Traversée maritime : les prix repartent à la hausse
En situation de quasi-monopole de la traversée sur le détroit de Gibraltar, les compagnies maritimes étrangères se frottent les mains, prenant en otage le porte-monnaie des Marocains résidents à l’étranger (MRE) en cette période de grande affluence vers le royaume.
Les prix des billets de bateaux de la traversée du détroit de Gibraltar flambent de nouveau cette année sur certaines lignes. En effet, les compagnies maritimes espagnoles pratiquent des prix élevés sur Tanger. Cette situation serait due à la baisse du nombre de navires qui assurent le transit, passé de 30 bateaux il y a quelques années à 14 seulement. D’autant que cette année, quelques deux millions de passagers, majoritairement MRE, sont attendus entre le Maroc et l’Espagne. Pour calmer le jeu, le secrétaire d’Etat chargé du Transport Mohamed Najib Boulif, qui affirme, via sa page officielle, être interpellé par plusieurs citoyens dénonçant la hausse des prix de la traversée, a indiqué avoir contacté les compagnies maritimes pour leur faire part des prix officiels seront surveillés de près par son département.
Aujourd’hui, si cette hausse des tarifs peut s’expliquer par la baisse de la flotte, la vérité semble être ailleurs. « Actuellement, le royaume ne dispose que de 6 navires à passagers qui portent le pavillon marocain. Et deux parmi ces bateaux sont immobilisés. Il s’agit du « Le Rif » en rénovation à Naples et du « Détroit Jet » à l’arrêt à Cardix suite à une collision. Ainsi, avec le Tanger Express de la compagnie FRS, le Morocco Star d’Africa Morocco Link (AML) et les 2 navires d’Intershipping, le pavillon marocain n’offre qu’une capacité de 4 000 passagers et de 1 000 voitures, ce qui pèse peu face à leurs concurrents espagnols », explique Najib Cherfaoui, expert maritime, qui précise que le secteur du transport maritime marocain et le pavillon national vont très mal. « Les professionnels qui ont perdu toute visibilité attendent, depuis des années, les bouées de sauvetage de l’État. Comarit et IMTC qui ont fait faillite suite à la crise de 2010 n’avaient besoin que de 200 millions de DH pour se relancer. Il fallait les soutenir, c’est l’erreur commise par le gouvernement de l’époque », martèle-t-il. En tout cas, aujourd’hui, les espagnols font la pluie et le beau temps sur ce marché de la traversée sur le détroit de Gibraltar, qui pèse plus d’un milliard de DH. Les compagnies Baléaria, Armas et Trasmediterranea contrôlent à elles trois, une dizaine de navires. « Les pouvoirs publics espagnols ont compris les enjeux stratégiques de ce marché. Ce n’est pas par hasard qu’ils subventionnent le carburant pour leur pavillon. Pendant ce temps, au Maroc, le gouvernement à travers le ministère de l’Équipement et du Transport est toujours en train de voir avec l’étude qu’il a lancé il y a quelques années. La flotte marchande de notre pays a diminué des deux tiers en 20 ans, en conséquence, le coût des transports maritimes s’est aggravé », souligne Najib Cherfaoui. Après la libéralisation du secteur, le pavillon marocain qui comptait 76 navires en 1989 n’en compte actuellement que 17. « Le roi Feu Hassan II avait doté notre pays d’une véritable industrie maritime pendant les années 1970 à travers le code des investissements de 1973. Depuis et jusqu’en 2005, cela avait permis au Maroc de disposer d’une flotte marchande de 62 navires pour couvrir une part substantielle de ses échanges en 1987. En 2004, nous disposions encore de 45 navires couvrant 17% de notre transport commercial », regrette un professionnel.