Tribune et Débats

Ressources naturelles des provinces du Sud. Les retombées positives sur les populations locales sont importantes [Rapport européen]

Selon un rapport de la Commission de l’Union Européenne et le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), les retombées des préférences tarifaires aux produits du Sahara Marocain sur les populations locales sont claires et importantes. Par Lahcen Haddad

La Commission de l’UE et le SEAE viennent de le confirmer chiffres à l’appui, dans un récent rapport :  Le Maroc investit sept à dix fois plus que les ressources provenant du Sahara marocain et son partenariat avec l’UE est hautement bénéfique pour les populations des provinces du Sud. De mon point de vue, ce rapport est une réponse à l’avis de Hans Corell, l’ex-sous-secrétaire des Nations Unies pour les Affaires Légales et le Conseil Juridique (Janvier 2002, « UN 2002 legal opinion about the legality of exploring and exploiting natural resources in Western Sahara ») que l’exploitation des ressources naturelles (qui s’avère selon le récent rapport de l’UE durable et rationnelle) au Sahara marocain est légale du point de vue du droit international si elle bénéficie aux populations locales.

Il démontre également, que le but du Maroc n’est pas d’exploiter les ressources des territoires (en fait, la fosse de phosphates de Boucraâ est maintenue en « vie » pour des raisons purement sociales, puisqu’elle emploie des centaines de sahraouis, et pas à des fins économiques), mais d’assurer un développement soutenu de ces provinces afin de mieux les intégrer dans le tissu économique national, avec des retombées notoires sur le développement humain des population locales (voir Emmanuel de Casterlé, ex-Représentant du PNUD, «Rapport sur le développement humain aux provinces sahariennes», 2008 .).

La question de l’exploitation des ressources du Sahara reste un canular que personne ne croit mais qui vient, heureusement, d’être enterré par ce rapport objectif, détaillé et politiquement neutre. Des jeunes entrepreneurs sahraouis ont pu obtenir de l’aide de l’Etat marocain pour créer leur coopérative dans le domaine agricole. Leur souci, selon le rapport, est le maintien du traitement tarifaire préférentiel de la part de l’UE et leur souhait de pouvoir écouler leurs marchandises directement via le méga-port en construction à Dahkla, ce qui va leur épargner 20 % des frais logistiques qu’ils encourent actuellement en passant par le port d’Agadir. 

Un impact très positif de l’accord pour le développement économique du Sahara 

«La mission de l’UE à Dakhla a confirmé dans ses conclusions antérieures indiquant un impact très positif de l’accord pour le développement économique du Sahara (marocain), qui dépend dans une large mesure des exportations vers l’UE, en particulier dans les secteurs de la pêche et de l’agriculture. La visite a montré que le Sahara est une économie en transition rapide d’une économie nomade et pastorale à une économie agricole et halieutique de plus en plus sophistiquée et compétitive : la plupart de ces secteurs se sont développés à partir d’un niveau d’activité très faible sur environ une décennie et demie, (par exemple la transformation du poisson, les tomates cerises et l’aquaculture). » 

Leur souci est d’améliorer leur revenu et le niveau de vie de leur famille.  

Par ailleurs, d’autres jeunes entrepreneurs sahraouis ont également obtenu de l’aide de l’Etat pour créer leurs coopératives dans le domaine de l’aquaculture (élevage des huîtres, moules et palourdes) dont la production et la commercialisation ont commencé depuis 18 mois. C’est dire que le train de développement économique du Sahara est déjà en marche ; Le Modèle de développement des provinces du sud (MDPS) impulsé par Sa Majesté le Roi (depuis 2014), donne déjà des fruits en matière de création de richesses et d’emploi. 

Là où le gouvernement marocain doit consolider l’effort déjà consenti sur le terrain est en matière de formation, note le rapport. A mon avis, il est nécessaire de renforcer le tissu de formation par des structures dans les domaines des pêches, de l’agriculture et l’agro-alimentaire, de la logistique, et du tourisme. Eduquer les entrepreneurs des Provinces du sud sur les normes européennes et le savoir-faire en matière d’export, de logistique et de règlements tarifaires est une condition sine qua non pour une intégration réussie de l’économie de la région dans le circuit d’échange Maroc-UE.  Investir dans le capital humain des provinces, est la clef de voute de la réussite du MDPS et du Partenariat Maroc-UE. 

La forte participation des femmes dans les unités de transformation de pêche, rime avec la vision du gouvernement qui consiste à étendre le taux de participation de la femme dans le marché du travail, mais démontre le rôle important que joue la femme dans la culture des Provinces du sud. Il incombe aux autorités concernées de veiller à ce que les femmes soient rémunérées sur un même pied d’égalité que les hommes. Le décalage entre les hommes et les femmes est de 17 % au niveau national selon le HCP (Mohammed Douidich, «Retombées des inégalités salariales du genre», Economia, 2019).

Le rôle important des plans de développement et les investissements du Maroc

« Les plans de développement et les investissements du Maroc ont joué un rôle important dans le développement du Sahara marocain. D’importants projets devraient pousser plus loin son développement, notamment un nouveau port à Dakhla, un parc éolien et une usine de dessalement qui pourraient donner un coup d’accélérateur au développement de la zone. Le tourisme et l’artisanat sont les deux autres principales activités économiques, bien qu’il existe également une petite activité de berger basée sur l’élevage de chameaux. Dans tous ces secteurs, il y a une participation significative des femmes dans la main-d’œuvre. » 

Il faut mettre en place une politique volontariste afin de réduire l’écart genre des salaires, y compris dans les Provinces du Sud. L’ouverture du marché du travail ne doit pas se limiter aux considérations quantitatives, mais qualitatives également et le point d’entrée est la réduction de la discrimination basée sur le genre (qu’il faut d’ailleurs étudier au niveau des Provinces du sud). Le tourisme n’a pas été étudié par le rapport (puisque les accords se limitent à l’agriculture et la pêche), mais il a été évoqué lors des pourparlers avec les autorités locales. A mon avis, c’est un secteur prometteur surtout pour Dakhla, Laâyoune, Tarfaya et Oued Noun. La Baie de Dakhla a une vocation durable, promouvant des structures légères, eco-friendly; son tourisme est basé sur les sports comme le kite-surfing, mais également sur des activités de niche comme le tourisme culturel, de désert et les événements.

Laâyoune a plutôt une vocation de tourisme d’affaires et de famille ; Tarfaya dispose d’un potentiel balnéaire et Oued Noun offre un mélange de culture, aventure, histoire et durabilité. Le tourisme servirait à compléter les secteurs des mines, pêches, agriculture et services afin de consolider la dynamique économique déjà impulsée par des investissements publics importants dans les infrastructures, villes et centres urbains, la santé, l’éducation, la formation, la jeunesse et l’habilitation de la femme… Les défis se concentrent autour d’un maillage aérien adéquat, la nécessité de renforcer les marques Dakhla (branding), Laâyoune, Tarfaya, Tan-Tan et Oued Noun et le développement du tissu entreprenariat autour de l’activité touristique. 

La complémentarité et l’intégration entre les activités de pêche

«Le rapport souligne le soutien des organisations des droit de l’homme à l’extension des préférences tarifaires aux provinces du sud et leur indication que les populations bénéficient de l’accord, car il permet «un développement économique considérable». Les représentants de ces organisations « ont considéré cela comme un droit humain de la population locale au Sahara marocain».

Les défis soulevés par ces organisations, sont le manque relatif de transparence et la bureaucratie. Cependant, tous signalent un développement remarquable de la situation des droits de l’homme. A mon avis, ce qui est important en matière des droits de l’homme est d’avoir : 

– des institutions comme le CNDH qui interviennent pour mettre la lumière sur des situations ou évènements bien déterminés et proposer des recommandations ; 

– des rapports parallèles produits par des ONG des droits de l’homme ; 

– des revues périodiques de la part de la Délégation interministérielle des droits de l’homme pour animer le débat public. Il est important d’avoir ces éléments de contre-pouvoir pour dégager et construire un process, des instruments de protection et de prévention et des possibilités de recours et d’intervention. L’instrumentalisation politique des droits de l’homme au Sahara et ailleurs, va continuer à exister, mais il est important de renforcer l’arsenal juridique et la structure institutionnelle afin de la confiner à sa juste place.

En conclusion, ce rapport vient confirmer la position du Royaume du Maroc, qui indique que l’affaire du Sahara n’est pas une question de ressources mais d’intégrité territoriale, d’un droit historique, légitime du peuple marocain et la culmination d’un processus de décolonisation entamé depuis les années cinquante du 20ème siècle. Le partenariat avec l’Europe ne peut pas ne pas inclure les Provinces du Sud et cette inclusion a eu un impact très positif sur les populations locales qui bénéficient déjà d’un effort colossal en investissement consenti par l’Etat marocain depuis des décennies, mais qui a subi un coup de fouet depuis l’adoption du Modèle de développement des provinces du sud.

Une large marge de liberté pour exprimer des opinions sur différentes questions 

«Certains insistant sur la nécessité de faire la distinction entre les défenseurs des droits de l’homme et les acteurs biaisés et motivés politiquement. Ils ont indiqué que les militants sahraouis connus du public jouissent généralement d’une large marge de liberté pour exprimer leur opinion sur différentes questions, à la fois en tant qu’individus et en tant qu’associations. Néanmoins, des inquiétudes ont été exprimées concernant les mécanismes d’association politique sur le territoire, une écrasante majorité de militants n’ayant jamais soumis de demandes de reconnaissance officielle. Par conséquent, des appels ont été lancés pour l’adoption de protocoles spécifiques pour l’organisation de manifestations politiques au Sahara. » 

Lahcen Haddad est Sénateur et co-Président de la Commission Mixte Parlementaire (Parlements marocain et européen)

 
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