Sport et politique : un mauvais mariage
C’est une tradition marocaine, à chaque désillusion sportive, le ministre est sommé de s’expliquer devant le Parlement. Une tradition à bannir.
Talbi Alami, ministre de la Jeunesse et des Sports, s’est présenté devant les parlementaires pour justifier l’élimination de l’équipe nationale. L’homme a multiplié les impairs. Sur le net, il est tourné en bourrique parce que le joueur Ziyach a démenti son intention d’arrêter sa carrière comme l’a affirmé le ministre. Beaucoup d’affirmations infondées ont été proférées. Le centre de Maâmoura n’a pas été construit par le gouvernement mais par la fédération.
Celle-ci dispose de son propre budget alimenté par les droits télés et le sponsoring. C’est une honte qu’un ministre devant le Parlement soit aussi imprécis.
Le sport d’élite est une économie
Mais c’est l’exercice forcé qu’il faut remettre en cause. Le ministre des Sports n’a pas à s’occuper des équipes nationales ou à aller dans les vestiaires. Dans tous les pays du monde, le sport d’élite est une industrie. Grâce à l’hyper médiatisation, tous les sports et le football en tête, génèrent énormément d’argent. Le combat est justement de développer un modèle économique performant.
L’Etat n’a plus en charge que le sport de masse. Construire des terrains de proximité, des piscines relève du ministère, pas la sélection nationale ou la botola pro.
« Le ministre des Sports n’a pas à s’occuper des équipes nationales ou à aller dans les vestiaires »
Ce mélange sport et politique est dangereux, parce que l’on juge le gouvernement sur une performance dont il n’est pas responsable. Il ne choisit pas les joueurs, ni le sélectionneur, n’établit pas la tactique etc… Les parlementaires font du populisme quand ils parlent d’argent dépensé, surfant sur la désaffection du public qui comme toujours, est prêt à brûler ceux qu’il a adorés il n’y a pas si longtemps.
Des gens se battent comme des chiffonniers pour arriver à la présidence d’un club, dépensent des fortunes pour avoir des résultats et l’abandonnent après les élections. C’est ainsi que de grands clubs comme le CODM, le KACM, le KAC et bien avant, l’Etoile ont sombré. Si on veut construire un écosystème du football, il faut rompre ce lien incestueux entre le sport et les politiques.
Les politiques publiques peuvent y aider en combattant le hooliganisme, ce qui encouragera les gens à aller dans les stades, mais surtout en élargissant la base des pratiquants ce qui permettra l’émergence de talents et donc des résultats à terme.
L’association des vétérinaires a publié un communiqué inquiétant qui nous informe que les abattoirs ne respectent pas les normes sanitaires. Le Parlement n’a pas jugé nécessaire d’interpeller le ministre concerné. Mais par populisme, une défaite aux tirs au but devient une catastrophe nationale qu’il faut justifier. On marche sur la tête !
Le ministre des Sports ne peut tirer aucune gloire des victoires du Raja et du WAC parce qu’il n’y est pour rien. A l’inverse, il ne peut être incriminé lors des défaites. Le Parlement a d’autres fonctions que commenter un match de football. La représentation nationale n’est pas le café du commerce, et il est temps que ceux qui y siègent le sachent.