Solidarité et empathie pour vaincre le coronavirus : le wake up call de l’Afrique à la communauté internationale
A la crainte de repli et d’enferment qui se diffusent à travers nos sociétés en ces temps particuliers, la réponse qui nous ait donnée à voir par nombre de nos leaders est celle de l’ouverture. L’ouverture sur l’Autre, sur cette humanité qui ne nous a jamais fait défaut, mais que nous avons en toute vraisemblance noyée dans la course effrénée d’une mondialisation aujourd’hui révolue.
Fer de lance d’un combat qui ne sera gagné que communément, la solidarité s’érige en maitre mot de toute ambition humaine et humaniste d’une civilisation qui retourne à sa source, comme un passage obligatoire, après s’être fondue en confusion. En réorientant les débats, en refocalisant les priorités mais surtout en bougeant les lignes d’une réalité qui nous semblait hier encore comme fictive, la crise sanitaire que nous traversons est porteuse d’un symptôme guérisseur, celui de la prise de conscience simultané et collective de notre vulnérabilité et de l’exigence d’une unité réelle et substantielle avec notre prochain.
Berceau de l’humanité et terre de valeur, l’Afrique, mieux encore que d’autres continents peut-être, semble opérer une mobilisation de cœur pour pourvoir à des besoins qui ne sauraient être restreints à des chiffres, à des capacités financières ou à des intérêts égoïstes. L’humain dans toute sa complexité est au centre des préoccupations d’un agenda continental empreint de responsabilité, animé d’une vision et porté par un leadership affirmé.
Les frontières du possible comme les impératifs d’unité ont bougé. L’initiative plus que louable du Président en exercice de l’Union Africaine (UA), Cyril Ramaphosa, appelant l’UA à agir de concert, à l’unisson et en toute solidarité face à la menace qui pèse sur l’ensemble de nos pays, est révélatrice d’une prise de conscience africaine. Une prise de conscience qui, plus que jamais, repose sur des fondamentaux d’altruisme, de respect et d’empathie. Le Président Ramaphosa l’a exprimé très clairement, le temps est aujourd’hui à la coordination pour mettre en musique les synergies et mobiliser nos forces et nos capacités. L’avenir se construit ensemble, loin de toute division et notre continent semble aujourd’hui en saisir pleinement la mesure.
A l’urgence de la situation, nos leaders ont fait des choix courageux, en dépit des coûts économiques parfois ravageurs pour des pays en voie de développement. L’erreur aurait été celle de mettre sur un même pied d’égalité l’ambition économique et l’exigence sanitaire. Si ni l’une, ni l’autre de ces composantes ne doit être négligée, aujourd’hui la priorité doit être celle d’accompagner, au plus près et dans les meilleures conditions, nos sociétés pour mettre à genoux ce virus aux capacités mortelles, comme il l’a tristement prouvé dans les quarte coins du monde.
Plus que jamais, l’Afrique doit prendre en charge sa destinée à la faveur d’un engagement renouvelé qui met le développement humain au centre des priorités
Le Maroc, grâce à la Vision, au leadership et à l’engagement de Sa Majesté le Roi, n’a en ce sens ménagé aucun effort pour protéger sa population et par continuité notre humanité d’un virus qui sévit aujourd’hui indifféremment des particularités et des spécificités propres à chacun de nos pays. Le virus n’épargne aucune catégorie sociale, aucune nationalité, aucune religion spécifique, il s’attaque à l’Homme dans toute sa vulnérabilité, nous rappelant chaque jour d’avantage à la simplicité de notre condition et à l’unicité de notre existence. La solidarité généralisée qui s’observe aujourd’hui dans la société marocaine est un exemple éloquent de cet humanisme profond et sans faux semblants qui anime les cœurs et les esprits de nos compatriotes. Debout face à l’adversité du virus, le pays dans toute sa diversité se tient comme un seul Homme avec fierté et patriotisme. L’élégance d’un peuple et la force d’une Nation ne peuvent qu’avoir raison de cette intempérie que nous traverse.
Plus que jamais, l’Afrique doit prendre en charge sa destinée à la faveur d’un engagement renouvelé qui met le développement humain au centre des priorités. Le continent n’a pas vocation à être passif dans un monde où le système multilatéral a montré ses limites et la mondialisation ses imperfections. Aujourd’hui, si l’aide financière et technique venant d’autres horizons est évidement la bienvenue, elle ne constituera pas, à elle seule, le salut d’un continent aux défis multiples. En toute lucidité et responsabilité, nous devons effectuer un travail en interne, en profondeur et par nos propres moyens pour revoir des réalités qui sont aujourd’hui dépassées.
Les défis que nous traversons actuellement ne sauraient être interprétés à tort comme un enjeu exclusivement sanitaire. Ses implications sur les vulnérabilités sécuritaires multiples pourraient s’avérer désastreuses en l’absence d’une action réfléchie, responsable et concertée de l’ensemble des pays du continent. A l’image de ce qui est aujourd’hui mis en place pour la lutte contre le VIH et Ebola, la menace du Coronavirus doit être appréhendée avec une justesse dans l’analyse et une globalité dans la vision. Une erreur dans l’appréciation ou un laxisme dans l’action feraient courir à notre continent le risque de saper des années d’efforts valeureux dédiées à l’unique ambition de voir la paix et la sécurité régner en Afrique.
Si le temps est aujourd’hui à l’action, le moment de la réflexion viendra inéluctablement. Il s’agira alors pour le continent d’entrevoir de façon apaisée, lucide et en bonne intelligence, un bilan introspectif des lacunes, faiblesses et manquements dont on se rendra inévitablement coupable au vu des précipitations qu’exige l’urgence de la situation actuelle. Il s’agira d’inscrire à l’avenir notre action dans l’anticipation à travers la promotion d’un nouveau modèle de développement en rupture avec les référentiels d’antan, un modèle qui soit en phase avec les réalités et les ambitions d’un Continent aux potentialités et ressources innombrables.
C’est cette ambition qui est à l’essence même de la Vision portée au plus haut niveau par Sa Majesté le Roi Mohammed VI pour une Afrique qui avance à pas déterminés sur la voie dans son émergence. Globale dans son approche, inclusive dans sa démarche et solidaire dans son action, cette Vision est déclinée par des engagements fermes et immuables du Maroc envers son continent d’appartenance, sa famille institutionnelle et ses frères et sœurs africains.
Au diapason de cette démarche, le Maroc et l’Afrique du Sud se sont engagés à travailler ensemble pour développer des synergies bilatérales et continentales à même d’appuyer et de porter le projet d’une Afrique stable, prospère et étanche à toute conflictualité. La noblesse de cette ambition structurante fait aujourd’hui écho à l’exigence d’une situation délicate. Dans l’adversité face à ce virus, l’unité de cœur et d’action prévaut dans la pyramide des considérations.
Plus qu’hier, la résonance des politiques de solidarité s’impose avec acuité. A enjeux communs réponse commune. L’Afrique ne sera pas reléguée aux derniers wagons des priorités, parce qu’elle est justement dans toute sa vivacité, sa jeunesse et ses ambitions engagée aux avant-gardes d’un combat planétaire ne faisant aucune concession à l’ennemi et ne s’autorisant aucun laxisme ni égoïsme dans ses démarches.
Le continent est aujourd’hui un exemple d’ambition et un modèle d’engagement. Persévérons sur ce chemin et nous vaincrons non seulement l’épidémie mais également le reste des maux qui n’ont définitivement plus leur place dans une Afrique audacieuse et résolument tournée vers un avenir de paix et de sécurité.
Si Gabriel Garcia Marquez a écrit sur l’amour aux temps de choléra, l’Afrique aujourd’hui en temps de coronavirus donne ses lettres de noblesse à l’empathie et à la solidarité. Loin de tout clivage ou démarche isolationniste, le continent devra remplir pleinement son siège dans le concert des Nations-unies en imposant légitimement son ton et son temps.
Youssef Amrani
Ambassadeur de Sa Majesté le Roi en Afrique du Sud