Banques participatives

SALAM : comment acheter une marchandise qui n’existe pas ?

Le contrat Salam est un produit qui diffère profondément des autres produits participatifs qui ont fait l’objet de réglementation de la part de la banque centrale. Il déroge au principe qui dit qu’on ne peut pas vendre une chose qu’on ne possède pas et qui n’est pas disponible. Cette exception s’explique selon les jurisconsultes musulmans par la nécessité de «répondre aux besoins des gens» en se basant sur un Hadit du Prophète qui dit que : « Celui qui achète un bien qui lui sera livré ultérieurement, qu’il le fasse pour un volume connu, pour un poids connu et pour une échéance connue ».

Quel est l’objet de ce contrat ? Pour reprendre la définition retenue par la banque centrale et validée par la « Commission Sharia de la finance participative », Salam est un contrat en vertu duquel une des parties (la banque ou le client), en qualité d’acheteur, avance un montant fixe à l’autre partie qui s’engage, en qualité de vendeur, à livrer une marchandise dûment identifiée à une date fixe. En d’autres termes, Salam est une vente à terme à paiement anticipé. A la signature du contrat, il n’est pas nécessaire que la marchandise soit disponible et propriété du vendeur. Malgré ceci, la banque est tenue de payer le prix en intégralité dans le but de permettre au vendeur de disposer de liquidités. Les créances éventuelles de la banque sur le vendeur ne peuvent servir de prix de la marchandise objet du contrat Salam.

Pour sa validité, le contrat Salam doit préciser les caractéristiques de la marchandise, notamment le genre, la marque, la quantité et la qualité. Il ne peut pas avoir pour objet une marchandise précise ou qui n’a pas d’équivalent; la marchandise doit être couramment échangée sur le marché et largement disponible à la date fixée dans le contrat afin que le vendeur puisse être en mesure de la livrer au vendeur. Lorsqu’il s’agit d’un produit agricole, l’acheteur est en droit d’exiger que ledit produit soit d’une région déterminée mais pas d’une ferme précise. De même, il peut exiger pour les produits industriels, qu’ils soient fabriqués dans une usine déterminée.

Le contrat Salam mentionne la date et les modalités de livraison de la marchandise. A défaut d’indication du lieu de livraison, c’est le lieu de signature du contrat qui est retenu.
Pour se prémunir contre le risque de défaut du vendeur, la banque est autorisée à se couvrir de garanties comme le gage, la caution ou toute autre garantie prévue par la législation en vigueur, ce qui de notre point de vue ne colle pas avec la règle de partage des risques prônée par la finance islamique.

Dans le cas où la livraison de la marchandise n’est pas possible à la date fixée dans le contrat, le vendeur a la possibilité, après accord de l’acheteur, de reporter la date de livraison sans révision de prix ou augmentation de sa quantité. Si l’acheteur est d’accord, le vendeur peut livrer une autre marchandise que celle prévue dans le contrat. La marchandise peut être de meilleure qualité sous condition que le vendeur ne demande pas une augmentation du prix. En cas d’indisponibilité de la marchandise totalement ou partiellement, l’acheteur a le choix entre l’octroi au vendeur d’un délai raisonnable ou la résiliation du contrat avec récupération du prix. Par ailleurs, le contrat Salam peut prévoir qu’en cas de retard de livraison sans motif valable, l’acheteur est en droit de récupérer le prix avancé avec possibilité de réclamer des dommages et intérêts.
Pour ne pas prendre en charge la commercialisation de la marchandise dans le cadre d’un contrat Salam, la banque a la possibilité de donner mandat au vendeur pour procéder à la revente de ladite marchandise à la date de la livraison. Elle peut également vendre la marchandise avant qu’elle ne lui soit remise. Et à ce niveau, la question se pose de savoir si la banque participative ne se rapproche pas sur ce point de la banque conventionnelle qui procède à la vente de ses créances.

Le contrat Salam présente des avantages de nature à intéresser les agriculteurs. Sa commercialisation reste toutefois conditionnée par l’éclaircissement de son régime fiscal qui demeure un point d’interrogation.

 
Article précédent

« Le Maroc est l’un de nos plus importants marchés »

Article suivant

Vivo Energy dope ses investissements au Maroc