Pour une cohérence des politiques d’appui à l’export
Stimuler, promouvoir les échanges extérieurs et soutenir le commerce local en améliorant sa part sur le marché avec une forte valeur ajoutée d’une part, et d’autre part soutenir la création de l’emploi. C’est à cet exercice que s’est attelé Mohamed Benayad, Secrétaire Général du ministère chargé du Commerce Extérieur à l’occasion de son intervention à la CGEM, le 24 Avril, pour présenter le projet de convention intégrée de développement des échanges extérieurs, préparé par son Département.
par Abdelfettah Alami
Débutant son allocution sur une note optimiste, M. Benayad a tenu à annoncer à l’assistance deux « bonnes nouvelles », celles des derniers indicateurs de notre commerce extérieur et de l’état d’avancement du projet de loi touchant à ce secteur.
Au niveau du premier point, sur le front des échanges extérieurs, notre pays a, après une aggravation du déficit commercial qui a été multiplié par 3 entre 2004 et 2013, enregistré, à fin février 2015, un allégement du déficit commercial de 37,2%, à 20,5 milliards de DH, et une amélioration du taux de couverture de 13,4 points à 61,7%. Cette évolution s’explique par la hausse de la valeur des exportations de 8,2% à 33 milliards de DH, conjuguée à la forte baisse des importations de 15,2% à 53,6 milliards de DH. L’amélioration des exportations est en relation avec le redressement des ventes à l’étranger de phosphates et dérivés de 20,4% après des baisses de 18,8% à fin février 2014 et de 23,5% à fin février 2013, ainsi qu’avec la bonne tenue des exportations des secteurs de l’automobile (+10,1%), de l’agriculture et agro-alimentaire (+10,4%) et du textile et cuir (+7%). En effet, ce dernier secteur qui semblait accuser les effets de la crise retrouve un dynamisme significatif attestant de sa résilience. Quant au repli des importations, il s’explique, essentiellement, par le recul de la facture énergétique de 45,2%, consécutivement à la chute des cours mondiaux de pétrole brut, et dans une moindre mesure, par la baisse de celles des produits alimentaires de 26,5%, notamment le blé (-61,9%).
Mais malgré cette embellie, la situation, selon le secrétaire général du ministère du Commerce Extérieur, demeure fragile en raison de plusieurs dysfonctionnements qui handicapent une réelle relance des échanges commerciaux.
La 2ème bonne nouvelle, concerne le projet de loi sur le commerce extérieur qui sera, d’après M. Benayad, adopté lors de la prochaine réunion du Conseil de Gouvernement. Selon Younes Zrikem, Président de la Commission Exploitation des ALE et Relations Internationales Bilatérales de la CGEM, « ce texte constitue pour nous une avancée majeure » et ce, à plusieurs niveaux : fer de lance de toute politique économique, la concertation avec les opérateurs et la société civile est désormais une obligation, et non plus une faculté discrétionnaire, qui s’impose à l’Administration. 2ème nouveauté introduite par ce projet de loi : la régulation des pratiques commerciales par une amélioration des capacités de veille sur le front des importations à travers deux mécanismes: l’établissement d’un fichier électronique des importateurs et l’institution d’un titre d’importation dématérialisé pour les produits présentant un risque pour le marché local. Enfin, 3ème nouveauté apportée par le projet de loi : le mandat obligatoire pour un opérateur pour « aller » dans une négociation commerciale internationale.
Des signes de fragilité !
Le projet de convention intégrée des échanges extérieurs, objet de ce séminaire d’information, rentre dans le cadre des orientations du Plan National de Développement des Echanges Commerciaux adopté par le gouvernement le 6 juin 2014, dont l’objectif le plus important et le plus actuel est la résorption du déficit de la balance commerciale dont le seul levier actionné, aujourd’hui, est celui de l’export en omettant d’autres champs d’action aussi efficaces pour l’atteinte de l’objectif précité. Cela passe notamment, par un accompagnement des opérateurs en vue d’élargir les marchés et de créer de nouveaux débouchés commerciaux tout en stimulant la valeur ajoutée locale. Et pour une prise en compte efficiente de ces objectifs, la nécessité est impérieuse de mettre en cohérence les stratégies sectorielles qui opèrent dans le secteur des échanges commerciaux.
Or, le constat aujourd’hui, c’est le manque de convergence et de synergies intersectorielles aggravées par la multiplicité des intervenants dans les politiques d’appui aux entreprises exportatrices. Pire encore, si certains programmes d’appui à l’export se complètent et ont eu le mérite d’exister, ils fonctionnent en « silo » et « se contredisent » parfois, selon le Secrétaire Général du ministère chargé du Commerce Extérieur. En plus, d’après M. Benayad, ces programmes s’intéressaient uniquement au développement des exportations, alors que l’équilibre de la balance commerciale est conditionné, aussi, par un 2ème pilier, celui du marché local dont il faudrait augmenter la valeur ajoutée. «On peut exporter chez soi », disait-il.
Ce sont justement les objectifs de rationalisation, d’optimisation et de convergence des stratégies sectorielles qu’ambitionne le projet de convention intégrée de développement des échanges extérieurs.
Quels outils pour une stratégie intégrée des échanges commerciaux ?
L’accompagnement des opérateurs dans le commerce extérieur va s’inscrire dans une nouvelle démarche. Les objectifs spécifiques du projet de convention précitée, visent globalement à simplifier l’accès aux programmes et services en éliminant les facteurs bloquants. Une déclinaison régionalisée et par filière des plans d’action permettrait de toucher plusieurs territoires jusque-là exclus ou bénéficiant peu des programmes mis en œuvre. Tout cela, se fera dans le cadre d’ «une approche scientifique» et pour tous les écosystèmes mis en place pour identifier et définir les leviers d’action les plus impactants et les plus prioritaires.
De toute évidence, le projet de convention intégrée des échanges extérieurs présenté à la CGEM a défini les marchés et les outils cibles à travers une analyse coût/avantage, pour la période 2016-2020.
A cet effet, pour l’atteinte des objectifs aussi bien macro que spécifiques, 7 outils seront actionnés dont le principal touche les mesures d’appui au développement des exportations et qui s’articule, à son tour, autour de cinq programmes phares: l’audit à l’export qui sera généralisé à toutes les entreprises bénéficiaires du programme et servira à les aider à préparer une stratégie à l’export et une qualification d’une offre de produits capables de pénétrer un marché. Le second, concerne les entreprises « primo exportatrices » capables de développer une véritable intelligence économique et seront éligibles à un financement de l’Etat dont la quote part atteindrait les 80% des frais engagés pour la formation et le coaching des entreprises innovantes. Les trois autres programmes seront dédiés à l’appui aux exportateurs confirmés avec une nouvelle formule de contrats de croissance où ces derniers s’engageraient sur des résultats concrets et non pas sur « des effets d’annonces », au soutien des consortiums des exportations dans le cadre d’une nouvelle restructuration de ce programme, une agrégation de l’offre et enfin, à l’appui à l’internationalisation pour soutenir les plateformes de distribution à l’étranger à la condition d’un effet de retour sur l’économie nationale ; il s’agit, en d’autres termes, selon le SG du ministère chargé du Commerce Extérieur de « transformer la subvention de l’Etat en offre exportable ».
Les six autres outils programmés dans la convention intégrée de développement des échanges extérieurs pour la réalisation des objectifs par écosystème et par secteur, concernent les volets suivants :
1. Appui au développement des marchés extérieurs à travers une feuille de route ciblant les marchés porteurs et identifiant les outils de promotion à mettre en œuvre;
2. Mise en place du système de veille commerciale intégré contenant la veille sur les marchés locaux et extérieurs et la veille spécifique aux entreprises ;
3. Appui au renforcement de la valeur ajoutée locale ;
4. Assistance à la défense commerciale ;
5. Assistance à l’accès aux marchés préférentiels et à la négociation internationale;
6. Appui au développement des compétences.
Enfin, en termes de gouvernance de ce grand projet, celui-ci sera piloté par le bureau exécutif du Conseil National du Commerce Extérieur (CNCE) et implémenté par des comités de suivi public-privé.