Un mal marocain ( Par Jamal Berraoui )
Les militants associatifs réclament souvent le renouvellement des directions politiques. Or, force est de constater que les mêmes dirigent les ONG les plus en vue depuis des décennies, quitte à les affaiblir pour garder les commandes. C’est un problème culturel. Rachid Taoussi, entraineur de l’équipe nationale s’appuie sur un nul, dans un match sans enjeu, pour revendiquer son maintien à son poste. La notion même de mission, limitée dans le temps, est difficilement concevable.
Peu de dirigeants ont su passer le témoin à temps. Sur le plan politique, les scissions multiples ont souvent pour origine le manque de mobilité au niveau des directions. Les différends, quand ils existent, sont exacerbés par les ambitions individuelles contrariées. C’est un fait. Chez les associatifs, Monsieur ou Madame la présidente, finissent par identifier la cause à leur propre personne, ce qui lasse les bénévoles.
Le plus grave, ce sont les entreprises familiales. De grands capitaines d’industrie mettent en danger leur empire, parce qu’ils concentrent tous les pouvoirs. D’un âge très avancé, ils continuent à castrer leurs enfants, pourtant bien formés. On ne citera pas de noms, mais de grands groupes sont toujours dirigés par le patriarche qui maintient les fils dans un statut d’exécutants alors qu’ils approchent de la cinquantaine.
Ce refus de passage de témoin doit être étudié comme un phénomène sociologique, parce qu’il a un coût. La régénérescence des structures, handicapée, cela signifie des opportunités ratées.
Cela nous amène à la perception de la retraite. Rares sont ceux qui la conçoivent comme une étape de la vie où l’individu peut se poser et avoir des activités différentes. La retraite pour la majorité d’entre nous, c’est la fin, une pré-mort que l’on veut reculer au maximum. Ailleurs, les gens en profitent pour réaliser leurs rêves.
On ne peut obliger un patron à passer la main. Mais pour les structures à base de volontariat, la limitation des mandats devrait être la règle. Les partis politiques, injustement décriés, ont entamé cette démarche pour certains d’entre eux. L’Istiqlal, l’USFP par exemple limitent à deux mandats, soit dix ans, la durée de vie au secrétariat général. Les ONG n’ont pas entamé cette mue. A l’exception notable de l’OMDH qui connaît un vrai Turn-over, les grandes associations sont identifiées à un individu. Les luttes intestines qui découlent de ce phénomène sont une vraie source de déperdition d’énergies. On multiplie les associations avec le même objectif, parce que le chef prend toute la place. C’est un mal marocain qui mérite d’être analysé.