Sportif automobile, manager, ingénieur
Il se serait rêvé pilote de ligne, mais la vie en a décidé autrement. Ce produit de l’école publique marocaine a fait ses premières armes dans la haute administration avant de se tourner vers le privé, le développement durable, puis l’immobilier. Par Noréddine El Abbassi
M’hamed Mrini, c’est une main de fer dans un gant de velours. Rigueur, qu’il tient certes, de sa formation d’ingénieur, mais sans doute par la formation qu’il a eu l’occasion d’acquérir au Japon. Si l’on dit que l’on est la somme de ses expériences, celles de M’hamed Mrini ont été riches non seulement en enseignements, mais également en diversités.
Né en 1971, à Rabat, M’hamed est l’aîné des quatre frères de la famille. De ce fait, très tôt, il doit assumer des responsabilités d’ainesse, selon un modèle traditionnel qui stipule que: «dans une famille, c’est souvent le frère aîné qui doit montrer l’exemple», commente-t-il modestement. Habillé d’un costume sombre, d’une chemise blanche et d’une cravate sobre, il a le style du manager accompli. Mais on devine l’enfant sage, qu’il a dû être. Trop peut-être, puisque jeune homme, sa préférence sera plutôt pour un ordinateur que pour une moto afin de débuter la programmation. Peut être encore un autre aspect du sens des responsabilités. Le père fonctionnaire, conscient de ses responsabilités, délègue la gestion de la maisonnée à une épouse non moins responsable. «Ma mère nous a inculqué des valeurs axées autour de la cellule familiale, du respect des autres, de l’amour du prochain et de l’entraide entre les uns et les autres. Je crois, que par ailleurs, nous sommes une vraie famille unie», explique-t-il. M’hamed qui grandira dans le quartier bien situé de Hassan, et se rappelle d’une tranche de vie dont il garde le meilleurs souvenir. «C’était un quartier très tranquille», dira-t-il. Ce sont les années 80, et les loisirs sont modestes, comme pour toute une génération. On joue au football dans la rue, avec des camarades, qui, au fil des années font figure de seconde famille, tant la vie de quartier est unie. M’hamed est scolarisé à l’Ecole La Salle, une école privée de la capitale. La famille déménagera cependant pour le quartier salétin de Hay Salam, lorsque le père bénéficiera d’un terrain, concédé à prix préférentiel par l’Etat. C’est d’ailleurs, presque tout son entourage qui déménage alors. Comme une migration de ce même terreau de son enfance pour Salé.
Ingénieur passionné de développement durable
Nous sommes en 1988, M’hamed vient de décrocher son Bac scientifique, Sc Maths, comme on l’appelle alors, et débute dans la vie Associative en fondant le club de vulgarisation scientifique de l’Association Bouregreg. Sa vie rangée l’a fait passer du Collège Al Jahid au Lycée Ibn Khatib. Le moment de faire un choix de carrière. «Le niveau du lycée était bon. C’était avant l’arabisation, et nos enseignants marocains étaient à la hauteur. Nous avions tous des appétences différentes, mais avec des ambitions certaines. On aspirait à des carrières dans le journalisme, la médecine, ou encore à l’ingénierie», confie-t-il. Pourtant, il n’était pas évident que réaliser de tels projets était chose aisée. Mais M’hamed ne manquait ni de volonté, ni de bons résultats scolaires pour espérer réussir. Le choix était dès lors, entre des études d’ingénieur ou de médecine, les «voies royales», par excellence. M’hamed opte pour la première alternative. Il intègre donc le Lycée My Youssef de Rabat, pour suivre les cours des Classes préparatoires aux Grandes Ecoles d’Ingénieur. Au terme de deux années de préparation, il décroche le concours d’admission à l’Ecole Hassania d’Ingénieurs: «ce n’est certes, pas une école militaire, mais le régime était spartiate. Lors des entretiens préliminaires, on nous a expliqué que l’école dispensait non seulement une formation technique, mais avait aussi pour ambition de contribuer à l’épanouissement de ses élèves et d’aider à former des cadres dirigeants de hautes valeurs. Arguments qui, bien entendu, n’ont pas manqué de me séduire», explique-t-il, avec force détail. A l’Ecole Hassania, il opte pour les problématiques d’hydraulique et d’environnement. Prémonitoire cette expérience, puisque lorsqu’arrive 1993, le ministère de l’Equipement lance un concours d’admission pour un nouveau département dédié au «développement durable». «Je me souviens très bien de la date de remise des diplômes qui était le 3 juillet. Or, je prenais possession de mon bureau au ministère le 7. J’aurais eu donc, en tout et pour tout, 4 jours de vacances», s’exclame-t-il.
Un parcours d’élite
Les débuts du développement durable étaient alors très récents au Maroc. En 1992, la Banque Mondiale et le Gouvernement Marocain mettent en place la stratégie du pays dans le domaine. C’était, à la suite du Sommet de Rio, présidé par Mohammed VI, alors Prince Héritier. La cellule dont fait partie M’hamed met en place cette politique de développement durable. La carrière de M’hamed passera par plusieurs ministères, depuis le ministère de l’Equipement jusqu’au sous-secrétariat du ministère de l’Intérieur. Il restera dans le Service Public jusqu’en 1998. quand il entreprend une formation au Japon, organisée par la Coopération Internationale Nipponne. Il décroche le diplôme équivalent et en «prime» apprend la langue japonaise. «C’est au Japon qu’on découvre comment ce peuple, qui vit sur une île sans ressources naturelles, a su se structurer en société et en groupe, dans la fluidité et le respect de l’autre, ce n’est donc pas par hasard que le Japon fait partie du «club fermé» des plus «grandes puissances» de ce monde», développe-t-il. Il intègre alors un bureau d’études, où ils sont plusieurs ingénieurs à travailler sur les problématiques du dessalement de l’eau de mer et de l’alimentation en eau potable dans les zones rurales. Il y reste pendant cinq années, au bout desquelles il intègre la Société Centrale d’Equipement du Territoire. L’entreprise, appelée Scete fait partie du groupe de la Caisse des Dépôts et Gestion.
Sur le plan personnel, M’hamed est déjà marié depuis 1999 et 2004 verra la naissance de son premier enfant. Dans l’intervalle, M’hamed prépare un MBA à l’école des Ponts et Chaussées, délocalisée à l’Ecole Hassania, avant d’intégrer la NOVEC, toujours dans le même groupe. 2006 sera l’année du virage. Il passe dans une nouvelle filiale de la CGI, et est en charge d’Al Manar, qui gère le dossier de Casa Marina. Sa mission est de réfléchir à décupler le volume d’activité de l’entreprise. M’hamed trouve la solution dans l’introduction en bourse de l’entreprise. Il sera nommé DG de Casa Marina en 2010, l’année de naissance de son second enfant. Il se consacre entièrement au projet qu’il mène à terme en 2015. Depuis cette année, M’hamed Mrini a rejoint Eagle Hills comme Country Manager Maroc. «L’équipe dirigeante est composée de Managers de Emaar, donc même si l’entité est jeune, l’équipe est expérimentée», conclut-il. Et le Maroc a bien ses particularités propres.
Bio Express
1971: Naissance à Rabat
1988: Bac Sc Math au Lycée Al Jabir
1993: diplôme d’ingénieur de l’Ecole Hassania, débuts au Ministère de l’Equipement
1998: rejoint le bureau d’études Helgem
2003: entre à la Scete (groupe CDG)
2005: MBA des Ponts et chaussées
2006: entrée à la CGI
2010: DG d’Al Manar
2016: Country Manager de Eagle Hills