Pass vaccinal obligatoire. La légalité sacrifiée sur l’autel de l’efficacité
Le décret-loi mettant en place l’état d’urgence sanitaire (EUS) n’a pas suspendu totalement l’Etat de droit. Au contraire, ce dispositif a pour but de le protéger. Les principes de la Constitution, loi suprême, sont supérieurs à ce décret-loi et demeurent en vigueur.
Tu passeras ou tu ne passeras pas sans pass vaccinal. Première grande contradiction apparente, source d’incompréhension chez les citoyens : la vaccination n’est pas obligatoire mais le passeport vaccinal est obligatoire. Ainsi, un individu est libre dans l’abstrait. Il ne l’est pas dans le concret, dans la réalité pratique, car, pour exercer des droits et des obligations, pour pouvoir accéder à des services, il doit disposer d’un pass vaccinal justifiant sa vaccination.
Certes, l’article 3 du décret-loi instaurant l’état d’urgence sanitaire permet au gouvernement de prendre pendant l’EUS « toutes les mesures nécessaires qu’exige cet état et ce, par des décrets, décisions réglementaires et administratives ou par des circulaires et avis, en vue d’assurer une intervention immédiate et urgente afin d’empêcher la propagation épidémique de la maladie et de mobiliser tous les moyens disponibles permettant la protection de la vie des personnes et la garantie de leur sécurité ».
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Néanmoins, outre le respect du principe de constitutionnalité de ce décret-loi qui demeure posé et dont l’application ne peut pas être mécanique et aveugle, voire arbitraire, l’obligation de présenter le pass-vaccinal lors des déplacements au niveau national ou pour quitter le territoire, ou encore pour accéder à des lieux publics ou privés, a été instaurée par un simple communiqué officiel du gouvernement. La nature juridique de ce communiqué, et surtout sa place dans la hiérarchie des normes juridiques, est très discutable. Par ailleurs, le contenu dudit communiqué porte gravement atteinte à d‘autres dispositions légales.
Certes, l’article 3 du décret-loi cité commence par la formule ; « Nonobstant toute disposition législative et réglementaire en vigueur(…) ». Mais la Constitution, loi suprême, non suspendue, demeure supérieure audit décret-loi. Ainsi, ledit communiqué donne des prérogatives à des particuliers pour contrôler d’autres particuliers.
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Or le contrôle du pass vaccinal, inséparable du contrôle d’identité, devrait relever exclusivement de certaines catégories professionnelles ayant la qualité de la police judiciaire ou administrative. La protection de la santé des citoyens est incontestablement indispensable. Pour autant, rien ne peut justifier la consécration de pratiques arbitraires, contraires aux normes juridiques fondamentales permettant la sauvegarde du contrat social qui est à la base du « Vivre ensemble ».