Peut-on faire baisser les prix des produits ?
Après avoir fait la sourde oreille aux revendications et surtout à une campagne trop organisée sur la toile, le gouvernement semble avoir reçu le message. Deux des entreprises ciblées par la campagne de boycott ont développé des messages intelligemment scénarisés par les professionnels de la communication. Et ont même procédé à des baisses de leurs prix.
Après des ratés communicationnels de certains membres du gouvernement, leur Chef a jugé nécessaire de parler aux citoyens et de s’aligner sur les revendications de la baisse des prix concernant les produits de grande consommation. Tout en affirmant que la libéralisation des prix restera en vigueur, il a annoncé qu’une commission se penche sur l’étude des mécanismes susceptibles de mieux répondre aux attentes. L’essentiel du message du Chef du gouvernement a été adressé aux producteurs d’aliments qui sont les plus consommés, aux professionnels de la distribution et aux commerçants. Ces acteurs du marché sont appelés à faire un effort en baissant leurs marges et contribuer ainsi à alléger le coût des paniers des ménages.
Il est possible de maintenir les niveaux des prix
Au moment où notre pays a choisi de rétrécir la liste des produits et services dont les prix sont encadrés et dont la liste ne porte actuellement que sur 15 catégories de biens et services, des pays voisins et ayant choisi le même modèle économique que le nôtre, continuent à encadrer les prix de beaucoup de produits alimentaires. Sur le site du ministère tunisien en charge du commerce, on peut lire la liste des produits dont le prix « sera maintenu » et qui comporte « la baguette (220 g) dont le prix est maintenu à 0,190 dt, celui d’un kilo de pâtes est fixé à 0,805 dt, le couscous, lui, vendu à 0,795 dt le kilo, quant au lait, il a été maintenu à 1,120 dt le litre. Le prix de l’huile végétale reste aussi, tel quel, (0,9 dt le litre) et le kilo de sucre a été fixé à 0,970 dt. » (1 dinar tunisien = 3,74 DH). Il existe en conséquence un mécanisme de maintien des prix à un certain niveau. C’est ce mécanisme de plafonnement que le gouvernement cherche à introduire sans remettre totalement en cause la libéralisation.
Il y a des possibilités dans la loi marocaine
La loi 104-12 promulguée en juin 2014 relative à la liberté des prix et de la concurrence, stipule dans son article que « sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, des produits et des services sont déterminés par le jeu de la libre concurrence sous réserve des dispositions du deuxième alinéa ci-dessous et des articles 3 et 4 ci-après.
Les dispositions du premier alinéa ci-dessus ne s’appliquent pas aux biens, produits et services dont la liste est fixée par voie réglementaire après consultation du Conseil de la concurrence. » Toutefois, cette libéralisation pourrait connaître une limitation au niveau de son application à travers des mesures temporaires pour six mois (article 4) «pour contrer des hausses excessives de prix motivées par des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé… » .
Le soubassement juridique existe pour que le gouvernement puisse prendre des mesures. Plusieurs domaines connaissent des prix excessifs. La protection du consommateur fait partie des principes de la Constitution et il est anormal que des marges bénéficiaires soient réalisées au nom d’un principe sacro-saint d’un libéralisme handicapé par des pratiques rentières.