Le Maroc, une valeur montante en Afrique
Le Royaume renforce son orientation vers la région subsaharienne qui apparaît comme l’environnement naturel pour la diversification de son économie. L’objectif étant de s’ériger au rang de hub régional pour le commerce et l’investissement, profitant de ses relations avec le Nord (Europe) et le Sud (Afrique), afin de assurer ainsi qu’aux pays subsahariens partenaires une meilleure intégration aux chaînes de valeurs régionales et mondiales.
Le Maroc se transforme et rapidement. En progressant dans la lisibilité de ses politiques publiques et en réformant son économie, en offrant aux entreprises plus de garanties et d’excellentes infrastructures, le pays a gagné la confiance des investisseurs. Avec l’implantation de projets d’envergure, notamment dans l’automobile et l’aéronautique, l’Office des changes a comptabilisé un flux d’investissements directs étrangers (IDE) entrant d’environ 4,05 milliards de dollars, en hausse de 6,7% par rapport à 2014. Des données que la CNUCED relativise dans son « Rapport mondial sur l’investissement 2016 » relevant que le Maroc a drainé quelque 3,2 milliards de dollars d’IDE. L’organisation onusienne pointe sur 2015 une baisse de 12,6% par rapport aux 3,561 milliards de dollars de 2014. Des données contradictoires qui s’expliqueraient par des différences de méthodologie, mais qui s’accordent sur la position du Maroc comme base industrielle et plateforme africaine pour les investisseurs étrangers.
Une puissance en devenir
Cette attractivité a permis au Maroc de devenir un élément incontournable du paysage économique africain. Le Royaume reste l’un des premiers investisseurs du continent, la 6ème économie en valeur nominale, la 11ème population et le 4ème budget militaire. Revenu en force sur la scène communautaire africaine après avoir réintégré l’Union Africaine, le Maroc se prépare à une nouvelle entrée. Il a demandé, fin février 2017, à devenir membre à part entière de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette organisation sous régionale ouest-africaine compte déjà 15 Etats dont le poids lourd africain, le Nigéria, et la locomotive de l’UEMOA, la Côte d’Ivoire. En intégrant le Maroc, la CEDEAO dépasserait la Turquie et s’approcherait de l’Indonésie en termes de PIB. Autant de privilèges qui lui permettent de renforcer son influence sur le continent africain. Le Maroc vise, en effet, à s’ériger au rang de hub régional pour le commerce et l’investissement profitant de ses relations avec le Nord (Europe) et le Sud (Afrique), afin de s’assurer ainsi qu’aux pays subsahariens partenaires une meilleure intégration aux chaînes de valeurs régionales et mondiales. Pour donner la pleine mesure à cette ambition, plusieurs entreprises marocaines publiques et privées se sont installées, ces dernières années, en Afrique subsaharienne couvrant un ensemble diversifié de secteurs. Le ton a d’abord été donné par l’implication des entreprises publiques marocaines (ONE, ONEP, AMCI…) dans des projets d’infrastructure de base tels la construction de routes et de barrages, l’électrification, la gestion des ressources en eau, l’irrigation, la santé et la formation.
Une expertise multisectorielle à faire valoir
Le dynamisme du secteur privé marocain est également mis à contribution pour l’essor du leadership africain. A titre d’illustration, l’implantation de filiales bancaires de la Banque Centrale Populaire, de BMCE Bank of Africa et d’Attijariwafa Bank dans une vingtaine de pays africains. La holding d’assurance Saham est également présente dans une vingtaine de pays du continent, depuis le rachat de l’opérateur nigérian Continental Reinsurance en 2015. Dans les télécommunications, Maroc Telecom a renforcé son emprise dans le continent avec le rachat de six filiales africaines de son actionnaire émirati Etisalat. En outre, plusieurs holdings comme Ynna Holding et la Société Nationale d’Investissement (SNI), à travers sa filiale minière Managem, interviennent en Afrique. L’énergéticien Nareva, également filiale de SNI, a décidé de développer, en tandem avec le français Engie, des projets d’envergure sur le continent. Les deux opérateurs ont ainsi signifié leur volonté d’associer leurs efforts pour des projets de production d’électricité et de services énergétiques, notamment en Égypte, Côte d’Ivoire, Sénégal, Ghana ou encore le Cameroun. Dans le secteur immobilier, Alliances Développement Immobilier a signé des accords de partenariat avec les gouvernements camerounais et ivoirien pour la construction de milliers de logements sociaux, Palmeraie Développement a lancé des projets de construction au Gabon, en Côte d’Ivoire et récemment au Rwanda. Au Soudan du Sud, la gestion déléguée du projet de construction de la nouvelle capitale, qui coûtera près de 10 milliards de dollars étalés sur une période de 20 ans, est confiée au Groupe Al Omrane. Le Groupe Addoha a également jeté son dévolu sur le continent via Addoha et Ciments de l’Afrique (CIMAF), motivé par les importants investissements en infrastructures. LafargeHolcim Maroc Afrique, filiale détenue à parts égales par le cimentier LafargeHolcim et le holding royal SNI, a également rejoint la dynamique. Le phosphatier OCP conforte sa stratégie africaine à l’image de celle adoptée par les autres secteurs marocains. Avec notamment le plus gros projet industriel conduit par une entreprise marocaine en dehors des frontières du Royaume, à savoir un complexe de fertilisants en Ethiopie de plus de 2,2 milliards d’euros, annoncé fin 2016. Il faudra citer aussi OCP Africa qui se veut le bras armé du groupe OCP pour conquérir le marché africain des engrais. La nouvelle structure a ouvert d’un coup des filiales dans quatorze pays subsahariens. Une autre entreprise marocaine entend s’arrimer aux spécificités de ce continent vers lequel le Maroc s’est résolument tourné. Il s’agit de Royal Air Maroc qui a lancé, en mars 2016 la liaison régulière Casablanca-Nairobi, sa 33ème destination africaine et la première en Afrique de l’Est. L’Afrique subsaharienne fait également partie des nouveaux marchés vers lesquels se tourne un autre organisme public marocain. Il s’agit de l’Office National Marocain du Tourisme (ONMT) qui vient de réaliser sa première percée sur le continent, avec l’inauguration de son premier siège en Afrique subsaharienne à Dakar, au Sénégal. Ou encore le mémorandum d’entente signé tout récemment entre l’ONMT et Zambia Tourism Agency, au Ghana. Un accord qui vise le renforcement des flux touristiques entre les deux pays, mais qui permettra aussi de renforcer la coopération touristique, notamment dans les volets de la formation, de la communication, de la participation aux salons internationaux. Dans ce même objectif, Casablanca s’impose peu à peu également comme la capitale financière de l’Afrique, devançant depuis 2016 Johannesburg au classement Global Financial Centre Index (GFCI). La création de Casablanca Financial City (CFC) en septembre 2010, qui offre une fiscalité très avantageuse pour les investisseurs étrangers désireux de s’implanter en Afrique, a été le moteur de cette montée en puissance. Grâce aux partenariats développés avec la Bourse de Paris et la London Stock Exchange, CFC attire de grands noms de la finance internationale tels que BNP Paribas, AIG, Société Générale, la Coface, Boston Consulting Group et récemment encore Exim Bank of China. Et c’est le balisage Royal qui permet à ces entreprises d’aller plus loin. Et pour cause, le Roi Mohammed VI a institué, depuis 2001, une tournée annuelle dans plusieurs pays africains, accompagné d’une forte délégation ministérielle et d’hommes d’affaires. Des tournées africaines assorties de contrats et de conventions. Aujourd’hui, le Maroc élargit son champ de coopération à d’autres régions du continent. Les dernières virées royales en Afrique de l’Est officialisent les premiers pas d’un rapprochement politico-économique entre le Maroc et l’Afrique anglophone.
Accroissement des échanges commerciaux
En plus de l’internationalisation des entreprises marocaines sur le continent, qui touche presque tous les secteurs d’activités, il en résulte un accroissement des échanges commerciaux entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne sur la période 1999-2014, avec une croissance annuelle moyenne de 14,7%, pour se situer à 1,6 milliard de dollars en 2014 contre 206,3 millions de dollars en 1999. Un volume des échanges commerciaux entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne qui devrait augmenter dans les années à venir compte tenu des négociations des accords de partenariats stratégiques en cours, incluant la mise en place progressive de zones de libre-échange avec la CEDEAO et la CEAAC. Au-delà du commerce, l’évolution des investissements directs étrangers du Maroc à destination de l’Afrique subsaharienne (principale zone d’accueil des investissements marocains dans le monde) montre une tendance à la progression, liée à la signature de nombreux accords de protection, de promotion réciproques et de non double imposition, ainsi qu’à l’adoucissement de la réglementation des investissements. L’Afrique subsaharienne est ainsi devenue en l’espace de quelques années la première destination des investissements marocains directs à l’étranger (IDE) : 80% des IDE sortants vers le continent et 62% du total des IDE marocains sont consacrés à l’Afrique subsaharienne.