Sahel : de no man’s land à no man’s power
Tous les médias sont affairés par la question du Sahel où la situation devient de plus en plus préoccupante.
Un contexte sécuritaire qui ne cesse de se dégrader, comptabilisant -rien que l’année écoulée- un taux record de décès, survenus suite aux dramatiques violences perpétrées par des groupuscules extrémistes, indique le Secrétaire général de l’ONU dans son rapport du 20 décembre 2020.
Déversement d’une crise multidimensionnelle
Pour cette institution financière internationale, une telle aide permettrait de secourir l’agriculture sahélienne à surplomber la bravade d’un environnement fort néfaste et à pallier aux besoins alimentaires d’une population en forte croissance.Une fausse lecture dans la mesure où des analystes sont conscients que ces fonds sont détournés et corrodés à des fins purement personnelles et -à moindre mesure- politiques. Une seule explication parfaitement tenable : tout semble verser dans un scénario de pures opérations de blanchiment d’argent ! Sans omettre d’écarter les manipulations liées à des financements de groupes terroristes pour justifier ces massacres. 2020 a été considérée comme étant l’année la plus meurtrière comptabilisant près de 2440 morts parmi les civils, notamment au Mali, Niger et Burkina Faso selon les statistiques publiées par The Armed Conflict Location and Event Data (ACLED).
Sahel : un nouveau théâtre de rivalités internationales
De nombreux pays européens se mettent à l’assaut du Sahel, omettant pour la plupart que les pays du Maghreb -tout d’abord africains- sont amis et voisins dans cette région. C’est ainsi qu’en juillet 2017, la France, l’Allemagne et l’Union européenne avaient procédé au lancement de l’Alliance Sahel. Et si tôt, plusieurs pays du vieux continent (Italie, Espagne, Royaume-Uni, Luxembourg, Danemark et Pays-Bas) n’ont pas tardé à rejoindre cette coalition pour lutter contre le terrorisme, apporter leurs aides pour un développement de l’espace sahélien, contribuer au renforcement des capacités des forces armées des États du G5 Sahel, telles sont les principales cartes sur lesquels s’appuient ces États européens pour démontrer leur bonne foi !
Lire aussi | Voitures neuves : le marché fait mieux que prévu au premier trimestre
Devant d’importantes richesses que fourmillent les terres du Sahel, les populations du Mali, du Burkina Faso, du Niger, du Tchad et à très moindre mesure la Mauritanie veulent dénouer leurs crises dans le cadre d’une pure cuisine interne ! Malgré cela, les puissances étrangères ne manquent pas non plus de faire surface pour récupérer leurs parts, tels que les États-Unis d’Amérique, la Chine, l’Inde ou encore la Russie. D’ailleurs, une note du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest de l’OCDE -brillamment raffinée au courant de l’année 2016- décrit, formidablement, les fortunes cachées du sous-sol sahélien, en citant que : « L’arc sahélien est riche en ressources : après le sel et l’or, pétrole et gaz, fer, phosphate, cuivre, étain et uranium sont autant de richesses, nourrissant les convoitises de puissances, désirant s’en assurer le contrôle. Le Sahel s’érige ainsi en »hub énergétique » de plus en plus convoité par les grandes puissances ». Autant de convoitises qui attirent la Banque mondiale, le Programme des Nations unies pour le développement ou encore la Banque africaine de développement.
Le Maroc, le sauveur du Sahel
Il faut le reconnaître : le Royaume apporte énormément à cette région et sa présence est incontournable. Il devient l’un des principaux acteurs qui permettrait de lutter, de manière très significative, contre les flux migratoires, le terrorisme (Organisation de l’état islamique au grand Sahara et Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans), ainsi que la radicalisation dans cette région du Sahel. D’aucuns estiment que S.M. Le Roi Mohammed VI n’a eu de cesse d’apporter son soutien à l’Afrique et plus particulièrement au Sahel. Plusieurs témoignages sont ainsi apportés par de hauts responsables étrangers, dont celui de l’ambassadrice de France au Maroc, Hélène Le Gal, qui avait déclaré que « L’initiative, sous l’impulsion de S.M. le Roi Mohammed VI, visant à aider 15 pays africains dans leur lutte contre le Covid-19, est remarquable ». Effectivement remarquable, dans la mesure où même les plus grandes puissances n’arrivaient pas à apporter soutien, dans des moments où crises alimentaire, environnementale et sanitaire (Covid-19) venaient occire le pauvre continent africain. C’est bien dans les moments difficiles que l’on reconnaît les fidèles et vrais amis : le Maroc l’a donc fortement prouvé, à l’Afrique, y compris à la région du Sahel. G5 Sahel devrait être érigé en G8 Sahel, pour contenir les principaux pays maghrébins, en y associant, en sus de notre pays le Royaume, la Tunisie et la Libye. Une manière de pouvoir amalgamer -en un seul foyer conflictuel -l’ensemble des menaces terroristes liées aux réseaux de trafic de drogue, d’armes et la migration, transcendant les frontières des États de la région Maghreb-Sahel.
Lire aussi | Le français Chryso concrétise son projet d’implantation au Maroc
Dans une autre perspective, il n’est plus opportun de se pencher uniquement sur les questions sécuritaires liées au terrorisme pour sauver le Sahel mais plutôt d’adopter -pour une sortie imminente de crise et pour un développement durable de la région -une approche pluridimensionnelle, abordant d’autres problématiques majeures telles que l’instauration d’un dialogue entre les parties au conflit, la lutte contre la corruption, une amélioration de l’accès à l’aide humanitaire, la protection des civils ou encore le développement rural. « Les pays du Sahel sont aussi appelés de réinvestir les recettes dans les politiques de développement, de protection sociale, d’éducation et de santé ». Une recommandation qui avait été inscrite, depuis plus d’une année, dans le cadre d’un rapport publié par OXFAM sur l’augmentation des inégalités au Sahel. Autre point saillant : les débordements de cette crise sahélienne s’exportent vers les zones limitrophes, en l’absence, parfois, de toute visibilité. Il en est ainsi du tout récent décès du président tchadien, Idriss Déby Itno, en date du 20 avril courant. Une énigme que la plupart des médias n’ont pas -cette fois-ci- pu déchiffrer en temps réel. Les jours à venir pourraient éclairer l’ambiguïté de la situation au Tchad, même si d’ores et déjà l’annonce du décès du président tchadien sur le front contre les indépendantistes a été en concomitance avec l’instauration du Conseil militaire présidé par son fils pour une période de 18 mois.
APA-N’Djamena (Tchad) – Le président français se rend ce vendredi au #Tchad pour assister aux obsèques du président Idriss #Deby dont la #mort a été annoncée mardi matin. C’était le meilleur allié militaire de la #France en #Afrique. #Jihadisme #Sahel https://t.co/GYrhnGT36u
— APAnews (@apa_news) April 23, 2021
Par Mehdi Hijaouy, expert en sécurité, défense et stratégie.