cuir, du métal, de matériaux composites nouvelle génération, afin de coller aux attentes pointues de ses clients. Il doit faire appliquer des normes de qualités très strictes, finaliser les projets en temps, en heure et au meilleur coût. Il a ainsi accompagné ses clients dans leur processus de création et développement de produits innovants, jusqu’à même intervenir sur les phases opérationnelles de terrain telles que la logistique, le marketing et la distribution.
Ce n’est qu’au bout de cette expérience qu’il prend un temps de réflexion. “J’ai fait un long périple entre la Californie, l’Australie, et Hawaï, qui m’a permis de mûrir l’idée. Un ami d’enfance m’encourage dans mon projet. Je lance donc la première marque de produits de surfs Marocaine. Nous avons commencé par quelques planches, après quoi,  nous avons développé toute une gamme d’accessoires techniques et petit à petit, nous introduisons des articles life style pour incarner la culture surf, mais avec un concept unique tout en offrant un plus par rapport aux autres marques. Tout notre packaging est réutilisable par exemple” précise-t-il. Il décroche même une opération de co-branding avec la marque de luxe chinoise Shanghai Tang du groupe Richemont. Sa jeune marque a déjà été nominée plusieurs fois aux Morocco Awards, il a également été invité à plusieurs évènements comme le GES et la Global Marketing Week. Aujourd’hui, il vit entre deux avions, pour suivre le développement de Moor’s à l’international, allant de Hawaï à Casablanca et Taghazout, en passant par Bali et Hong Kong. Chasser les vagues est l’un des petits avantages du métier…

Bio Express

1981 : naissance à Casablanca
1999: bac STT au Lycée Lyautey
2001: DUT en gestion financière
2003: Bachelor en international
             business Université Blaise
             Pascale Clermont Ferrand
2005: MBA EM Lyon Shanghai,              
             Canton (Chine)
             directeur R&D et business
             development en Chine
2011 : fondation de Moor’s
             Surfboards

 
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