Oussama Chaâra : un symbole par ( Jamal Berraoui )
Il a treize ans, sa photo brandissant une kalachnikov, a fait le tour du monde. Il s’appelle Oussama Chaâra, était connu pour sa participation aux manifestations salafistes. Son père dirige un bataillon marocain dans la région de Lattaquié. Il a choisi d’emmener sa femme et ses cinq enfants combattre en Syrie, nouvelle « terre du jihad ». Pour Oussama, c’est presque un jeu. La vidéo le montre, tout heureux de brandir sa kalach, comme un cadeau d’Achoura. Il a treize ans et il est, sur ordre de son père, dans l’enfer syrien.
Combien sont-ils, ces Marocains qui ont fait le choix de l’international jihadiste ? Nul ne le sait avec précision, mais sans doute des milliers. Ils y vont via la Turquie. Il y a donc une organisation qui s’occupe de la logistique. Quelques cellules ont été démantelées, sans cependant stopper le trafic. Il est clair que cela pose plusieurs problèmes sécuritaires.
Cette organisation qui s’occupe de la logistique, qui recrute, prépare et envoie à la mort des jeunes est une organisation terroriste. Elle est aujourd’hui active sur le front syrien, jugé prioritaire pour les jihadistes qui y voient la possibilité d’établir un émirat islamique, à l’image de l’Afghanistan des talibans. Cependant, son existence est un danger pour la sécurité nationale. Les survivants parmi les combattants, on l’a vu avec les Afghans, sont des cadres potentiels pour les terroristes locaux. Les sécuritaires le savent et agissent probablement en conséquence.
Mais il y a une question plus lancinante à se poser. Elle concerne la pensée jihadiste et sa présence, surtout au Nord du Maroc. Les Islamistes de tous bords ont toujours minimisé son influence. Le nombre de combattants en Syrie, de morts les dément. S’ils sont des milliers à partir, c’est que la base du recrutement est beaucoup plus large. Toutes les cellules terroristes démantelées sortent de cette matrice.
Le combat idéologique est aussi important que la traque sécuritaire sinon plus. Or, tout le monde le refuse et préfère minimiser le phénomène. Les laïcs ne peuvent que dénoncer, ils ne sont pas audibles auprès des jeunes concernés. Par contre, les Oulémas, les Imams doivent assurer leur rôle et contrer cet extrémisme, au quotidien. Cette pensée nie l’Etat-Nation, prône la haine et la destruction de l’Occident, des juifs mais aussi des Etats musulmans considérés comme hypocrites. Ses adeptes ont rarement une connaissance réelle de la religion, ils sont plus à l’aise dans l’idéologie. Les fameux chioukhs de la salafya, sans avoir nécessairement de lien organique avec les réseaux, ont souvent servi de référence idéologique. Maintenant qu’ils sont libres, il est de leur devoir de clarifier les choses, s’ils veulent réellement participer au débat public. Oussama, l’enfant envoyé à l’abattoir est le symbole d’une jeunesse embrigadée par l’idéologie de la haine. C’est cette idéologie qu’il faut combattre sans relâche.