«Nous montons en puissance, et cela va continuer»
La filiale marocaine du groupe bancaire français, Crédit Agricole, renforce son ancrage régional dans le Royaume. Crédit du Maroc vient, en effet, d’inaugurer sa direction régionale de Rabat. Dans cet entretien, Baldoméro Valverde, Président du Directoire de Crédit du Maroc, explique les raisons de cette approche régionale et les priorités de la banque pour 2016.
Challenge : Le Crédit du Maroc vient d’inaugurer son siège régional Rabat-Kénitra. Expliquez-nous les raisons qui ont poussé la banque à adopter une telle approche.
Baldoméro Valverde : La région Rabat-Kénitra est une des premières régions économiques du pays, il est très important pour nous que nous soyons présents et que nous développons notre présence. Nous avons essayé d’améliorer aussi les conditions d’accueil de nos clients, les conditions de travail. Nous disposons donc d’une structure qui permet aussi d’accueillir l’ensemble des forces commerciales, notamment les conseillers spécialisés que nous avons mis en place dans le cadre d’une nouvelle stratégie. On avait besoin d’un vaisseau amiral pour développer une présence physique à Rabat.
Et quelle est donc la prochaine étape ?
Nous avons un projet similaire sur Fès également. Il s’agit d’une direction régionale aussi qui va regrouper l’ensemble des équipes de la région. L’inauguration devrait se faire dans deux ou trois ans. Nous avons d’ores et déjà commencé à travailler sur les plans du projet, et je pense que la construction va probablement démarrer dès 2016. Nous avons aussi le projet du siège de Crédit du Maroc à Casablanca sur lequel nous avançons correctement. A ce niveau, les travaux aussi ont commencé et nous comptons les finaliser dans les deux ou trois ans aussi.
Quel sera le niveau d’autonomie des directions régionales vis-à-vis de la direction générale à Casablanca ?
Certes, il y aura toujours une relation avec Casablanca puisque c’est le siège. Par contre ce que nous voulons dans la nouvelle organisation, c’est donner plus d’importance aux régions. Et donc nous avons un certain nombre de compétences qui étaient centralisées au siège, et que nous avons décentralisées dans les régions, notamment au niveau des conseils patrimoniaux, le marché des professionnels, les entreprises. Nous avons donc mis tous ces métiers sous la responsabilité du directeur de région de manière à ce qu’il puisse faire jouer les synergies. Le directeur aura la possibilité de prendre un certain nombre de décisions concernant les régions. Nous avons neuf régions.
Quel est l’enjeu aujourd’hui pour Crédit du Maroc, notamment avec la nouvelle régionalisation ?
L’enjeu pour nous est d’être au plus près du client, d’être présents. Je ne crois pas aux banques centralisées où toutes les décisions doivent venir d’en haut. On considère que lorsqu’il y a des régions, la préoccupation du directeur régional est de se développer sur son territoire. Il ne fait pas d’arbitrage, il se développe et cherche des sources de développement, alors que dans le cas d’une direction nationale, il peut y avoir des arbitrages entre les régions. Dans notre cas, chaque directeur de région ne fait pas d’arbitrage sur sa région. Donc, notre objectif est vraiment d’être sur le terrain, au plus près des clients et d’amener les compétences auprès d’eux.
Le 40ème anniversaire de la Marche Verte a donné un nouvel élan au développement des régions du Sud. Quel rôle pour Crédit du Maroc dans ces régions ?
D’abord, nous sommes déjà présents dans les régions du Sud, puisque nous avons une direction régionale à Agadir couvrant tout le Sud du Royaume. Nous avons par exemple, une implantation à Dakhla que j’ai récemment visitée et qui participe au développement de cette région. Le Sud est caractérisé aussi par une économie agricole importante. C’est pour cette raison que nous avons mis en place des conseillers spécialisés sur le marché de l’agriculture. Nous développons une stratégie par marché. On profite des compétences du groupe auquel nous appartenons et on est accompagné dans la mise en place de cette stratégie avec des offres dédiées, comme le financement de la campagne agricole. Ce sont des approches assez particulières, puisqu’il ne s’agit pas d’une entreprise. Nous avons des produits particuliers dédiés aux agriculteurs et des conseillers qui sont issus d’écoles d’ingénieurs agronomiques. Cela veut dire qu’avant d’être banquiers, ils sont d’abord des spécialistes de l’agriculture que nous formons aux métiers de la banque. Le sud représente la première région où nous avons mis des conseillers dotés de voitures qui vont sillonner les plantations pour apporter des solutions aux agriculteurs.
On est pratiquement à la fin de l’exercice 2015, alors quel bilan établissez-vous ?
Il y a deux dimensions à prendre en compte. La première concerne la dimension commerciale. Et là, on est plutôt satisfait de l’année 2015, même si le conteste économique est quand-même un peu lourd. Nous progressons en termes de parts de marché par rapport à l’année dernière, sachant que nous avons un marché qui ne se développe pas forcément. Ce qui veut dire que nous allons plus vite que les concurrents et que l’organisation commerciale que nous avons mise en place monte en puissance et ça va continuer. Au niveau commercial, l’exploitation va bien, la marge d’intermédiation au niveau du PNB progresse. Dans une seconde dimension, nous subissons la morosité de la conjoncture, avec des risques au niveau des entreprises qui augmentent. Les créances en souffrance progressent avec une croissance à deux chiffres, et on ne peut pas être à côté de cette dégradation. Donc, au même titre que les autres banques, on subit cette dégradation, et à ce sujet, notre politique est d’être extrêmement prudents. Cela veut dire que nous ne sommes pas dans une course au résultat, mais plutôt dans une course sur la durée. S’il faut faire des provisions, être prudents et provisionner les dossiers le plus en amont possible, et le plus tôt possible, c’est ce que nous faisons, quitte à avoir un résultat qui baisse. Il a baissé au mois de septembre. Et sur les trois premiers trimestres il est en baisse, mais peu importe, parce que ce que l’on joue, c’est l’avenir et nous voulons être sereins quand il y aura des jours meilleurs.
Quelles sont les priorités pour 2016?
Les projets que nous avons mis en place fin 2014 dans le cadre du plan CAP 2018 ont commencé à donner leurs fruits en 2015. Ce qu’on veut pour 2016, c’est continuer sur cette lancée. Nous voulons être de plus en plus présents sur le financement de l’économie, et nous avons un certain nombre d’arguments pour cela. Nous travaillons beaucoup sur les compétences des collaborateurs. D’ailleurs, la formation de nos collaborateurs et leur accompagnement sur des métiers spécialisés représentent une de nos priorités pour 2016. Nous allons aussi travailler sur un plan de qualité pour la satisfaction de nos clients. Le digital également avec beaucoup d’innovation. Nous sommes les seuls à avoir lancé la signature électronique. Et nous poursuivons la dématérialisation des contrats. Nous sommes prêts pour signer les contrats via tablette, lorsqu’un client vient souscrire un produit auprès du Crédit du Maroc, et les contrats parviendront également par mail au client. L’architecture s’installe progressivement. Et on va continuer à innover, car c’est un axe important pour nous. Nous avons des options stratégiques en préparation, et beaucoup de projets en cours.
Son actu
Crédit du Maroc vient d’inaugurer son nouveau siège régional à Rabat. Cette nouvelle direction pour la région Rabat-Kénitra, lui permettra d’agir encore plus efficacement au niveau régional, et s’inscrire dans la stratégie de la banque qui vise à marquer encore plus son ancrage régional dans le Royaume.
Son parcours
Baldoméro Valverde a pris les commandes du Crédit du Maroc en 2013, à 57 ans. Titulaire d’une Maîtrise en économie et spécialiste de l’organisation au service de la stratégie, ce natif de Casablanca a occupé plusieurs fonctions de haute responsabilité au sein du groupe français, Crédit Agricole, avant de rejoindre le Maroc. Avec plus de trente ans de carrière, il dispose d’une expertise qui lui a permis de tracer une nouvelle stratégie, CAP 18, qui vise à impulser une nouvelle dynamique au développement du Crédit du Maroc dans le Royaume.